Mal de dos: 9 traitements sur 10 ne présenteraient aucun intérêt

Les maux de dos comptent parmi les problèmes de santé les plus fréquents au pays. De 70 à 85% des Canadiennes et Canadiens en souffrent, à différents degrés, au moins une fois au cours de leur vie, la majorité de ces douleurs étant de cause inconnue. Environ 40% de ces personnes voient leurs activités quotidiennes perturbées, et 10% d’entre elles doivent complètement les cesser, selon Statistique Canada. Manque de chance pour ces patients en puissance, la plupart des traitements non chirurgicaux pour soulager les lombalgies seraient inefficaces, conclut une étude publiée récemment dans le BMJ Evidence-Based Medicine.Pilotée par des chercheurs de l’Université de New South Wales en Australie, cette revue systématique suivie d’une méta-analyse a porté sur 301 essais randomisés contrôlés par placebo. Ils impliquaient des adultes souffrant de lombalgies non spécifiques et couvraient pas moins de 56 traitements différents ou combinaisons de traitements. Dans ce panel figuraient des approches thérapeutiques classiques comme les anti-inflammatoires ou l’exercice physique, mais aussi des options moins orthodoxes telles que la réflexologie plantaire ou les ventouses chinoises (dry cupping).Chaque traitement a été évalué en fonction de sa capacité à réduire l’intensité de la douleur, mesurée sur une échelle de 0 à 100, immédiatement après la fin de celui-ci. Les résultats ont été analysés à l’aide de méta-analyses à effets aléatoires, et la certitude des preuves a été évaluée selon l’approche GRADE (Grading of Recommendations Assessment, Development, and Evaluation). Qu’il s’agisse d’approche pour les lombalgies aiguës (courtes) ou chroniques (longues), les chercheurs sont parvenus à une conclusion interpellante. «Les données actuelles montrent qu’un traitement non chirurgical et non interventionnel sur dix contre la lombalgie est efficace, procurant seulement de légers effets analgésiques au-delà du placebo», écrivent-ils dans leur publication.Lire aussi: Il faut considérer l'aspect psychologique des maux de dosSelon eux, seuls les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), comme l’ibuprofène ou l’aspirine, offrent un soulagement effectif du mal de dos aigu, c’est-à-dire qui dure moins de 12 semaines. Tandis que pour la lombalgie chronique (plus de douze semaines), cinq approches semblent efficaces: l’exercice physique, les manipulations vertébrales, le taping (bandage adhésif thérapeutique), les antidépresseurs et les agonistes des récepteurs TRPV1.Parmi les traitements qui n’ont pas montré d’efficacité, on retrouve entre autres les injections de glucocorticoïdes et de paracétamol, les analgésiques topiques (comme la lidocaïne), la chiropraxie, la stimulation nerveuse électrique transcutanée ou encore les bisphosphonates et les relaxants musculaires.MonociblageSurpris par ces résultats, l’auteur principal de l’étude, Aidan Cashin, estime que cette inefficacité généralisée peut tenir à l’aspect réductionniste des traitements disponibles pour les maux de dos aigus et chroniques. «Beaucoup des interventions étudiées ne tentent de cibler qu’un seul facteur potentiellement contributif, ce qui peut en partie expliquer pourquoi, en moyenne, de nombreux traitements n’étaient pas efficaces», indique le physiologiste, directeur adjoint du Centre for Pain IMPACT de l’organisme Neuroscience Research Australia.Pour plusieurs autres traitements, les preuves restent incertaines en raison de la taille limitée des échantillons, de l’imprécision des résultats ou de la faible certitude des preuves. Par exemple, l’acupuncture, la thérapie comportementale, et les traitements par la chaleur montrent des résultats prometteurs, mais les données disponibles ne permettent pas de conclusions définitives.Lire aussi: Le recours à la chirurgie pour soulager la douleur ne serait pas toujours appropriéVoici un aperçu des traitements les plus notables et de leur efficacité:Traitements pour les lombalgies aiguësAnti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS): jugés d'«efficacité modérée», les AINS ont montré une réduction modeste, mais significative de la douleur, avec une diminution moyenne de 3,8 points sur une échelle de 0 à 100 (IC à 95%: -5,8 à -1,8).Exercice physique : souvent recommandé pour la gestion à long terme, l’exercice ne semble pas offrir de bénéfices immédiats significatifs pour la douleur aiguë, avec une réduction moyenne de 4,1 points (IC à 95%: -12,0 à 3,7).Injections de glucocorticoïdes et paracétamol: cette approche n’a pas montré d’efficacité significative, avec des réductions de la douleur aiguë proches de zéro.Traitements pour les lombalgies chroniquesExercice physique: également recommandé pour améliorer la fonction physique générale, l’exercice est classé «probablement efficace» en montrant une réduction modérée de la douleur de 7,9 points (IC à 95%: -13,6 à -2,2).Manipulation vertébrale: bénéfique pour certains patients, cette thérapie a réduit leur douleur de 6,4 points (IC à 95%: -10,3 à -2,5)Taping: bien que les preuves soient moins solides que pour d’autres traitements, le taping peut offrir un soulagement modeste, avec une réduction de la douleur évaluée à 6,3 points (IC à 95%: -12,1 à -0,4).Antidépresseurs: utiles pour les patients ayant des troubles de l’humeur associés à leurs maux de dos, les antidépresseurs ont réduit la douleur de 4,9 points (IC à 95%: -6,8 à -2,9).Agonistes des récepteurs TRPV1: cette nouvelle classe de médicaments offre une option prometteuse pour la gestion de la douleur chronique, avec une réduction de la douleur de 8,2 points (IC à 95% : -13,0 à -3,5).«Chaque patient est unique, et ce qui fonctionne pour l’un peut ne pas fonctionner pour l’autre», rappelle Aidan Cashin. D’où, selon lui, la nécessité de partir du principe que chaque lombalgie est différente en considérant que seul un diagnostic précis et individualisé permet de déterminer quel traitement sera le plus adapté en fonction des besoins spécifiques du patient. L’impératif commun à tous, énonce le physiologiste: «Il est crucial de se concentrer sur les traitements ayant des preuves solides d’efficacité et de continuer à rechercher de nouvelles options thérapeutiques»RéférenceCashin AG, Furlong BM, Kamper SJ, et coll. Analgesic effects of non-surgical and non-interventional treatments for low back pain: a systematic review and meta-analysis of placebo-controlled randomised trials. BMJ Evidence-Based Medicine. Publié en ligne le 18 mars 2025. doi: 10.1136/bmjebm-2024-112974

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