Chirurgie bariatrique: une nouvelle intervention disponible au Québec

Un patient souffrant d’obésité a subi, mi-mai, une gastroplastie endoscopique par manchon (GEM) dans la Clinique Michel Gagner, située à Westmount, la seule à offrir actuellement cette chirurgie au pays. L’opération, qui consiste à suturer une partie de l’estomac par voie endoscopique, a été réalisée par la Dre Lamees Almutlaq sous la supervision du chirurgien-chef de la clinique, le Dr Michel Gagner. Ce dernier souligne par ailleurs que «cette procédure, approuvée en février 2024 par Santé Canada, représente une avancée notable dans le traitement de l’obésité».Comparé à d’autres interventions bariatriques, comme le pontage gastrique ou la gastrectomie laparoscopique (également connue sous le nom de sleeve gastrique), «la GEM est beaucoup moins invasive, car on n’enlève aucune partie de l’estomac et on n’a pas à créer de communication avec l’intestin», signale le Dr Gagner. Autres avantages, la GEM étant effectuée à l’aide d’un endoscope, elle ne laisse aucune cicatrice sur l’abdomen du patient, qui peut généralement rentrer chez lui le jour même et reprendre ses activités quotidiennes au bout de deux à trois jours.L’intervention est réalisée sous anesthésie générale et dure environ une heure. Avec un endoscope à deux canaux, le chirurgien introduit une mini agrafeuse afin d’appliquer six à huit plicatures le long de la grande courbure de l’estomac. «On vient fusionner les faces postérieure et antérieure de l’estomac, qui prend alors une forme cylindrique ou de “manchon”. Son volume est réduit de 70% à 80%, ce qui entraîne une sensation de satiété plus rapide», explique le clinicien spécialisé en chirurgie bariatrique.La GEM entraîne ainsi des pertes de poids significatives, autour de 15% du poids corporel initial dans l’année suivant la chirurgie, certains patients pouvant perdre jusqu’à 25% de leur poids, selon un essai clinique randomisé incluant 209 participants dont les résultats ont été publiés en 2022 dans The Lancet. Ils montrent également que les deux tiers des patients opérés maintiennent la majeure partie de leur perte de poids deux ans après l’intervention.Selon le Dr Gagner, l’efficacité de la gastroplastie endoscopique par manchon équivaut ou dépasse celle des médicaments amaigrissants actuels, comme le sémaglutide, à la différence près que leur arrêt se solde, dans la grande majorité cas, par une reprise du poids perdu au cours des mois suivants. En revanche, la GEM serait un peu moins efficace que la sleeve gastrique, puisque dans le cadre de cette dernière, «on retire la partie gauche de l’estomac où est secrétée la ghréline, l’hormone qui suscite la faim, alors qu’avec la GEM, on a encore des sécrétions de ghréline», signale le chirurgien. Il ajoute que «la GEM est plus sécuritaire que la sleeve, car elle présente un risque de complications plus élevé».Cette technique permet également de renverser la procédure, de la répéter pour restreindre un peu plus la taille de l’estomac, voire de la remplacer par d’autres interventions bariatriques si nécessaire. Destinée à des personnes obèses de classe II (indice de masse corporelle entre 35,0 et 39,9 kg/m2) et de classe III (IMC de 40 kg/m2 et plus), la GEM «devrait plaire à beaucoup de patients qui sont prêts à accepter des résultats moindres qu’avec la sleeve en optant pour une chirurgie minimalement invasive qui ne laisse aucune cicatrice», estime le Dr Gagner.Lire aussi: Obésité: aider les patients à trouver leur poids idéalUn coût significatifSeul hic: cette intervention n’est pas remboursée par les régimes provinciaux d’assurance maladie. Elle n’est pour l’instant pratiquée qu’au privé et elle a un coût conséquent. Rien que l’appareillage à usage unique (endoscope, mini agrafeuse, cathéter à hélice, fils de sutures, etc.) nécessaire à la GEM «coûte environ 10 000$», souligne le Dr Gagner, une somme à laquelle s’ajoutent les honoraires du chirurgien, de l’anesthésiologiste, de l’assistance infirmière et les frais de bloc opératoire.Comme les autres interventions bariatriques, «la gastroplastie endoscopique par manchon pourrait entraîner des économies substantielles pour les systèmes de soins de santé en réduisant les comorbidités métaboliques liées à l’obésité, tels le diabète de type 2, le foie gras ou l’apnée du sommeil», estime toutefois le chirurgien en observant qu’on réalise trois fois moins de chirurgies bariatriques au Canada qu’aux États-Unis. «On en pratique environ 10 000 par année alors que 1,5 à 2 millions de Canadiens souffrent d’obésité sévère.»Le Dr Gagner explique cette situation en raison des pénuries de temps opératoire partout au pays. «On se concentre sur les chirurgies essentielles. Les opérations bariatriques passent après. On est pris dans un cercle vicieux, car si on faisait plus de chirurgies bariatriques, on ferait moins de chirurgies pour des cancers, des maladies coronariennes ou des problèmes de hanche et de genou», affirme le médecin.

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