La vérité en médecine

Nous vivons une époque où la «vérité» est plus importante que jamais. La vérité est la pierre angulaire de la confiance, dont notre profession dépend. Or, la politique est truffée d’individus qui dévalorisent la vérité, qui sont prêts à la déformer, voire à mentir carrément, pour favoriser leur richesse, leur situation ou leur pouvoir. Comment cela est-il possible? La société le veut, inconsciemment ou consciemment.Par société, j’entends ce sous-ensemble d’individus qui sont en mesure de tirer profit du mensonge. Monétairement ou matériellement. «Je m’enrichis si je fais pression sur X pour promouvoir mon produit, pour que mon entreprise obtienne des contrats, pour que mes collègues et moi-même soyons plus puissants» - souvent aux dépens de ceux qui ont moins, beaucoup moins. Moins de revenus, moins de pouvoir, moins de sécurité, moins d’options. Une démocratie peut-elle se transformer en une autocratie d’oligarques, promouvant leur intérêt personnel aux dépens de l’homme de la rue? Si c’est le cas, elle est condamnée et peut mourir, par exemple, sous la forme d’une dictature fasciste ignorante. La vérité est souvent difficile à percevoir. Elle a plusieurs définitions et connotations. En tant que médecin, la vérité est définie comme un énoncé de fait, une croyance, un argument ou une pratique qui est étayée par des données, qui est vérifiable et solide, qui est ouvert à l’examen et à l’analyse critique. Sur Internet, on peut lire l’affirmation suivante: «La planète Terre est plate». Cette affirmation peut être répétée souvent, mais pas assez pour remettre en cause de manière crédible un fait scientifique: la Terre se comporte comme un globe excentrique en rotation sur une orbite elliptique se déplaçant autour d’une boule enflammée d’hydrogène et d’hélium, notre Soleil. Lorsque je parle à un collègue, à un patient ou à n’importe qui d’autre en fait, je dois dire la vérité. Parfois, la vérité peut être dite par bribes («Oui, il y a une anomalie sur votre radio du thorax, qui peut être un processus bénin ou un cancer»), conduisant progressivement à une réponse plus spécifique («C’est un cancer, et vous aurez besoin d’une opération»). Parfois, la vérité peut être partielle («Votre réduction du risque relatif avec la thérapie est de 50%» - même si la réduction du risque absolu de 0,3% à 0,2% n’est pas aussi impressionnante). Parfois, la vérité passe après l’opportunisme politique («Je suis sûr que la science médicale trouvera un jour un remède à ce désastre génétique»). Parfois, la vérité est relative («C’est une fibrose pulmonaire. Au moins, ce n’est pas un cancer»).Lire aussi: Dans quelle mesure la littérature scientifique influence-t-elle la pratique des médecins?Les patients (dont je fais partie) ont besoin de savoir ce qu’ils doivent savoir pour bien vivre et bien mourir. Je pense que la plupart d’entre eux souhaitent de l’honnêteté, de l’empathie et de la compassion. Et dans cette équation se trouve la vérité; dans des proportions qui génèrent de l’espoir, confirment la réalité et permettent d’échapper au spectre d’une mort imminente.La déesse romaine de la vérité était Veritas (appelée Aletheia par les Grecs), fille de Saturne. La recherche de la vérité était considérée comme un voyage essentiel pour chaque citoyen. Démocrite disait que Veritas se cachait au fond d’un puits, suggérant que la vérité était difficile à trouver. C’était déjà le cas à l’époque. À consulter: Annoncer une mauvaise nouvelle à un patientGeorge Washington est associé à plusieurs anecdotes sur la vérité. La plupart des gens ont entendu parler de sa déclaration: «Je ne peux pas mentir. C’est moi qui ai coupé le cerisier.» Son père l’a embrassé en lui disant que l’honnêteté valait plus que mille arbres. Cependant, rien ne prouve que Washington n’ait jamais dit cela. L’histoire a été inventée par Mason Locke Weems, l’un de ses premiers biographes.Lorsque nous parlons à nos enfants, nous arrive-t-il de dire un petit mensonge? Oui, certainement. Quand nous pensons aux hommes politiques, attendons-nous d’eux une vertu incontestable? Non, non, mille fois non. Lorsque quelqu’un jure sur une bible dans un tribunal, sommes-nous convaincus d’entendre une vérité sans faille? Malheureusement, non. Lorsque nous allons au combat et que nous nous battons jusqu’à la mort, acceptons-nous comme vrai que notre Dieu est meilleur que le leur?En tant que médecins, nous testons chaque jour les limites de l’honnêteté. Il s’agit d’une énorme responsabilité, c’est certain. Une responsabilité que nous devrions tous prendre au sérieux. Et avec un certain degré de fierté.Le Dr Hector Baillie est un interniste généraliste communautaire qui travaille en Colombie-Britannique. Il écrit sur des cas et des concepts susceptibles de stimuler la discussion et le changement.

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