GLP-1: des effets antidépresseurs incertains chez les personnes âgées atteintes de DT2

Alors que les personnes âgées ont la plus forte incidence de diabète au pays – 27% chez les plus de 65 ans1 –, elles sont aussi particulièrement vulnérables à la dépression, qui toucherait 20% d’entre elles selon la Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées. Or, le diabète de type 2 (DT2) double voire triple le risque de souffrir de dépression, et celle-ci accroît le risque de développer un DT2 selon plusieurs études2,3.Des chercheurs de l’Université de Floride, aux États-Unis, ont cherché à déterminer si un nouveau traitement par agonistes du récepteur GLP-1 (GLP-1RA), qui ont démontré des effets antidépresseurs potentiels4, était plus ou moins associé à la dépression chez les personnes âgées atteintes de DT2 qu’un nouveau traitement par inhibiteurs du cotransporteur sodium-glucose-2 (SGLT2i) ou par inhibiteurs de la dipeptidyl peptidase-4 (DPP4i). Leurs conclusions ont été publiées dans la revue Annals of internal medicine5.Selon eux, la littérature est incohérente sur les effets potentiellement antidépresseurs des GLP-1RA, puisque deux études ont observé une tendance à la diminution du risque de dépression chez les utilisateurs de GLP-1RA par rapport aux non-utilisateurs de GLP-1RA (6-7), tandis que deux autres n'ont trouvé aucune association protectrice par rapport aux sulfonylurées ou à une ou deux prescriptions d'un GLP-1RA (8-9). À lire aussi: GLP-1: de nouvelles données apaisent les craintes d’un risque accru de suicideL’équipe de la Dre Jingchuan Guo, professeure adjointe au département des résultats et politiques pharmaceutiques de l’Université de Floride, a utilisé les données du programme américain Medicare de janvier 2014 à décembre 2020. Les participants éligibles sont les personnes âgées de 66 ans ou plus ayant reçu un diagnostic de DT2 et n'ayant pas reçu de diagnostic antérieur de diabète de type 1, de dépression ou d'un autre trouble de l'humeur, n'ayant pas pris d'antidépresseurs, n'ayant pas de contre-indication aux médicaments de l'étude (maladie rénale en phase terminale ou dialyse) et n'ayant pas pris de GLP-1RA, de SGLT2 ou de DPP4 au cours de l'année écoulée. Les adultes âgés de 66 ans ou plus atteints de DT2 commençant un traitement avec un GLP-1RA ont été appariés 1:1 sur le score de propension avec ceux commençant un traitement avec un SGLT2i ou un DPP4i.Au total, 40 633 patients éligibles ont été identifiés dans la cohorte GLP-1RA versus SGLT2i (17 678 utilisateurs de GLP-1RA et 22 955 utilisateurs de SGLT2i) et 60 974 dans la cohorte GLP-1RAs versus DPP4is (16 362 utilisateurs de GLP-1RA et 44 612 utilisateurs de DPP4i). Après l'appariement, les chercheurs ont inclus 14 665 paires de patients dans la cohorte GLP-1RA versus SGLT2i et 13 711 paires dans la cohorte GLP-1RA versus DPP4i.Un effet antidépresseur incertainDans la première cohorte, après un traitement d’une durée médiane de 0,42 ans et un suivi médian de 1,57 an, la différence de taux de dépression entre les utilisateurs de GLP-1RA et les utilisateurs de SGLT2i était de 3,48 (IC à 95%, −0,81 à 7,78) pour 1000 personnes-années. «Il n'y avait pas de différence de risque de dépression entre le GLP-1RA et le SGLT2i (HR, 1,07 [CI, 0,98 à 1,18])», notent les auteurs. Dans la deuxième cohorte, après un traitement d’une durée médiane de 0,44 ans et un suivi médian de 1,65 an, la différence de taux entre les utilisateurs de GLP-1RA et les utilisateurs de DPP4i était de −5,78 (IC, −10,49 à −1,07) pour 1000 personnes-années, avec un HR de 0,90 (IC, 0,82 à 0,98). Ainsi, l'utilisation des GLP-1RA a été associée à une diminution du risque de dépression incidente par rapport aux DPP4i (HR, 0,90 [CI, 0,82 à 0,98]). À lire aussi: Diabète: simplification du schéma thérapeutique et stratégies de déprescription chez les personnes âgées«Chez les personnes âgées atteintes de diabète de type 2, l'incidence de la dépression était relativement faible. L'utilisation d'agonistes du récepteur du GLP-1 était associée à un risque légèrement inférieur de dépression par rapport à l'utilisation d'inhibiteurs de la DPP4, mais pas d'inhibiteurs de la SGLT2», concluent les chercheurs, qui soulignent que leurs résultats étaient cohérents dans l'analyse de sensibilité et les multiples analyses de sous-groupes stratifiés selon l'âge, le sexe, la race et l'origine ethnique, le statut d'obésité, l'utilisation initiale d'insuline et la molécule spécifique de GLP-1RA.Ainsi, «il n'est pas certain que les GLP-1RA aient un effet protecteur sur le risque de dépression.» L’équipe de la Dre Guo explique les effets potentiellement antidépresseurs de la molécule par son action favorisant la neurogenèse, la plasticité synaptique, réduisant la neuroinflammation et rétablissant des déséquilibres des neurotransmetteurs (des processus perturbés par la dépression), mais aussi par la perte de poids associée à leur utilisation, qui peut contribuer indirectement à l'amélioration de la santé mentale.Références:Agence de la santé publique du Canada. Aperçu du diabète au Canada, 2023. (consulté le 21 mars 2025).Alzoubi A, Abunaser R, Khassawneh A, et coll. The bidirectional relationship between diabetes and depression: a literature review. Korean J Fam Med. 2018;39:137-146. [PMID: 29788701] doi:10.4082/ kjfm.2018.39.3.137Bădescu SV, Tătaru C, Kobylinska L, et coll. The association between diabetes mellitus and depression. J Med Life. 2016;9:120- 125. [PMID: 27453739]Chen X, Zhao P, Wang W, et coll. The antidepressant effects of GLP-1 receptor agonists: a systematic review and meta-analysis. Am J Geriatr Psychiatry. 2024;32:117-127. [PMID: 37684186] doi:10.1016/j.jagp.2023.08.010Tang H, Lu Y, Donahoo WT, et coll. Glucagon-Like Peptide-1 Receptor Agonists and Risk for Depression in Older Adults With Type 2 Diabetes: A Target Trial Emulation Study. Ann Intern Med.2025;178:315-326. [Epub 25 février 2025]. doi:10.7326/ANNALS-24-0134719. Tsai WH, Sung FC, Chiu LT, et coll. 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