Gérer les troubles du sommeil chez les patients souffrant de douleurs chroniques

On estime que 67% à 88% des personnes souffrant de douleurs chroniques présentent également des troubles du sommeil, se manifestant généralement par un allongement du temps nécessaire pour s'endormir, des réveils fréquents et une diminution de la durée totale de sommeil (1,2).Ces patients croient souvent que si leur douleur est traitée, cela résoudra leurs troubles du sommeil. Cependant, la dynamique entre la douleur et le sommeil est assez complexe puisque bidirectionnelle : par conséquent, le traitement de la douleur n'est peut-être pas la seule solution. (2,3)Plusieurs études démontrent en effet que les troubles du sommeil augmentent la sensibilité à la douleur en abaissant le seuil de tolérance, ce qui a pour résultat d'accroître l'intensité et la perception de la douleur ressentie. (4-6) De plus, une privation accrue de sommeil semble diminuer les effets des analgésiques. (3,4)Approches non pharmacologiques pour traiter l’insomnieLa première approche pour traiter les troubles du sommeil dus à la douleur chronique est d'éduquer le patient à l'importance des principes d'hygiène du sommeil. Ceux-ci peuvent en effet aider à corriger les comportements inadaptés qui les augmentent. (7)La thérapie cognitivo-comportementale de l'insomnie (TCC-i) est une autre approche non pharmacologique qui peut être utile; elle s'est avérée plus efficace que l'utilisation de médicaments pour traiter l'insomnie chronique (8). La TCC-i favorise l'hygiène du sommeil. Elle aborde également le contrôle du stimulus, la restriction du sommeil, l'entraînement à la relaxation et la restructuration cognitive pour améliorer la capacité d'un patient à atteindre un sommeil profond / rapide (8). (8) La TCC-i peut être offert par des psychologues cliniciens spécialisés en session individuelle ou de groupe, ou en ligne.La méditation de pleine conscience peut être tout à fait thérapeutique et d'une efficacité comparable à la thérapie médicamenteuse, car elle aide à la relaxation et réduit l'anxiété qui culmine souvent le soir et lorsqu'un patient tente de s'endormir (8).Autres approches non pharmacologiquesRéduire la consommation de caféine et d'alcool.Limiter les repas copieux avant le coucher ou les aliments qui provoquent les reflux acides.Éviter les siestes dans la journée ou en soirée car cela perturbe le cycle du sommeil.Faire davantage d'activité physique pour favoriser la fatigue, mais pas avant le coucher.Enlever l'horloge de la vue afin de diminuer la panique associée au fait de ne pas s'endormir.Retirer la télévision, l'ordinateur portable (ou tout autre appareil électronique émettant de la lumière) de la chambre à coucher.Utiliser la chambre uniquement pour le sommeil et l'intimité (effectuer d'autres tâches dans la chambre, comme le travail, peut inconsciemment éveiller les individus).Contrôler la température et le bruit dans la chambre (utiliser le bruit blanc au besoin).Pharmacothérapie pour traiter l'insomnie en présence de douleurs chroniquesLes personnes souffrant de douleurs chroniques et de troubles du sommeil sont susceptibles de prendre plusieurs médicaments de différentes classes, ce qui peut être problématique en cas d'utilisation concomitante avec certains hypnotiques. Certaines lignes directrices sur l'insomnie encouragent l'utilisation de benzodiazépines et d'autres agonistes des récepteurs des benzodiazépines (par exemple, les «médicaments Z», tels que la zopiclone et le zolpidem); or, ces classes de médicaments comportent un risque important pour de nombreux patients souffrant de douleurs chroniques. (9,10)Les benzodiazépines diminuent l'activité respiratoire et du système nerveux central (SNC). Ainsi, lorsqu'elles sont utilisées en conjonction avec un traitement aux opioïdes, elles sont plus susceptibles d'entraîner des événements indésirables non fatals (par exemple, de la somnolence, un trouble de l'équilibre, une dépendance, une perturbation de l'architecture du sommeil, du délire chez les personnes âgées) et et des événements fatals (comme des accidents entraînant la mort, une dépression respiratoire) (11,12). Par conséquent, les benzodiazépines ne devraient pas être utilisées comme agents de première ou de deuxième intention pour l'insomnie en présence de douleur chronique. Les médicaments Z sont plus sûrs que les benzodiazépines, car ils ne provoquent pas de dépression respiratoire; cependant, la dépression du SNC et la dépendance sont courantes. (11)Les antipsychotiques (par exemple, quétiapine 12,5–50 mg, olanzapine 2,5–10 mg) sont utilisés comme agents hypnotiques chez les patients souffrant de troubles psychiatriques et chez les personnes âgées souffrant de troubles du comportement. (11) Ce ne sont pas des agents à privilégier pour une utilisation à long terme, en raison de leur profil de risque cardiovasculaire défavorable, et devraientsi possible être évités. (13)En raison des risques associés aux classes de médicaments susmentionnées, les antidépresseurs, en particulier ceux pouvant avoir des effets analgésiques, sont largement utilisés en première ligne pour gérer les troubles du sommeil chez les patients souffrant de douleurs chroniques(12). Les antidépresseurs tricycliques, tels que l'amitriptyline (10 à 50 mg), la nortriptyline (10–50 mg) ou la doxépine (3–6 mg [marque] ou 10–50 mg [générique]), sont utiles pour favoriser le sommeil et traiter la douleur neuropathique. D'autres antidépresseurs sédatifs peuvent être utilisés, tels que la trazodone (par exemple, 25 à 50 mg) ou la mirtazapine (par exemple, 7,5 à 15 mg); cependant, ces médicaments n'ont pas d'effets analgésiques. (12)Les cannabinoïdes tels que le nabilone (0,25-1 mg) ou le cannabis médical sont utilisés hors indication pour le traitement de l'insomnie dans la douleur chronique (14,15). D'après mon expérience, ils offrent des résultats beaucoup plus favorables contre l'insomnie que les benzodiazépines ou les antipsychotiques.Des produits à base de plantes (notamment la mélatonine) sont également utilisés pour traiter l'insomnie. La mélatonine est produite de manière endogène par la glande pinéale et libérée dans la circulation sanguine selon le rythme circadien; il a été démontré qu'elle synchronise les rythmes circadiens et améliore l'endormissement, la durée et la qualité du sommeil. (16) La mélatonine a un très faible potentiel de dépendance et est sûre à des doses

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