Conseils pour la prise en charge de la sciatique

Environ 80% des personnes souffriront d'un épisode de lombalgie au cours de leur vie, selon Bone and Joint Canada. Pour certains, il s'agira d'une sciatique, une radiculopathie lombaire qui se traduit par une douleur irradiante causée par l'atteinte du nerf sciatique ou de ses racines nerveuses entre les L4 et S3.Dans la majorité des cas, la sciatique disparaît en l'espace de quatre à six semaines après un traitement conservateur. Chez 10% des patients, la douleur persiste plus longtemps et certains d'entre eux doivent subir une intervention chirurgicale.Évaluation et investigationIl n'existe pas de lignes directrices canadiennes spécifiques pour l'évaluation et le traitement de la sciatique, malgré l’existence des lignes directrices sur la lombalgie en général. Une directive du National Institute for Health and Care Excellence (NICE) sur la sciatique chez les personnes de plus de 16 ans a été publiée en 2020, et une revue des différentes lignes directrices a été publiée dans un numéro de 2023 des Archives of Physical Medicine and Rehabilitation.Lorsqu'il s'agit d'examiner une douleur radiculaire, si le patient souffre également d'incontinence urinaire ou fécale ou d'anesthésie de la selle, il faut l'envoyer immédiatement à l’urgence. Des signes de faiblesse, tels qu'un pied tombant, nécessitent également une action urgente. Pour les autres patients, il convient de surveiller tout signe d'alerte, tels que des tumeurs malignes ou des traumatismes de la colonne vertébrale ou d'un nerf.Les patients souffrant de lombalgie n'ont généralement pas besoin d'imagerie, selon Choisir avec soin. L'imagerie peut être nécessaire si le médecin soupçonne une pathologie sous-jacente grave, ou si elle est nécessaire pour planifier une intervention, telle qu'une chirurgie. Un électrodiagnostic de stimulo-détection peut être utile pour les patients souffrant de douleurs persistantes, indique le Dr Scott Cook, physiatre et spécialiste de la douleur à l'hôpital Grand River de Kitchener, en Ontario.Lors de l'évaluation des patients souffrant de sciatique, une diagnostic d'arthrose de la hanche est fréquemment posé par erreur, souligne le Dr Jérémie Larouche, chef de la chirurgie de la colonne vertébrale au Sunnybrook Health Sciences Centre à Toronto. Une douleur irradiante qui peut être reproduite lors d'une rotation interne de la hanche est rarement une sciatique, ajoute-t-il. Une radiographie peut confirmer si la douleur est due à une irritation mécanique provenant de la hanche.Prise en charge multimodale incluant l'éducation à la douleur La prise en charge de la sciatique doit inclure la physiothérapie, l'exercice physique, l'aide au sevrage tabagique et l'obtention ou le maintien d'un poids sain. Le massage est une autre option. L'exercice dans l'eau peut être plus facile pour certains patients car leur poids est réduit, note le Dr Cook.Les patients auront également besoin de conseils ou d'un soutien psychologique pour les aider à vivre avec la douleur. «Il peut être important d'avoir des stratégies cognitives pour aider à gérer les choses. Le plus souvent, vous êtes seul avec vos pensées, alors avoir ces outils pour vous aider à gérer la situation est un élément important», estime le Dr Cook.À lire aussi: Que montre vraiment l’imagerie médicale en cas de mal de dos?L'éducation sur la douleur est un élément essentiel pour tout type de douleur. Elle peut aider les patients à comprendre la nécessité de bouger, la manière de reprendre leurs activités quotidiennes et les changements de mode de vie qui sont bénéfiques.«Quoi qu'il en soit, même si le patient est opéré, une grande partie d'entre eux continueront à souffrir d'une certaine forme de douleur. Leur état peut s'améliorer de 75%, mais la majorité d'entre eux ne s'améliorera pas à 100% », explique la Dre Jill Osborn, anesthésiste et médecin directrice du programme d'intervention et de douleur chronique et codirectrice du programme de neuromodulation à l'hôpital St. Paul à Vancouver.Les patients ont accès à un certain nombre de ressources éducatives sur la douleur à travers le Canada. Il s'agit notamment du portail Surmonter la douleur, qui propose des ressources sur l'activité physique, la santé mentale, la nutrition et d'autres aspects de la gestion de la douleur. Pain B.C. propose de nombreuses ressources, dont un balado. Certaines régions proposent des cours sur la gestion de la douleur, comme dans la région de Waterloo, en Ontario.La Dre Osborn conseille aux patients de s'impliquer activement dans la gestion de la douleur et de réduire le risque d'épisodes futurs de sciatique.Traitement pharmaceutiqueLa prise en charge pharmaceutique initiale de la sciatique peut inclure des anti-inflammatoires ou des médicaments neuropathiques tels que la gabapentine ou la duloxétine, note la Dre Osborn.La déclaration du consensus de 2014 de la Société canadienne de la douleur sur la prise en charge pharmaceutique des troubles neuropathiques chroniques fournit une approche étape par étape de la prise en charge pharmaceutique. Le Médecin de famille canadien a également publié une revue des lignes directrices pour les soins primaires en 2017.Informez les patients que le médicament n'agit pas immédiatement et que cela peut prendre quelques semaines, indique la Dre Osborn. «Il faut un peu de temps pour que les médicaments agissent. Tout le monde veut que tout fonctionne immédiatement.»Bien que les opioïdes soient considérés comme un traitement de deuxième intention, ils peuvent être nécessaires dans certains cas de douleur sciatique aiguë, convient-elle.Interventions avancéesSi la prise en charge conservatrice dans le cadre des soins primaires n'apporte pas de soulagement, envisagez de référer le patient à une clinique spécialisée dans le traitement de la douleur. Là, les interventions peuvent inclure des injections de stéroïdes guidées par fluoroscopie ou échographie. Pour les douleurs radiculaires, le spécialiste peut opter pour des blocs nerveux épiduraux avec des stéroïdes.L'objectif des injections est de traiter la douleur afin que le patient puisse travailler sur d'autres aspects de la gestion de la douleur, tels que l'exercice physique et un sommeil adéquat.Les injections de stéroïdes doivent toutefois être limitées afin de ne pas aggraver la dégradation des articulations. La clinique de la Dre Osborn ne procède généralement pas à plus de trois injections par an dans une même zone. «Il n'y a pas vraiment de recherche sur le nombre d'injections à ne pas dépasser», précise-t-elle.À lire aussi: Douleurs chroniques: de nouveaux traitements offrent un espoir bien nécessaireIl faut s'attendre à des variations dans l'efficacité des injections. «Le soulagement de la douleur varie vraiment d'un patient à l'autre», explique la Dre Osborn. «S'ils obtiennent un soulagement de la douleur pendant trois à six mois, je m'en tiens à ce niveau.» Si les patients n'obtiennent qu'un soulagement de deux semaines, une autre intervention est nécessaire.Si les patients ont une imagerie qui correspond à leurs symptômes, les spécialistes de la douleur peuvent proposer une ablation par radiofréquence ou une neurostimulation.«Ce qui est intéressant avec l'imagerie de la colonne vertébrale, c'est qu'elle ne reflète pas nécessairement la symptomatologie», remarque la Dre Osborn. «On peut observer le dos de certaines personnes, qui a l'air horrible, et le patient n'a pas de douleur. D'autres ont beaucoup de douleur et leur colonne vertébrale n'indique aucunement qu'il y a eu une compression du nerf». C'est pourquoi l'examen physique est extrêmement important.L'ablation par radiofréquence consiste à appliquer une sonde chauffée sur le ganglion de la racine dorsale, où se trouvent les cellules nerveuses sensorielles, décrit le Dr Cook. Elle étouffe le nerf sciatique sans le blesser, dans l'espoir que les patients en tirent un bénéfice plus durable.La neurostimulation, qui consiste à implanter des électrodes dans la colonne vertébrale, est une autre option, mais elle est coûteuse et n'est pas encore souvent utilisée au Canada. La Dre Osborn a noté que les analyses coûts-avantages suggèrent que le coût de l'intervention, en fonction du dispositif utilisé, est récupéré par d'autres économies en trois à dix ans.ChirurgieCertaines provinces ou régions sociosanitaires du Canada disposent de cliniques d'évaluation pour déterminer si les patients sont candidats à une intervention chirurgicale. C'est le cas des cliniques Rapid Access Clinics for Low Back Pain en Ontario.En général, d'autres interventions sont utilisées avant la chirurgie. Si une intervention chirurgicale est indiquée, le moment choisi pour effectuer cette intervention est déterminant pour les résultats.À lire aussi: Douleur chronique: peu de preuves de l'efficacité des antidépresseurs«Dans la grande majorité des cas, les personnes dont les symptômes durent depuis plus de trois mois et ne se sont pas améliorés d'eux-mêmes sont les mieux placées pour être examinées et évaluées par un chirurgien, mais avant 12 mois, puisque les résultats ne sont pas aussi bons s'il s'agit d'une compression chronique», affirme le Dr Larouche. Il suggère donc de s'assurer que le patient dispose d'une imagerie et d'une évaluation neurologique avant de l'adresser à un chirurgien.Dans 90% des cas, le traitement chirurgical de la sciatique consiste en une microdiscectomie. «Nous pratiquons une petite incision, nous enlevons un peu d'os pour atteindre le disque, nous dégageons le nerf et nous enlevons le fragment du disque qui a fait hernie», explique le Dr Larouche.Les centres européens et autres explorent la microdiscectomie endoscopique comme alternative à la microdiscectomie ouverte. Cela implique un petit outil de rasage que les chirurgiens utilisent à même l’hernie discale. Un essai contrôlé randomisé publié dans le British Medical Journal en 2022 a montré que la procédure endoscopique n'était pas inférieure à la microdiscectomie ouverte pour la sciatique en ce qui concerne les résultats rapportés par le patient et d'autres résultats.

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