VPH: l’immunité collective quasiment atteinte chez les jeunes Québécois

Le programme de vaccination contre le virus du papillome humain (VPH), implanté en 2008 au Québec, a mené à une immunité de groupe selon une étude réalisée à l’Université Laval.Ciblant d’abord les filles de 9 à 17 ans, le programme a ensuite été étendu aux garçons. Couvrant les quatre types du virus les plus risqués, le Québec a été la première province à se doter d’un calendrier mixte (nonavalent et bivalent) pour les filles et les garçons de 9 à 17 ans, en 2018. Le Comité consultatif national de l’immunisation (CCNI) recommande depuis l’été 2024 une seule dose de vaccin contre le virus du papillome humain (VPH) pour les enfants et les jeunes âgés de 9 à 20 ans. Il maintient toutefois sa recommandation de deux doses pour les personnes âgées de 21 à 26 ans. L’équipe de chercheurs de l’Université Laval a voulu évaluer l’efficacité de ces calendriers de vaccination. Au lieu de comparer la prévalence du virus chez les personnes vaccinées et non vaccinées, comme c’est l’usage, l’équipe a privilégié une autre approche, explique la Pre Sauvageau, chercheuse au Centre de recherche du CHU de Québec – Université Laval et médecin-conseil à l'Institut national de santé publique du Québec.À lire aussi: Le vaccin contre les VPH gratuit temporairement pour les 21 à 45 ans«Dans le cas du VPH, l'efficacité du vaccin combinée à la forte couverture vaccinale pour ceux qui ont reçu une dose ou plus – on parle de 90% des filles et de 86% des garçons lorsque mesuré à l'âge de 15 ans – suggérait qu'il était possible qu'une immunité de groupe se soit installée. C'est ce que nous avons voulu vérifier.»Un effet immunitaire conféré par la vaccination des fillesSous la direction de la Pre Sauvageau, l’équipe a donc recruté 546 participants âgés de 16 à 20 ans sexuellement actifs et non vaccinés partout au Québec entre 2020 et 2022. «La couverture vaccinale précise chez les hommes de 16 à 20 ans en 2020-2022 est inconnue, mais a été estimée comme étant très faible, puisque cette cohorte n'était pas admissible au programme public de vaccination», précisent les chercheurs. Au total, 369 participants ont été sélectionnés après avoir terminé toutes les procédures de l’étude – remplir un questionnaire en ligne et fournir un auto-prélèvement pénien pour la détection et le génotypage du VPH. Leur statut vaccinal a été vérifié grâce au Registre de vaccination du Québec. À lire aussi: VPH: pourquoi passer d’une campagne à deux vaccins à seulement un?La prévalence globale du VPH était de 18,4% (intervalle de confiance [IC] à 95%, 14,6%–22,8%), mais la prévalence des quatre types du VPH couverts par les premiers vaccins utilisés au Québec était de 0,5% [IC à 95%, 0,1%–1,9%] – seuls deux participants étaient porteurs d'un génotype quadrivalent (4vHPV) ciblé, tous deux ayant déclaré avoir eu des rapports sexuels avec des hommes. La prévalence combinée des neuf génotypes ciblés par le vaccin contre le VPH était de 5%.En comparaison, une étude québécoise menée auprès de 263 jeunes couples de 18 à 24 avant l'implantation du programme de vaccination avait révélé la prévalence d’au moins un génotype du VPH chez 56% des partenaires masculins. Le VPH de type 16 était le plus courant, détecté chez 16% des hommes1-2.«L'explication la plus probable de la faible prévalence du génotype ciblant le 4vHPV observée dans notre étude (0,5%) découle de l'effet d'immunité collective conféré par la vaccination contre le VPH des filles du même âge que les sujets masculins inclus dans cette étude, via le programme de vaccination en milieu scolaire mis en œuvre depuis 2008», soulignent les auteurs de l’étude transversale3 publiée dans la revue Journal of Infectious Diseases. En 2019, soit juste avant le début de l'étude, toutes les résidentes du Québec âgées de 28 ans ou plus étaient admissibles à la vaccination gratuite contre le VPH et 90% avaient reçu au moins une dose avant l'âge de 15 ans.Par ailleurs, la prévalence plus élevée observée pour les génotypes ciblés par le vaccin 9vHPV (4,9% [IC à 95%, 2,9%–7,6%]) n'est selon eux pas surprenante, puisque les filles ont été vaccinées avec le vaccin 4vHPV jusqu'en 2016 (vaccin 9vHPV par la suite). Revoir les mesures d’efficacité des vaccins«L'évaluation des changements de calendrier, y compris le récent passage à une dose unique de vaccin contre le VPH 9v pour tous les jeunes de 9 à 20 ans au Québec, devra tenir compte de ce résultat», concluent les auteurs. En effet, cette immunité de groupe implique que les autorités de santé publique doivent trouver une autre façon de suivre l’évolution de l’efficacité du programme de dépistage. À lire aussi: Hausse des cas de cancer du col de l'utérus, car ils sont détectés trop tardDans un communiqué de l’Université Laval, la Pre Sauvageau propose d’utiliser un test de détection des VPH, qui remplacera progressivement le test Pap d'ici 2026 pour le dépistage du cancer du col de l’utérus au Québec. «Si l'efficacité du vaccin devait diminuer, il serait possible de corriger le tir en réintroduisant une deuxième dose du vaccin.»Parmi les limites de cette étude, les chercheurs indiquent que la majorité (64,5%) des participants résidaient dans la grande région de Québec, qui a une couverture vaccinale (CV) parmi les plus élevées de la province; les participants résidant dans le Grand Montréal, dont la CV est plus faible, représentaient une proportion plus faible de l’échantillon. «Cela pourrait avoir entraîné une sous-estimation de la prévalence de la vaccination contre le VPH 4v au sein de la population étudiée si l'effet de groupe est plus faible dans les zones où la CV est plus faible.» Toutefois, la CV comprenant au moins une dose dépasse 80% dans toutes les régions du Québec chez les filles de 15 ans. Références:Burchell AN, Tellier PP, Hanley J, Coutlée F, Franco EL. Influence of partner's infection status on prevalent human papillomavirus among persons with a new sex partner. Sex Transm Dis. 2010 Jan;37(1):34-40. doi: 10.1097/OLQ.0b013e3181b35693. PMID: 19704391; PMCID: PMC8311542.Burchell AN, Tellier PP, Hanley J, Coutlée F, Franco EL. Human papillomavirus infections among couples in new sexual relationships. Epidemiology. 2010 Jan;21(1):31-7. doi: 10.1097/EDE.0b013e3181c1e70b. PMID: 19907332; PMCID: PMC8313299.Catherine Wolfe, Iulia Gabriela Ionescu, Marie-Hélène Mayrand, François Coutlée, Chantal Sauvageau, Prevalence of Human Papillomavirus Genotypes in Unvaccinated 16- to 20-Year-Old Men in Quebec, Canada, The Journ of Infect Dis, 2025;, jiaf094, https://doi.org/10.1093/infdis/jiaf094

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