Un urgentologue radié pour des consultations illicites du DSQ

Le Conseil de discipline du Collège des médecins du Québec (CMQ) est catégorique. En consultant à plusieurs reprises le dossier DSQ d’une ex-conjointe, le Dr Marc-Antoine Pigeon a posé «un acte dérogatoire à l’honneur et à la dignité de la profession». L’urgentologue, qui pratique à l’Hôpital Charles-Le Moyne à Longueuil, a utilisé un accès réservé à des fins strictement personnelles. Ses pairs parlent d’une faute «objectivement grave».Pour ces intrusions injustifiées, le Conseil lui impose une radiation de deux mois. Une sanction qu’il juge «juste et appropriée» pour protéger le public et envoyer un signal clair aux médecins quant à l’usage du DSQ.Les accès illicites remontent au 25 mars 2023, au 20 juillet 2023 et au 23 mars 2024. Au cours de l’enquête disciplinaire, le Dr Pigeon a d’emblée reconnu les faits. Il explique avoir consulté le dossier DSQ de cette femme pour «atténuer [ses] blessures personnelles et [son] désarroi» après une rupture difficile. Un comportement qu’il qualifie lui-même d’«injustifiable» et «sans fondement rationnel». Depuis, il a entrepris une psychothérapie. Le Conseil note aussi qu’il n’a aucun antécédent disciplinaire.Un privilège d’accès strictement professionnelPour le Conseil, la faute est «intrinsèquement sérieuse». Le DSQ contient des renseignements de santé sensibles et son accès est réservé à un usage strictement clinique. La femme concernée «était en droit de s’attendre à ce que le médecin assure la confidentialité de son dossier», rappellent les juges, en soulignant l’importance du droit à la vie privée, du secret professionnel et de l’obligation de protéger les informations de santé.Le problème dépasse le cadre d’une relation rompue. En utilisant ses codes pour consulter le DSQ à des fins personnelles et à plusieurs reprises, le médecin porte atteinte à un pilier de la relation de soins. Ces consultations illégitimes «sont susceptibles de compromettre la confiance du public», écrit le Conseil. Même si aucune information n’a été divulguée, le simple fait d’accéder au DSQ pour des raisons étrangères à la pratique clinique fragilise la confiance essentielle entre médecins et patients.À lire aussi: Un jeune médecin de famille radié trois fois trois moisLe Conseil retient plusieurs éléments aggravants. Les gestes sont répétés. Ils sont posés sciemment, pour gérer un désarroi personnel, en détournant un privilège lié au statut de médecin. À l’inverse, la reconnaissance rapide des faits, la démarche en psychothérapie, l’absence d’antécédents et les «regrets sincères» exprimés à la femme concernée jouent en faveur de l’urgentologue.Pourquoi deux mois de radiation?Le syndic adjoint plaidait pour une approche de tolérance zéro en matière d’accès illicite au DSQ, avec des radiations de trois mois comme point de repère. Le Conseil rejette une logique qui mènerait à la même sanction d’un cas à l’autre. «Il ne peut y avoir d’automatisme», rappelle-t-il, en insistant sur la nécessité d’individualiser la sanction. Dans ce dossier, trois mois auraient été disproportionnés. Un seul mois aurait été «trop clément» au regard de la gravité des intrusions et des attentes élevées envers les médecins. Deux mois permettent, selon le Conseil, de maintenir un effet réellement dissuasif et exemplaire.Par cette décision, le Conseil veut rappeler qu’un accès au DSQ ne peut jamais servir à calmer un désarroi affectif ou à gérer une rupture. «Ce type de comportement ne peut être toléré dans la profession médicale», écrivent les juges. La protection de la confidentialité des renseignements de santé demeure, à leurs yeux, l’un des piliers les plus fondamentaux de l’exercice médical.Selon le Collège, la radiation temporaire du Dr Pigeon sera effective à compter du 9 décembre 2025, et ce, si aucune demande en appel n’est déposée avant le délai imparti.

Un urgentologue radié pour des consultations illicites du DSQ

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