Un équilibre subtil (première partie)

Charles et Diana. Sonny et Cher. Selena et Bieber. Ross et Rachel. Henry VIII et…Parfois, les gens changent. Parfois, les gens prennent de mauvaises décisions. Parfois, les gens agissent mal. Et si vous exercez suffisamment longtemps et avec suffisamment de personnes, vous finirez par rencontrer des patients avec qui poursuivre une relation pourrait s'avérer préjudiciable pour vous, pour eux ou pour les deux.Voici quelques raisons:Comportement abusifYannick a été un de mes premiers patients; il était nouveau au Canada et j'étais nouveau dans la pratique. Nous avons évolué ensemble, chacun s'adaptant à sa manière. J'ai fait ce que j'ai pu, qu'il s'agisse de faire baisser sa tension artérielle ou de l'aider à se frayer un chemin dans les méandres du logement. Il était aimable, terminant chaque consultation par un merci et un sourire édenté. Un vendredi après-midi, alors que je n'étais pas au bureau, il est passé et a demandé à me voir. Ma secrétaire médicale a gentiment proposé de lui donner un rendez-vous la semaine suivante. Il a hurlé «Va te faire foutre!» et lui a craché dessus, atteignant la vitre en plexiglas de l'ère COVID. Il a ensuite quitté le bureau d'un pas lourd, laissant ma secrétaire en larmes.La plupart des cliniques appliquent une politique de tolérance zéro à l'égard de l'agression et de la violence, à juste titre. L'hostilité et les abus envers nous et notre personnel ont grimpé en flèche durant la pandémie, sous forme d'insultes, de menaces ou d'agressions. Ou pire encore. Nous devons assurer notre sécurité physique et psychologique, ainsi que celle des personnes avec lesquelles nous travaillons.Non-observanceAnne a développé un diabète pendant sa trentaine et nous avons établi ensemble un plan de traitement clair. Malgré de nombreuses séances d'éducation et des rappels, elle a souvent tardé à faire ses analyses sanguines de contrôle. Elle a manqué des consultations chez l'ophtalmologiste. Après une longue discussion sur l'augmentation de son taux d'HbA1c, elle a accepté d'essayer un nouveau médicament pour lequel j'ai dû remplir une longue demande (sans être payé) auprès de sa compagnie d'assurance. Nous avons reçu l'autorisation. Pourtant, elle n'a jamais pris le médicament. Elle m'a dit plus tard: «J'ai juste changé d'avis». Si certains affirment que les besoins des patients passent toujours en premier, j'adopte un point de vue plus utilitaire: chaque rencontre est précieuse et nous ne disposons que d'un temps limité et d'un nombre restreint de plages de rendez-vous. Si un patient n'est pas disposé à suivre un plan de soins convenu, il prend du temps à des patients qui sont plus actifs dans leurs propres soins et qui sont plus disposés à suivre nos plans de traitements. Si un patient refuse systématiquement de suivre les conseils ou le traitement recommandé, il est préférable de passer à autre chose. Cela permet à d'autres personnes de nous consulter, et cela peut également motiver ces anciens patients à voir un autre médecin avec lequel ils auront une meilleure relation.À lire aussi: Ces choses stupides nous épuisent: une leçon pour apprendre à dire «non»Des absences répétéesTim, un célibataire d'âge moyen, s'est présenté à l'heure à notre première visite d'accueil. Par la suite, il n'a été ponctuel que lorsqu'il avait besoin de remplir un formulaire. Malgré des confirmations répétées, il lui arrivait parfois de ne pas venir du tout. Alors que la plupart des patients nous préviennent lorsqu'un autobus est en retard ou que leur enfant est malade, certains ne font jamais preuve de cette courtoisie. Cette semaine, un autre patient a justifié son retard en me disant: «Les médecins ont la réputation d'être en retard, alors j'ai pensé qu'il n'y avait pas de problème à venir n'importe quand.» Soupir. Le fait de manquer régulièrement un rendez-vous sans raison valable perturbe les soins, tant pour la personne qui fait l'école buissonnière que pour les autres. Étant donné que moins de la moitié des patients déclarent pouvoir consulter leur médecin le jour même en cas de besoin, chaque rendez-vous manqué signifie qu'au moins une autre personne ne reçoit pas de soins. En outre, il est déjà assez difficile de gérer efficacement nos emplois du temps en raison de la complexité croissante des patients et de la diminution du soutien. Il est impossible de rester à jour lorsque l'on attend des patients qui sont régulièrement en retard, si tant est qu'ils se présentent.Préoccupations juridiques ou éthiquesKen était un homme jovial avec une barbe poivre et sel d'avant l'ère des hipsters. Il est venu me voir après avoir pris de l'oxycodone à action prolongée pendant de nombreuses années. Bien qu'il ait signé un accord de traitement aux opioïdes, il avait toujours des excuses pour ne pas terminer sa surveillance – le laboratoire était fermé, un ami avait besoin d'aide ou quelque chose se présentait à la dernière minute. Peu après, il s'est retrouvé aux urgences. L'analyse toxicologique s'est révélée positive à la cocaïne et négative aux opioïdes.Des activités potentiellement illégales comme le détournement de médicaments ou des demandes de traitements éthiquement discutables sont des motifs pour mettre fin à la relation patient-médecin.Bris de confiance ou de communicationJanice est une patiente de longue date qui était convaincue qu'elle souffrait d'un trouble neurologique après avoir vu une vidéo sur YouTube. Bien que je lui aie expliqué les symptômes et les recherches menées sur le sujet, elle s'est indignée que je ne lui prescrive pas une IRM du corps entier «juste pour voir ce qui se passe avec mon cerveau et mon corps», et que je ne l'oriente pas vers un neurologue. Quelques semaines plus tard, j'ai reçu une lettre de plainte du collège. Bien qu'on tolère souvent les «excentricités» de nos patients et qu'on comprend qu'ils nous voient souvent au moment où ils sont le plus vulnérables, il est difficile de poursuivre une relation après que la confiance se soit effritée.Bien qu'il s'agisse d'exemples anonymes, il arrive que l'on ne se sente pas à l'aise en soignant quelqu'un. En fin de compte, nous devons écouter notre cœur. Si le fait de voir le nom d'un patient particulier sur votre feuille de journée vous fait paniquer ou vous effraie, il est probablement préférable pour le médecin et le patient de passer à autre chose.Dans le prochain billet, nous verrons comment mettre fin à une relation médecin-patient.

Un équilibre subtil (première partie)

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