Trump veut retirer les États-Unis de l’OMS: voici ce qui pourrait se passer

Dès son retour à la Maison-Blanche le lundi 20 janvier, le 47e président américain Donald Trump a utilisé l'une des nombreuses mesures exécutives pour entamer le processus de retrait des États-Unis de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la deuxième fois en moins de cinq ans, une décision qui fait craindre à de nombreux scientifiques qu'elle ne réduise à néant les progrès réalisés au cours des décennies dans la lutte contre des maladies comme le sida, le paludisme et la tuberculose.Les experts ont également mis en garde contre le fait que le retrait de l'OMS pourrait affaiblir les défenses du monde contre de nouvelles épidémies susceptibles de déclencher des pandémies.Voici un aperçu des conséquences de la décision de Donald Trump:Que s'est-il passé?Lors de sa première apparition dans le bureau ovale pour son second mandat, Donald Trump a donc signé un décret détaillant les modalités du processus de retrait.Lorsqu'on lui a tendu le document à signer, le nouveau président américain s’est exclamé: «Oh! C'est un gros morceau!»Ce décret prévoit de suspendre le transfert de fonds du gouvernement américain à l'organisation, de rappeler et de réaffecter le personnel fédéral et les sous-traitants travaillant avec l'OMS et d'inviter les responsables à «identifier des partenaires américains et internationaux crédibles et transparents pour prendre en charge les activités nécessaires précédemment entreprises par» l'OMS.À lire aussi: Une meilleure utilisation des vaccins combattrait l'antibiorésistance, rappelle l'OMSCe n'est pas la première fois que Trump tente de rompre les liens avec l'OMS. En juillet 2020, quelques mois après que l’Organisation ait annoncé que la COVID-19 était une pandémie et alors que les cas se multipliaient dans le monde, l'administration de Donald Trump avait officiellement notifié au secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, que les États-Unis prévoyaient de se retirer de l'OMS et de suspendre le financement de l'agence.Dès le premier jour de son mandat en janvier 2021, le président Joe Biden avait annulé la décision de son prédécesseur, avant que Donald Trump ne la relance à son retour à la Maison-Blanche.À lire aussi: L'OMS renforce les réglementations sanitaires pour mieux se préparer aux pandémiesQu'est-ce que l'OMS et est-ce vraiment important?L'OMS est l'agence spécialisée des Nations unies pour la santé publique. Elle a pour mission de coordonner la réponse internationale aux menaces sanitaires globales, notamment les épidémies de variole, d'Ebola et de poliomyélite. Elle fournit également une assistance technique aux pays les plus pauvres, aide à distribuer des vaccins, des fournitures et des traitements rares et établit des lignes directrices pour des centaines de problèmes de santé, notamment la santé mentale et le cancer.«Un retrait des États-Unis de l'OMS rendrait le monde beaucoup moins sain et moins sûr», estime Lawrence Gostin, directeur du Centre de collaboration de l'OMS sur le droit de la santé mondiale à l'université de Georgetown. Selon lui, la perte des ressources américaines aurait un effet dévastateur sur les efforts de l'OMS en matière de surveillance mondiale et de lutte contre les épidémies.Selon l'ancienne première ministre néo-zélandaise, Helen Clark, il n’est pas dans l’intérêt des États-Unis de se retirer de l’agence maintenant, en particulier compte tenu de l’«éventualité effroyable» que la propagation accrue de la grippe aviaire dans ce pays se transforme en pandémie.Cette dernière qualifie Donald Trump de «perturbateur» et assure que la perte du financement américain serait «un coup dur considérable» pour l'agence.Trump peut-il vraiment retirer les États-Unis de l'OMS?Oui, à condition qu'il obtienne l'approbation du Congrès et que les États-Unis remplissent leurs obligations financières envers l'OMS pour l'année fiscale en cours. Les États-Unis ont rejoint l'OMS par le biais d'une résolution conjointe de 1948 adoptée par les deux chambres du Congrès, qui a ensuite été soutenue par toutes les administrations. Cette résolution prévoit que les États-Unis doivent donner un préavis d'un an s'ils décident de quitter l'OMS.Qu'est-ce que cela signifie pour l'OMS?C'est une très mauvaise nouvelle. Les États-Unis ont toujours été l'un des principaux donateurs de l'OMS, fournissant à l'agence sanitaire des Nations unies non seulement des centaines de millions de dollars, mais aussi des centaines d'employés spécialisés dans la santé publique.Au cours de la dernière décennie, les États-Unis ont versé à l'OMS entre 160 et 815 millions$ par an. Le budget annuel de l'OMS est de l'ordre de 2 à 3 milliards$. La perte du financement américain pourrait paralyser de nombreuses initiatives mondiales en matière de santé, notamment l'effort d'éradication de la polio, les programmes de santé maternelle et infantile et la recherche visant à identifier de nouvelles menaces virales.Les agences américaines qui travaillent avec l'OMS en pâtiraient également, notamment le Centers for Disease Control and Prevention (Centres pour le contrôle et la prévention des maladies, la principale agence fédérale des États-Unis en matière de protection de la santé publique, ndlr). Quitter l'OMS exclurait les États-Unis des initiatives coordonnées par l’organisation, comme le fait d’établir chaque année la composition des vaccins contre la grippe et l'accès rapide aux bases de données génétiques gérées par l'OMS, ce qui pourrait bloquer les tentatives de production de vaccins et de médicaments.Pourquoi Trump retire-t-il les États-Unis de l'OMS?Lors d'un rallye de campagne en septembre, Donald Trump a affirmé qu'il s'attaquerait à la corruption au sein de l'OMS et dans d'autres institutions de santé publique qui, selon lui, sont «dominées» par le pouvoir des entreprises et la Chine.Le décret exécutif signé lundi indique que les États-Unis se retirent de l'OMS «en raison de la mauvaise gestion par l'organisation de la pandémie de COVID-19 qui s'est déclarée à Wuhan, en Chine, et d'autres crises sanitaires mondiales» et cite «l'incapacité de l'agence à adopter les réformes urgentes nécessaires» et son «incapacité à faire preuve d'indépendance par rapport à l'influence politique inappropriée des États membres de l'OMS».À lire aussi: Cinq choses à savoir sur la pandémie de COVID-19 qui a maintenant cinq ansL'OMS a commis plusieurs erreurs coûteuses au cours de la pandémie, notamment en déconseillant le port de masques et en affirmant que la COVID-19 n'était pas transmissible par l'air – ce que l’agence n’a reconnu officiellement que l’année dernière.Au cours de ses efforts pour arrêter la COVID-19, l'OMS a également dû faire face au plus grand scandale d'abus sexuels de son histoire, lorsque les médias ont révélé que des dizaines de femmes congolaises avaient été harcelées ou agressées sexuellement par des agents de santé chargés de contenir le virus Ebola. L'Associated Press a découvert que les hauts responsables avaient été informés de certains cas d'abus sexuels lorsqu'ils se sont produits en 2019, mais qu'ils n'avaient pas fait grand-chose pour y mettre fin ou pour punir les auteurs.Que dit l'OMS?Dans un communiqué publié mardi, l'OMS déclare qu'elle «regrette» l'annonce de Donald Trump.«Nous espérons que les États-Unis reviendront sur leur décision et nous sommes impatients d'engager un dialogue constructif pour maintenir le partenariat entre les États-Unis et l'OMS», écrit l'organisation.«Depuis plus de sept décennies, l'OMS et les États-Unis ont sauvé d'innombrables vies et protégé les Américains et tous les peuples des menaces sanitaires. Ensemble, nous avons mis fin à la variole et ensemble, nous avons amené la poliomyélite au bord de l'éradication», ajoute l’agence dans son communiqué.Lors d'une conférence de presse tenue à Genève mardi, le porte-parole de l'OMS, Tarik Jasarevic, a indiqué que les États-Unis avaient contribué à hauteur de 18% au budget de l'OMS en 2023, ce qui en fait le plus grand donateur cette année-là. Il a toutefois refusé d’expliciter les conséquences du retrait des États-Unis pour l'OMS.___Le reportage de Maria Cheng a été réalisé à Toronto. Geir Moulson à Berlin et Jamey Keaten à Davos, en Suisse, ont contribué à ce rapport.Le département Santé et Sciences de l'Associated Press bénéficie du soutien du Howard Hughes Medical Institute's Science and Educational Media Group et de la Robert Wood Johnson Foundation. L'AP est seul responsable de l'ensemble du contenu.

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