Santé Québec: les gestionnaires du réseau veulent pleinement jouer leur rôle dans sa transformation

Ils sont chefs d’unité en soins infirmiers, conseillers cadres à l’amélioration continue, chefs de service en transformation numérique, coordonnateurs à l’approvisionnement ou encore chefs du service d’imagerie médicale, et ils sont sur le qui-vive. «Ils», ce sont les 9000 gestionnaires du réseau de la santé et des services sociaux qui relèvent désormais de Santé Québec, depuis son entrée officielle en fonction le 1er décembre. Dans l’ensemble, ils accueillent favorablement la création de la nouvelle société d’État, indique la PDG de l’Association des gestionnaires des établissements de santé et de services sociaux (AGESSS), Danielle Girard. «Avoir un employeur unique qui a la responsabilité stratégique et opérationnelle du réseau, c’est mieux qu’être dirigé par le pouvoir politique, considère-t-elle. Cependant, ça reste un changement énorme. On va laisser la chance au coureur, mais on attend de voir comment les choses vont se concrétiser.»Chats échaudés craignant l’eau froide — certains membres de l’AGESSS en sont à leur troisième rebrassage de structures —, les gestionnaires sont naturellement inquiets. Ils veulent avant tout être consultés pour savoir ce qui s’en vient dans leur quotidien, car ils s’estiment les mieux placés pour identifier les besoins des usagers et adapter les pratiques en fonction des spécificités de chaque région. Pour l’instant, l’a priori est plutôt positif. «On a été consulté en amont par Santé Québec et par le MSSS [ministère de la Santé et des Services sociaux», signale Danielle Girard qui a participé à un chantier sur la gestion de proximité organisé par le comité de transition de la société d’État. Elle a aussi eu «des premières rencontres» avec sa présidente et cheffe de la direction, Geneviève Biron. «On a confiance d’être consultés, mais il faut que ça se concrétise et que ça s’inscrive dans la durée, sachant que ça prend les moyens et les ressources nécessaires», souligne la PDG de l’AGESSS. «De notre côté, les portes sont grandes ouvertes», insiste-t-elle.L’autre inquiétude des gestionnaires concerne le souhait de Santé Québec de réduire les coûts dans le réseau de la santé et des services sociaux. «Des coupes d’un milliard et demi de dollars, c’est énorme et c’est préoccupant. Nos membres sont habitués à en faire plus avec moins, mais il n’y a pas de magie non plus», observe Danielle Girard. Elle craint tout particulièrement un gel du soutien administratif qui viendrait alourdir la tâche des gestionnaires, dont le taux d’encadrement est déjà très élevé. «Plusieurs ont une centaine de personnes sous leur responsabilité. Sans soutien, ils ne pourront pas mettre en place les améliorations prévues», prévient-elle.Les gestionnaires ne sont pas de variables d’ajustementCela dit, la PDG de l’AGESSS nourrit l’espoir que les coupes budgétaires ne viseront pas des postes de gestionnaires. «On a vu par le passé que cela ne donnait pas les résultats escomptés. Je crois et j’ose espérer qu’ils ont appris de leurs erreurs et qu’on n’en arrivera pas là», déclare-t-elle. Cette dernière ajoute que Santé Québec doit considérer les gestionnaires «non comme une simple variable d’ajustement, mais comme des acteurs de premier plan, essentiels à la transformation du réseau». Si la société d’État en est encore à ses balbutiements, «on voit qu’ils veulent faire bouger les choses, mais pour prendre un tel virage, il faut établir qui fait quoi et clarifier les rôles et responsabilités», signale Danielle Girard. Elle constate notamment que dans le projet de loi 15, «le ministre de la Santé s’est gardé un certain pouvoir d’intervention», alors que selon elle, «Santé Québec a besoin d’autonomie». Lire aussi: Si vous étiez PDG de Santé QuébecAu-delà, elle considère que cette clarification doit aussi se faire au sein des établissements, à tous les paliers, avec le souci d’alléger les structures et les contraintes qui pèsent sur les épaules des gestionnaires. «Les structures locales, régionales et provinciales sont très lourdes et très complexes à naviguer. Si par exemple un gestionnaire en lien avec le comité des usagers d’un CHSLD veut changer quelque chose localement, ça lui prend un temps fou d’aller chercher les autorisations», illustre la PDG de l’AGESSS qui plaide pour que ses membres aient plus d’autonomie. «On doit leur donner les coudées franches pour qu’ils puissent apporter des solutions de terrain adaptées aux réalités locales.» Selon elle, c’est ainsi que Santé Québec deviendra un employeur de choix. «Elle doit être capable de mobiliser les gestionnaires, et de les garder, en leur offrant un travail passionnant, dans un environnement sain, qui leur permettra de répondre aux besoins de la clientèle.»

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