Santé mentale: Quand franchir le cap des 18 ans fait perdre des services

Soixante quinze pour cent des jeunes suivis en centre jeunesse perdent leurs services en santé mentale à 18 ans. L'Association des médecins psychiatres du Québec (AMPQ) s’en inquiète. «Ces jeunes ont cruellement besoin d'un encadrement et d'un milieu de vie sécurisé. Cette situation déplorable crée non seulement un engorgement dans les urgences psychiatriques, mais devient dans plusieurs cas un aller simple vers l'itinérance ou les prisons», dénonce le Dr Olivier Farmer, psychiatre au CHUM et administrateur à l'Association.Quelques programmes existent bien ici et là, pour soutenir les patients et leur famille, de l'enfance à l'âge de 18 ans. Mais lorsque le jeune devient légalement adulte, il ne trouve aucune équivalence. L’Association illustre ses craintes par l’exemple du jeune schizophrène qui consomme de la marijuana et peut présenter un danger pour lui-même ou pour autrui. Or, dit-elle, il risque de perdre son suivi psychiatrique et son encadrement en centre jeunesse dès qu'il atteint ses 18 ans, parce que les ressources nécessaires sont carrément inexistantes.Difficile pour les adultes aussiInexistantes aussi, les solutions d'hébergement diversifiées et adaptées aux besoins réels des jeunes adultes. Par exemple, il peut être difficile, voire impossible, de trouver un endroit structuré et structurant pour un jeune de 19 ans ayant des problèmes de comportement. Cette situation ne vaut pas que pour les jeunes d’ailleurs, mais aussi pour les adultes présentant des problèmes de santé mentale plus graves.Les propriétaires de résidences imposent en effet des critères quant au profil des résidents, ce qui a pour conséquence de les exclure. «On ne peut plus tolérer que le développement de nouvelles ressources d'hébergement se fasse selon les goûts et les préférences des établissements gestionnaires, sans égard aux besoins réels, et surtout sans imputabilité sur les conséquences de ces décisions sur le réseau», précise la présidente de l'AMPQ, la Dre Karine Igartua.Ressources intermédiairesL'Association demande au gouvernement que soient mises en place des ressources intermédiaires plus structurées, de type familial, répondant aux besoins réels des clientèles souffrant de troubles plus sévères. Faute de quoi, selon elle, les problèmes d'hébergement risquent de mener à une deuxième vague de désinstitutionnalisation.Les difficultés d'hébergement engendrent un effet domino, dont les conséquences sont intenables, tant pour les patients que pour leurs familles, explique l’AMPQ. Ainsi, 30 % des lits en psychiatrie sont occupés par des patients incapables d’accéder à un hébergement répondant à leurs besoins. «Si le gouvernement n'investit pas dans des solutions adaptées, ces patients continueront à se retrouver à la rue, en prison ou encore sur un lit d'hôpital, alors que c'est d'un milieu de vie tout autre dont ils ont besoin. Pendant ce temps, d'autres patients qui ont besoin d'une hospitalisation sont forcés d'attendre sur des civières, dans les corridors des urgences», conclut la Dre Igartua.

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