Santé féminine: mythes, réalités et enjeux méconnus

Ouvrir le dialogue sur la santé féminine dans le but d’informer les femmes pour qu’elles puissent prendre en main leur santé, en toute connaissance de cause. C’est la volonté de la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ), qui profite du 8 mars pour mettre ces sujets sur la table et sur Facebook. «Cela est encore plus pertinent dans le contexte actuel de pandémie, qui affecte la qualité de vie et le quotidien de nombreuses femmes au Québec», souligne le président de la FMSQ, le Dr Vincent Oliva. Mardi, la Fédération a ainsi réuni un panel paritaire regroupant la Dre Marie-Claude Roy, pédiatre au CHUS-Hôpital Fleurimont, le Dr Frédéric Bernier, endocrinologue au CHUS-Hôpital Fleurimont, la Dre Évelyne Vinet, rhumatologue au Centre universitaire de santé McGill, ainsi que le Dr Elio Dario Garcia, obstétricien gynécologue à l’hôpital de Gatineau. À tour de rôle, ils ont abordé divers sujets en lien avec la santé des femmes. La «maladie aux 1000 visages» Maladie auto-immune qui cause l’inflammation chronique de différentes parties du corps, notamment les articulations, la peau, le cerveau et les reins, le lupus touche une personne sur 2000 au Canada. Sa prévalence est 10 fois plus élevée chez les femmes de 15 à 45 ans que chez les hommes. Si le mécanisme du lupus est connu (il se caractérise par la production d’autoanticorps qui s’attaquent aux tissus ou à l’ADN des patients), sa cause est «encore imprécise», indique la Dre Évelyne Vinet. «Les recherches montrent qu’il aurait une origine génétique liée au chromosome X et qu’il procéderait aussi de facteurs hormonaux et environnementaux. Mais la séquence des événements qui concourent au développement de la maladie reste nébuleuse», signale la rhumatologue. Seule certitude, le lupus atteint les femmes au plus fort de leur féminité, avec des risques de complications et de difficultés obstétricales en cas de grossesse (pré-éclampsie, prématurité, etc.) Ses symptômes — maux de tête, douleurs articulaires, enflures, éruptions cutanées en forme de papillon sur le visage, sensibilité au soleil, grande fatigue — doivent donc être surveillés de près. Grossesse: des préoccupations naturelles Les futures mères le savent bien: leur alimentation et leur niveau de stress ont une influence sur le déroulement de leur grossesse et le développement du fœtus. Transmission des maladies génétiques, des allergies alimentaires, saisonnières ou perannuelles, impact des facteurs environnementaux, «les femmes sont aujourd’hui bombardées d’informations, parfois contradictoires, qui deviennent source d’inquiétudes», constate la Dre Marie-Claude Roy. «À un moment, c’est une question de lâcher prise et c’est notre rôle, en tant que médecin, de soulager la charge mentale des femmes enceintes en leur donnant l’info juste qui va les rassurer», ajoute la pédiatre en rappelant, si besoin, que la grossesse n’est pas une maladie. Lire aussi: Inventions pour la santé féminine: plus le fruit du travail des femmes que des hommes S’agissant de la conclusion de leur grossesse, le Dr Elio Dario Garcia observe que les femmes s’interrogent beaucoup sur le lieu de leur accouchement. En milieu médical, l’obstétricien signale qu’il est «300 fois plus sécuritaire d’accoucher qu’il y a 200 ans». Pour une naissance à la maison, les risques ne sont plus élevés qu’en cas de complications. «Il suffit de les connaître et de s’y préparer en tenant compte de la distance entre le domicile et l’hôpital le plus proche», souligne le médecin. Fertilité et fausses couches Force est de constater que «ce sont souvent les femmes qui portent le fardeau de la fertilité dans le couple», indique le Dr Frédéric Bernier. Cela tient beaucoup au fait que l’âge moyen des mères au moment de la première naissance (29,2 ans en 2016, selon Statistique Canada) augmente constamment depuis le milieu des années 1960; «et plus les femmes avancent en âge, plus leur fertilité baisse». Ceci dit, l’endocrinologue précise que 85% des couples parviennent à procréer au cours de la première année, ce taux montant à 95% au bout de deux ans. «Avant 35 ans, il est conseillé de consulter après un an d’essai. Passé 35 ans ou si la femme a des cycles menstruels irréguliers, il vaut mieux se faire aider rapidement», recommande le spécialiste. Lire aussi: Infertilité: des chercheurs du CHUM s'affairent à améliorer la qualité des ovules L’autre tabou en lien avec la maternité concerne les fausses couches, qui affectent environ une grossesse sur cinq, ce taux variant avec l’âge (12% autour de 25 ans, 30% autour de 35 ans). «Beaucoup de femmes l’ont vécu, mais quand cela arrive, elles se sentent souvent seules et culpabilisent, alors que c’est une complication certes dramatique qui n’en demeure pas moins banale», observe le Dr Bernier. Le SOPK fait jaser Trouble hormonal courant qui affecte 5% à 10% des femmes en âge de procréer, le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) est un nouveau sujet de conversation en santé féminine, et d’inquiétudes aussi. Les mécanismes physiopathologiques à l’origine de ce syndrome restent méconnus, mais «ses symptômes se caractérisent par des irrégularités du cycle menstruel, une pilosité accrue sur la lèvre supérieure, le dos ou les fesses, ou encore la perte de cheveux», précise le Dr Frédéric Bernier. S’il peut générer des complications métaboliques, le SOPK entraîne également une inhibition de l’ovulation qui peut compliquer la procréation. En cas de grossesse, il se traduit par «un risque accru de fausse couche, d’accouchement prématuré, de diabète gestationnel et de pré-éclampsie», souligne l’endocrinologue. La ménopause n’est pas une fatalité Comme pour la grossesse, les panélistes de la FMSQ ont rappelé que la ménopause n’est pas une maladie. Si les femmes ont tendance à la percevoir comme leur date d’expiration, «elle demeure une étape de la vie et la médication n’est pas nécessairement indiquée», déclare le Dr Elio Dario Garcia. «Le problème, poursuit le gynécologue, ce n’est pas la ménopause en tant que telle, c’est comment elle est vécue et il ne faut la traiter que si elle suscite de l’inconfort, sachant qu’il n’y a pas de recette magique.» Lire aussi: Lignes directrices: nouveaux traitements recommandés pour la ménopause

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