Révision à la baisse par la Cour d’appel de la perte d’honoraires réclamée par un médecin

Dans un article publié dans L’actualité médicale, en novembre 20091, nous avons résumé la décision de l’Honorable juge Marc-André Blanchard de la Cour supérieure siégeant au district de Montréal dans l’affaire Tawil c. Hôpital Maisonneuve-Rosemont et al2.Cette affaire faisait état des prétentions du demandeur à l’effet que les « règles pour le partage des ressources techniques départementales entre les radio-oncologues de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont » étaient inéquitables et lui avaient causé un préjudice monétaire pour lequel il recherchait compensation.Le juge Blanchard avait alors effectivement conclu que l’adoption et la mise en œuvre de ces règles constituaient une faute puisqu’elles créaient un mode d’attribution des ressources favorisant certains médecins au détriment d’autres. Il accordera finalement au demandeur 135 838,30 $ pour sa perte d’honoraires ainsi que 5500 $ pour atteinte à sa réputation professionnelle et 10 000 $ pour le préjudice moral qu’il avait subi.Le 22 février 2011, la Cour d’appel du Québec3 entendit les prétentions de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont qui s’était porté appelant de la décision de l’Honorable juge Blanchard.La prétention principale de l’appelant était fondée sur le fait que l’article 189 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux permettait, selon lui, à un chef de département de décider de la façon de répartir les ressources.La Cour d’appel avalisera le jugement de l’Honorable juge Blanchard en confirmant la faute de l’appelant. Elle en viendra à la conclusion que cette gestion des ressources devait effectivement attribuer les ressources de façon équitable « en tenant compte de la pathologie des patients et non pas en fonction de la rémunération des médecins4».En revanche, la Cour d’appel verra plutôt à scruter la condamnation à des dommages au bénéfice du demandeur, le Dr Tawil. En effet, bien que confirmant la conclusion de faute rendue par le juge Blanchard, la Cour d’appel analysera si cette faute a réellement créé un préjudice au demandeur par un manque à gagner auquel il aurait autrement pu s’attendre.Dans le contexte de cette analyse, la Cour d’appel appréciera ce qu’elle appellera « les effets des quotas », tels que prévus par les règles dictant l’attribution des ressources par l’hôpital appelant. Puisque c’est effectivement cette règle des quotas qui déterminait si le demandeur devait se voir attribuer davantage de patients et, conséquemment, si la perte de patients lui avait occasionné une baisse de rémunération, la Cour d’appel distinguera selon la preuve qui avait été fournie en première instance.Tout d’abord, elle établira que la perte d’honoraires liée au transfert de 32 patients du demandeur vers d’autres hôpitaux ne pouvait être reprochée à l’appelant puisque cela avait été causé par une pénurie de ressources au département de radio-oncologie. Par conséquent, la Cour d’appel verra à réduire d’autant les pertes d’honoraires qui avaient été calculées par l’Honorable juge Blanchard pour ces 32 patients.Cependant, en ce qui concerne le cas de 30 patients qui avaient été transférés à d’autres médecins à l’interne, la Cour d’appel confirmera la perte d’honoraires du demandeur. Elle dira à cet égard que « la seule cause de ce transfert est l’imposition fautive de quotas par l’appelant ».Au surplus, la Cour d’appel traitera d’un argumentaire supplémentaire de l’appelant en ce qui concerne des transferts individuels. Elle rejettera cet argumentaire soit pour cause d’explications insuffisantes soit parce que l’argument que le demandeur avait refusé de traiter certains patients en heures supplémentaires devait lui faire perdre le droit à cette perte d’honoraires ne pouvait se tenir eu égard aux faits de cette affaire. La Cour d’appel sera en désaccord avec ce dernier argument, confirmant ainsi la position du demandeur qu’il avait refusé d’effectuer ce volume de travail pendant les heures supplémentaires compte tenu d’une absence de collaboration adéquate de ses pairs.En somme, alors que le jugement de première instance avait condamné l’hôpital appelant à payer au demandeur la somme de 151 338,30 $, la Cour d’appel a révisé ce montant à la baisse, soit à 34 604,40 $. Ce faisant, soulignons que la Cour d’appel a tout de même maintenu les montants octroyés en première instance pour l’atteinte à la réputation du demandeur ainsi que son préjudice moral.* Avocat du cabinet Gasco Goodhue1. Me Alexandre Janin, « Une critique judiciaire des listes d’attente en milieu hospitalier », L’actualité médicale, 4 novembre 2009, p. 38.2. Tawil c. Hôpital Maisonneuve-Rosemont et al. EYB 2009-157215 (C.S.).3. Hôpital Maisonneuve-Rosemont c. Tawil et al. EYB 2011-186934 (C.A.).4. Ibid., par. 5.

Révision à la baisse par la Cour d’appel de la perte d’honoraires réclamée par un médecin

Pour accéder au contenu, connectez-vous ou créez un compte gratuit.

Catégories connexes