Remettre l’examen physique nutritionnel au cœur de l’évaluation du patient

C’est l’une des clés de l’évaluation nutritionnelle des patients, mais il reste rarement effectué pendant les consultations de nutrition: l’examen physique nutritionnel, méthode à laquelle peu de professionnels sont réellement formés pendant leur cursus. Aujourd’hui, ce type d’examen reste principalement réalisé par les médecins de famille. Une situation attribuable aussi bien au manque d’équipement qu’à la crainte de certains nutritionnistes, qui ne se sentent pas assez bien outillés. «Il y a un manque de connaissances techniques, alors que cet examen est facilement réalisable», explique ainsi Louise St-Denis, professeure agrégée de formation pratique au Département de nutrition de l’Université de Montréal (UdeM). À lire aussi: Le traitement de la peau ne fonctionne pas? L’alimentation pourrait être en causePour pallier ce manque de connaissances et compléter la prise en charge nutritionnelle, elle a contribué à élaborer, avec sa consœur Geneviève Mailhot notamment, la toute première formation en français dédiée à l’examen physique nutritionnel. «Ça ajoute un plus à la surveillance de l’état nutritionnel», souligne Louise St-Denis. La formation a été conçue en collaboration avec des diététistes-nutritionnistes cliniciennes, le Centre de pédagogie universitaire de l'UdeM et le Bureau du patient partenaire de la Faculté de médecine.«Il faut rassurer» les professionnelsDisponible en vidéo et réalisable à son rythme, cette formation d’une durée de 6h30 s’articule en trois parties. D’abord, poser les bases de l’examen physique nutritionnel et le situer dans le processus d’évaluation du patient. Ensuite, la mise en pratique: comment réaliser un examen physique nutritionnel, quel matériel utiliser… L'important est de mettre les professionnels en confiance, souligne Louise St-Denis. «Il faut les rassurer, et leur dire que c’est normal que ça prenne plus de temps au début, puisqu’on est moins familier avec ces actes.» En effet, comme c'est le cas pour tous les autres professionnels de la santé, le temps dont les nutritionnistes disposent avec leurs patients est souvent compté. «On n’est pas obligé de faire un examen physique complet, on peut cibler notre recherche, voire référer le patient à un collègue si on ne se sent pas à l’aise», ou encore s'inscrire dans une démarche de mentorat avec un ou une nutritionniste ayant l'habitude de procéder à ce genre d'examen, rappelle-t-elle.Enfin, la dernière partie de la formation se focalise sur la réalisation concrète de l’examen sur le patient. À travers des modules vidéo présentant divers contextes cliniques et autant de clientèles, les professionnels apprennent comment déceler et interpréter les signes physiques et cliniques associés aux carences en macro et micronutriments, aux déséquilibres du statut hydrique, ainsi qu'à une diminution des réserves musculaires et adipeuses. «Le coin des lèvres qui rougit pourrait être dû à un déficit en vitamines», illustre la Pre St-Denis. «Les médecins de famille peuvent repérer des chevilles enflées, et un physiothérapeute peut voir que son patient a une fonte musculaire au niveau des jambes… Ce sont des signes.» Travailler en collaborationPour ne pas dupliquer les interventions et assurer une surveillance optimale, la formation aborde aussi la manière de communiquer les observations et les interprétations via les notes au dossier. «Si d’autres professionnels font cet examen, il faut faire attention à l’interprétation des signes observés, car un symptôme peut signifier plusieurs choses», prévient la spécialiste. Une peau sèche pourrait être le signe d'un déficit en acides gras, mais aussi être normal pendant l'hiver; une fonte musculaire pourrait être due à une carence protéino-calorique mais aussi à une maladie, comme la sclérose latérale amyotrophique. «Le mieux est de référer le patient au nutritionniste pour faire une évaluation complète.» À lire aussi: En collaboration | Le rôle élargi des diététistes-nutritionnistes Plusieurs interventions, comme la consultation avec le médecin de famille, le physiothérapeute ou la nutritionniste, pourraient alors être combinées pour éviter de multiplier les examens et pouvoir discuter directement des éléments repérés avant d’élaborer un plan d’intervention en équipe, ajoute-t-elle. «Les nutritionnistes doivent être autonomes et pouvoir travailler en collaboration.»Dans tous les cas, la réalisation d'un examen physique nutritionnel doit avant tout reposer sur le jugement clinique du patient, rappelle la Pre St-Denis. «Certaines populations sont plus à risque d'insécurité alimentaire, comme la clientèle gériatrique, itinérante ou aux prises avec des troubles de consommation de substances. Le cas de scorbut repéré en début d'année nous montre que, même dans un pays développé, nous ne sommes pas à l'abri.»À la fin de la formation, les participants reçoivent une attestation de l'UdeM – que les diététistes-nutritionnistes peuvent intégrer à leur portfolio –, mais qui n’est pas encore reconnue pour les autres professionnels de la santé. Si vous souhaitez en savoir plus sur la formation à l’examen physique nutritionnel proposée par l'UdeM ou vous y inscrire, cliquez sur ce lien. Un tarif préférentiel est en vigueur jusqu’au 31 août 2025.

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