Réduire le sel pour contrer la dermatite atopique

Une action aussi simple que moins consommer de sel peut contribuer à réduire les symptômes de la dermatite atopique (DA), également appelée eczéma atopique.Depuis des décennies, des études ont mis en évidence le rôle possible de l’alimentation dans l’apparition et la persistance de la DA. Mais peu d’entre elles se sont penchées spécifiquement sur le rôle du sel. Bien qu’une étude antérieure a montré que la nourriture proposée en restauration rapide, qui a tendance à être riche en sodium, est associée à une augmentation de 20% de la probabilité d’avoir une dermatite atopique et à un risque de 70% d’avoir une forme sévère chez les adolescents, aucun nutriment ou régime alimentaire spécifique n’avait jusqu’ici été identifié comme le coupable. Toutefois, selon un article paru dans le JAMA Dermatology, l’introduction de l’imagerie par résonance magnétique du sodium a fourni de nouveaux indices sur le rôle du sel dans la DA. L’étude qui a eu recours à cette technologie a révélé que «la majorité du sodium échangeable de l’organisme est stockée dans la peau» et que ce sodium cutané «est associé à des conditions auto-immunes et inflammatoires chroniques, y compris la dermatite atopique».Les chercheurs ont par ailleurs noté qu’un manuel allemand datant de plus d’un siècle recommandait déjà un régime pauvre en sel pour contrer la dermatite atopique, mais que dans l’ensemble, il y avait peu de preuves à ce sujet.Pour approfondir leurs recherches sur le sodium, des scientifiques de l’Université de Californie à San Francisco ont mené une étude transversale sur les données d’adultes britanniques inscrits dans la vaste cohorte de la UK Biobank. L’objectif était d’obtenir des données relatives à l’excrétion urinaire de sodium sur 24 heures, «qui représente environ 90% de l’apport alimentaire en sodium sur 24 heures», selon l’article. Les données obtenues comprenaient également l’indice de masse corporelle (IMC), l’âge et les concentrations urinaires de potassium, de sodium et de créatinine. Un sous-ensemble de participants dont l’apport en sel était inférieur aux quantités recommandées a également été inclus. Le résultat principal était la présence d’une dermatite atopique, qui a été déterminée à partir des informations de diagnostic et de prescription, sa gravité étant prise en compte. Un sous-ensemble de participants présentant des symptômes actifs de la DA au moment de la collecte des échantillons d’urine a été inclus dans les analyses.Ces dernières ont porté sur un total de 215 832 participants. Parmi eux, 54,3% étaient des femmes, 45,7% des hommes, 95% étaient blancs et avaient un âge moyen de 56,5 ans. Leur excrétion moyenne de sodium dans les urines sur 24 heures était de 3,01 grammes par jour, ce qui correspond à une consommation d’environ une cuillère à café de sel par jour. Environ 23 643 participants (11%) consommaient quotidiennement 2,1 g ou moins de sel, ce qui est proche de la quantité de sodium recommandée au Royaume-Uni, mentionne l’article. Plus le sodium est élevé, plus le risque de DA l'est aussiAu total, 10 839 participants (5,0%) étaient atteints d’une DA. Parmi eux, 1282 (11,8%) présentaient une DA active dans les deux ans suivant le prélèvement des échantillons d’urine. Les personnes atteintes étaient plus susceptibles d’être des femmes et d’avoir un statut socio-économique moins élevé. Parmi les personnes atteintes d’une dermatite atopique, 4813 (44,4%) présentaient une forme modérée de la maladie et 320 (3,0%) une forme sévère. Les personnes dont l’excrétion de sodium dans les urines sur 24 heures était supérieure de 1 g étaient plus susceptibles d’avoir eu une dermatite atopique ou d’en avoir une active.«Il y avait également des probabilités plus élevées d’augmentation de la sévérité de la DA associées à une excrétion plus élevée de sodium urinaire sur 24 heures», peut-on lire dans l’article. Lorsque les chercheurs ont examiné les participants dont l’excrétion urinaire de sodium sur 24 heures était inférieure ou égale à la valeur recommandée de 2,1 g, ils ont constaté qu’il n’y avait pas d’association avec la DA. L’effet chez les femmes n’était que légèrement supérieur à celui chez les hommes, et il n’y avait pas d’effet significatif lorsque la race et l’appartenance ethnique étaient prises en compte. Il n’y avait pas non plus de différence en fonction de l’âge.Lire aussi: Lignes directrices internationales actualisées pour la prise en charge de la dermatite atopiqueDans l’ensemble, ils ont constaté chez les personnes dont l’excrétion urinaire de sodium sur 24 heures était supérieure de 1 g (par rapport à la moyenne de 3,01 g par jour) qu’elles étaient 11% plus susceptibles de recevoir un diagnostic de DA, avaient 16% plus de chances d’avoir une DA active et 11% plus de chances d’avoir une DA plus sévère.«Parmi les participants dont l’apport en sodium était inférieur au niveau recommandé par le NHS, il n’y avait aucune preuve d’un risque accru de DA», signale l’article.Les chercheurs notent que si la réduction du sodium est un moyen efficace et peu coûteux de traiter l’hypertension et d’améliorer les résultats d’autres maladies cardiovasculaires, «nos données soutiennent les études expérimentales de cette approche dans la dermatite atopique». Ils ont ajouté que l’une des limites de leur étude était qu’elle ne tenait pas compte de l’apport en sodium à long terme.D’autres affections liées au selLe sodium dans la peau peut être un marqueur ou jouer un rôle dans d’autres affections médicales et cutanées. Une étude suggère ainsi que les techniques d’imagerie modernes pourraient permettre d’utiliser les niveaux de sodium stockés dans la peau comme marqueur de l’activité de certaines maladies à médiation immunitaire, voire comme cible d’un traitement thérapeutique. Dans cette étude parue dans la revue Clinical and Experimental Dermatology, les chercheurs ont passé en revue les études portant sur le sodium présent dans la peau et l’évolution de certaines maladies.Ils «ont constaté que la concentration de sodium dans la peau était plus élevée chez les patients souffrant d’affections cardiométaboliques, notamment d’hypertension, de diabète et d’insuffisance rénale terminale, d’affections auto-immunes, notamment de sclérose en plaques et de sclérose systémique, et d’affections dermatologiques, notamment de dermatite atopique, de psoriasis et de lipoedème.»Lire aussi: Quelles options pour les adultes souffrant de dermatite atopique réfractaire aux traitements topiques?Une autre étude, publiée en 2022 dans le Journal of Investigative Dermatology, a révélé que les taux de sodium étaient élevés dans une autre affection cutanée, le psoriasis. Dans le cadre de cette étude d’observation, les chercheurs ont mesuré les niveaux de sodium dans la peau de 37 patients atteints de psoriasis et de 19 sujets témoins à l’aide d’une IRM du sodium. Ils ont constaté qu’en utilisant l’indice de sensibilité de la zone du psoriasis (PASI), les patients dont le score PASI était supérieur à 5 avaient une teneur en sodium et en eau significativement plus élevée dans leur peau, mais pas dans d’autres tissus, que ceux dont le score PASI était inférieur ou parmi les témoins en bonne santé.Ils ont noté que le sodium peut s’accumuler dans la peau à des concentrations plus élevées que les niveaux sériques.Ils ont également expliqué pourquoi la présence de sodium dans la peau en cas de psoriasis constituait un domaine d’étude intéressant et ont déclaré qu’«un environnement riche en sodium peut entraîner une expansion des cellules T helper 17 pathogènes». Le psoriasis est une maladie inflammatoire chronique de la peau dans laquelle ces lymphocytes produisant de l’interleukine 17 jouent un rôle crucial. Ils ont conclu que leurs données «décrivent le sodium cutané comme une caractéristique physiopathologique du psoriasis, ce qui pourrait ouvrir de nouvelles voies pour son traitement».

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