Pharmacie d’établissement: le gouvernement doit tenir ses promesses, estime l'APES

Alors que les pharmaciens d’établissement se dirigent vers une fin de non recevoir de la part de la ministre Sonia LeBel au sujet de la spécialisation, leur association professionnelle a décidé d’interpeller directement le gouvernement. Selon elle, la Coalition Avenir Québec n’a toujours pas tenu les promesses faites aux pharmaciens des hôpitaux et des CHSLD pendant la campagne électorale de 2022. «On est rendu à mi-mandat, il ne reste plus beaucoup de temps pour réaliser les engagements qu’ils avaient pris. Et rien n’a été fait», regrette aujourd’hui Linda Vaillant, directrice générale de l’Association des pharmaciens des établissements de santé (APES). Dans le viseur de l’APES, bien sûr, le titre de spécialiste pour les détenteurs de la maîtrise en pharmacothérapie avancée. «La CAQ s'est engagée à reconnaître formellement la pertinence du programme de maîtrise en pharmacothérapie avancée», peut-on lire dans le communiqué de l’association. Or, cette mesure a été exclue par la présidente du Conseil du trésor Sonia LeBel en commission parlementaire sur le PL67. L’APES compte donc rappeler le gouvernement à ses promesses pour, peut-être, obtenir satisfaction. «Quand la CAQ a pris ses engagements, ce n’était pas encore un projet. Nous parlions surtout d’accès, explique Linda Vaillant. Au début du Plan Santé, nous avons beaucoup échangé autour de la création d’une catégorie de pharmaciens spécialistes pour améliorer l’accès. Les discussions allaient lentement mais sûrement. Le refus en commission parlementaire a été un revirement de situation.» Valoriser la profession pour attirer les étudiantsEn plus d’améliorer l’accès, de donner davantage d’autonomie aux pharmaciens d'établissement et donc de fluidifier le réseau, cette spécialisation aurait permis de valoriser la pratique, surtout auprès des jeunes. Car c’est bien ce que demande l’APES depuis plusieurs années: une meilleure valorisation – si ce n’est la valorisation tout court – de cette profession, encore trop méconnue par rapport à la pharmacie communautaire. «Le gouvernement, qui est notre employeur, ne fait rien pour faire connaître la pharmacie d’établissement. L’APES et les deux facultés de pharmacie sont les seules à promouvoir la pratique. Ça devient un peu démotivant à la longue pour les équipes, alors que c’est une pratique extraordinaire.»Résultat: 20% des places en maîtrise sont toujours vacantes, constate la directrice générale de l’association. «Lorsqu’on parle aux jeunes de la spécialisation, la maîtrise devient tout de suite plus attrayante. Ils ont des étoiles dans les yeux, ils se sentent valorisés. On aurait pu atteindre cet objectif.» Impossible de concurrencer les revenus proposés dans le privé – qui représente 80% du secteur de pratique en pharmacie selon Linda Vaillant –; le titre de spécialiste est donc le seul argument de poids. À lire aussi: «On comprend mal la réticence de la ministre»En plus d’une vraie campagne de valorisation, l’APES réclame le nécessaire rehaussement technologique du réseau (une mesure également demandée par l’Ordre des pharmaciens et le Collège des médecins lors des auditions pour le PL67) afin d’achever l’automatisation du circuit du médicament dans les établissements, amorcée il y a 15 ans avec le déploiement des systèmes automatisés et robotisés de distribution des médicaments (SARDM). Une impatience palpableCe manque de considération et de constance du gouvernement Legault laisse les pharmaciens d’établissement amers. D'autant que leurs négociations sont toujours au point mort, ajoute Linda Vaillant. «Depuis que nous avons déposé nos demandes en mars dernier, aucune discussion n’a été amorcée. Notre échéance était le 31 mars 2023. Nous avons pourtant de nombreux enjeux à discuter, comme l’attraction, la rétention, et l’amélioration de nos conditions de travail et d’exercice.» Le calendrier aurait-il été ralenti par l’arrivée de Santé Québec? La directrice générale de l’APES en doute, puisque, dit-elle, «la FIQ [Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, ndlr] a eu le temps de négocier, de refuser l’entente, d’avoir un conciliateur, de revoter et d'accepter. Quel message ça envoie aux pharmaciens?»Santé Québec, justement, pourrait être la lumière au bout du tunnel pour les pharmaciens d’établissement, qui espèrent y gagner un interlocuteur de choix, plus proche du terrain et de ses réalités. Mais malgré leurs demandes, toujours aucune direction spécifique pour les soins et services pharmaceutiques à l’horizon…S’il est jonché d’obstacles, le parcours de l’APES n’est pas une voie sans issue, assure toutefois sa directrice générale. Elle ne baissera pas les bras. «La loi n'est pas encore adoptée, donc il y a toujours possibilité qu'elle soit amendée.»

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