Nouveau coronavirus: le MERS beaucoup plus mortel que le SRAS de 2003

Il y a dix ans, un coronavirus alors inconnu, le SRAS, faisait son apparition en Chine. En neuf mois, il infectait 8 000 personnes à travers le monde et causait la mort d’environ 800 d’entre elles, dont une cinquantaine à Toronto. Le SRAS a créé un véritable état de panique et causé d’importantes pertes économiques avant de s’essouffler.Aujourd'hui, un autre coronavirus a émergé dans la péninsule arabique. A priori, il représente une menace encore plus grande que le virus H7N9, qui préoccupait les autorités de santé publique mondiale au début de 2013. Appelé MERS pour Middle East Respiratory Syndrome (syndrome respiratoire du Moyen-Orient), ce coronavirus est beaucoup plus létal que le SRAS de 2003. En date du 20 juin dernier, 64 cas de MERS avaient été répertoriés et 38 patients y avaient succombé.«C’est un taux de mortalité de 59%, ce qui est incroyable», s’exclame le Dr Guy Boivin, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l’influenza et les autres voies respiratoires et microbiologiste-infectiologue au CHU de Québec. En comparaison, le virus H7N9 a un taux de mortalité d’environ 25% et celui du SARS se situait entre 10% et 15%. Le taux de décès avec le virus H5N1, considéré comme extrêmement dangereux, est de 50 à 60%. Avec le MERS, on nage dans les mêmes eaux que le H5N1.»Le plus récent membre de la famille des coronavirus à être identifié est donc le plus mortel à ce jour. C’est une révélation supplémentaire pour les experts en infectiologie, car les coronavirus produisent principalement des syndromes banals, comme le rhume. Lors de l’épisode du SRAS, les scientifiques n’avaient d’abord pas cru qu’un coronavirus pouvait engendrer des pneumonies fatales. Finalement, ils avaient dû admettre que c’était le cas.Le MERS est si dangereux que des laboratoires, comme celui du Dr Boivin au CHU de Québec, ne peuvent pas le manipuler vivant. Pour ce faire, il faut un niveau de confinement 3, comme c’est le cas pour la grippe aviaire H7N9 ou le SRAS.Si le MERS n’a pas créé le même état de panique que le SRAS, c’est sans doute qu'il semble pour l’instant circonscrit à la péninsule arabique. Les seuls cas rapportés en Europe provenaient d’individus qui s’étaient rendus dans les pays où le MERS s’est développé.En outre, ce coronavirus se transmet difficilement d’homme à homme. Personne, parmi les soignants en France, en Angleterre, en Italie ou en Allemagne ayant traité sans le savoir des patients malades, n’a été infecté.Des hôpitaux québécois, comme le CHU de Québec, ont reçu des consignes pour détecter d’éventuels cas de MERS chez les patients ayant séjourné dans les régions touchées.Les coronavirusLes coronavirus, explique le Dr Guy Boivin, sont des virus à ARN, dont le génome est relativement grand. Leur particularité est de muter beaucoup et d’avoir des événements de recombinaison, ce qui est à la source de mutations. Plusieurs dizaines de ces coronavirus infectent la chauve-souris, les souris, les oiseaux, les chiens, les porcs, les bovins et l’être humain.Chez l’homme, six sont connus. Deux, associés aux rhumes, ont été découverts dans les années 60: le OC43 et 229E. Deux autres ont été identifiés dans les années 2000: le NL63 et le HKU1. Ils ont été associés à des infections des voies respiratoires, comme des bronchites. Les deux plus récents ont été associés à des pneumonies sévères, le SRAS et maintenant le MERS.Près de 75% des patients qui ont été infectés par le MERS depuis septembre 2012 sont des hommes. L’âge médian est de 56 ans. Seulement deux cas pédiatriques ont été rapportés.Aucun traitement Pour l’instant, dit le Dr Boivin, il n’existe aucun traitement pour les coronavirus, pas d’antiviral, pas d’immunomodulateur et encore moins de vaccins. Pour le SRAS, on commençait à tester l’interféron, mais les chercheurs n’ont pas eu le temps de l’expérimenter chez l’humain et de l’évaluer dans des études cliniques, car l’épidémie s’était contenue par elle-même. On avait aussi essayé un antiviral, la ribavirine, mais il a été démontré qu’elle n'était pas efficace.«Nous sommes très limités en terme d’armes thérapeutiques, admet le Dr Boivin. Nous n’en n’avons pas vraiment. Il faudra de la recherche pour en développer. Pour l’instant, on donne un traitement de support. On va assister le patient avec un ventilateur mécanique, faire de l’hémodialyse, s’il y a insuffisance rénale, et une circulation extra-corporelle, si le patient n’est plus capable de respirer par lui-même.»Grande inquiétudeOutre un taux de mortalité extrêmement élevé, un autre aspect du MERS inquiète particulièrement le microbiologiste-infectiologue québécois.«On ne connaît pas la source. Il y a probablement un intermédiaire animal entre la chauve-souris et l’homme, mais on ne l’a pas encore identifié, alors que pour le H7N9, on sait assez bien que c’est la volaille. C’est donc difficile d’éviter les expositions quand on ne connaît pas le réservoir. Le point le plus critique, selon moi, c’est de trouver la source.»Il existe aussi une possibilité que le virus mute et qu’il s’adapte mieux à l’homme, comme l’avait fait le SRAS.«On ne le souhaite pas, mais ça reste une possibilité», dit le Dr Boivin.L'apparition de deux virus importants et dangereux en moins d’un an, le MERS et la grippe aviaire H7N9, constituent de nouvelles menaces de nature infectiologique pour la planète. Entre l’explosion démographique, les changements climatiques et des enclos d’élevage industriel réunissant des centaines de milliers de bêtes, tout est en place pour créer de nouvelles éclosions du genre.

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