Le Dr Malouf échoue à écarter la présidente du Conseil de discipline

Le Dr Maan Malouf vient d’essuyer un nouveau revers devant le Conseil de discipline du Collège des médecins du Québec. Le gynécologue obstétricien demandait la récusation de la présidente, Me Julie Charbonneau, qui l’avait déjà déclaré coupable en 2018 dans un dossier de complications postcésarienne. Le clinicien soutenait qu’en raison de cette précédente affaire, et du fait que le Tribunal des professions a ensuite réduit la sanction qu’elle lui avait imposée, la présidente ne pouvait plus le juger avec le détachement nécessaire. Le Conseil rejette cette demande et maintient Me Charbonneau à la tête de la formation appelée à juger la nouvelle plainte visant le spécialiste montréalais.Dans sa demande en récusation, le Dr Malouf affirme que la présidente aurait développé, au fil du temps, une opinion défavorable à son endroit. Il soutient que ses conclusions sévères contre lui en 2018 et l’analyse détaillée de ses manquements auraient laissé une «impression défavorable durable» qui l’empêcherait, selon lui, d’aborder le nouveau dossier avec l’ouverture d’esprit exigée. Il invoque aussi le fait que le Tribunal des professions a par la suite réduit la sanction imposée par Me Charbonneau, ce qu’il présente comme la preuve d’un jugement initial révélateur d’un parti pris. Le médecin prétend que cette combinaison de décisions antérieures suffit à faire naître une crainte raisonnable de partialité et qu’il doit, pour cette raison, être entendu par une autre formation du Conseil de discipline.L’origine de sa demande remonte à l’affaire jugée en 2018, dans laquelle le Dr Malouf avait été reconnu coupable de quatre chefs d’infraction liés à une prise en charge déficiente après une césarienne. Le Conseil avait conclu qu’il avait tardé à reconnaître une hémorragie interne, omis d’intervenir malgré des signes vitaux alarmants et laissé la patiente évoluer vers un état critique sans mettre en œuvre les mesures nécessaires. La présidente Charbonneau parlait alors d’une «absence de vigilance» et d’une réaction clinique «nettement insuffisante» pour un obstétricien avec autant d’expérience (son inscription au tableau de l’Ordre remonte à 1975). En savoir plus: Radié pour avoir négligé le suivi de sa patiente dans un état critiquePour ces manquements, le Conseil lui avait imposé une radiation de 12 mois ainsi qu’un stage de perfectionnement. Le Tribunal des professions avait ensuite réduit cette période à quatre mois, tout en maintenant l’analyse sévère des faits. Aux yeux du Dr Malouf, cet ajustement confirme que la présidente avait porté un jugement «excessif», ce qui nourrit aujourd’hui sa volonté de l’écarter.Des manquements qui se répètentLa nouvelle plainte déposée en décembre 2024 contre le Dr Malouf survient dans un contexte où son dossier professionnel est déjà lourd. Entretemps, le médecin septuagénaire a été radié neuf mois, en 2023, pour des suivis jugés défaillants auprès de patientes présentant des cytologies anormales, une autre affaire où le Conseil avait relevé des lacunes de vigilance et de jugement clinique. La plainte la plus récente porte encore une fois sur la prise en charge d’une patiente dont l’état se serait détérioré sans que le gynécologue n’intervienne avec la célérité attendue. Le syndic y voit le même schéma clinique que dans l’affaire de 2015: des signes alarmants, une vigilance jugée insuffisante et un retard d’action susceptible d’avoir aggravé l’état de la patiente. C’est précisément cette proximité des faits qui alimente la crainte du médecin, convaincu que la présidente, ayant déjà analysé des manquements similaires, aborderait le nouveau dossier avec une impression défavorable. Dans sa requête, le Dr Malouf affirme que cette similitude «accentue l’apparence de partialité» et qu’une nouvelle formation serait la seule garantie d’un examen véritablement neutre.En savoir plus: Un gynécologue septuagénaire radié 9 mois pour des suivis défaillantsSes pairs rejettent toutefois cette lecture. La formation, présidée par Me Charbonneau, rappelle que la récusation exige une crainte raisonnable de partialité, fondée sur des faits objectifs «et non sur une perception ou une impression personnelle». Or, selon le Conseil, le Dr Malouf ne démontre rien de concret permettant de conclure que la présidente aborderait le nouveau dossier avec un état d’esprit déjà fixé. Le Conseil précise de plus que le seul fait pour une présidente d’avoir déjà sanctionné un médecin - même sévèrement - ne suffit jamais à établir une apparence de partialité. «Les motifs avancés par l’intimé demeurent hypothétiques et ne reposent sur aucun élément probant», souligne la décision. Un raisonnement intenableLa similitude des faits ne change rien à l’analyse: dans un système disciplinaire où les récidives existent, accepter un tel raisonnement reviendrait à empêcher tout président ou conseiller ayant rendu une décision antérieure de siéger sur un nouveau dossier impliquant le même médecin. Une conséquence que le Conseil qualifie d’«intenable».La prémisse du Dr Malouf entre en contradiction avec les principes mêmes du système disciplinaire. Celui-ci prévoit que les antécédents d’un médecin peuvent être connus et examinés sans que cela n’entame l’impartialité d’un Conseil de discipline, surtout lorsque des manquements similaires se répètent au fil du temps. Soutenir qu’un président ne peut plus entendre un dossier parce qu’il a déjà sanctionné un accusé reviendrait à soustraire les récidivistes à l’expertise de leurs pairs les plus aguerris. Leur rôle n’est pas de juger la personne, mais d’évaluer des faits précis au regard des normes professionnelles. «C’est sur cette base que doit se faire l’analyse, et non sur les impressions que (le Dr Malouf) prête à la formation», note la décision.La requête du Dr Malouf étant rejetée, la formation du Conseil, présidée par Me Charbonneau, demeure inchangée et le dossier revient désormais sur le fond pour l’examen des faits reprochés au médecin. Le Conseil juge qu’aucun motif ne justifie de suspendre l’audience, qui pourra se poursuivre selon la procédure habituelle.

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