Le bon sens est-il encore si commun que cela?

Wikipédia définit le bon sens (sensus communis en latin, c’est magique!) comme «un jugement sain et pratique concernant des questions du quotidien, ou une capacité élémentaire de percevoir, de comprendre et de juger d’une manière qui est partagée par presque tout le monde». À l’ère moderne, le bon sens est une norme de bon goût, ainsi qu’une source d’axiomes scientifiques et logiques. Si vous voulez vraiment une définition de haut niveau, en voici une: «Ces vérités simples et évidentes ou cette sagesse conventionnelle que personne n’a besoin de comprendre ni de prouver pour les accepter, précisément parce qu’elles s’accordent si bien avec les capacités intellectuelles et les expériences de base de l’ensemble du corps social.» Wikipédia se lance ensuite dans un exposé philosophique complet qui dépasse ma modeste connaissance. J’ai noté qu’un Écossais, Thomas Reid, considérait que le contraire du bon sens était «l’absurde». J’ai pris note du point de vue d’Albert Einstein, «le bon sens est l’ensemble des préjugés acquis à l’âge de dix-huit ans». En tant que père de trois enfants, je peux comprendre ce point de vue. Je me souviens qu’en ma qualité d’interniste dans une petite ville de Colombie-Britannique, j’avais offert des «tests à l’effort gratuits» à tous les participants d’une course à pied destinée à collecter des fonds. Le gérant du magasin de l’hôpital local était décédé d’une crise cardiaque en se préparant pour le Vancouver Sun Run. Sa douleur thoracique à l’effort n’était pas une brûlure d’estomac. J’ai eu beaucoup de peine pour sa femme et sa famille. Cet examen allait donc permettre aux coureurs de savoir ce que leur cœur pensait d’une course de 10 km. J’ai repéré quelques personnes qui présentaient des arythmies à l’effort, mais aucune catastrophe ischémique en attente. Tout le monde s’est senti mieux de se savoir «en sécurité» (sauf face aux voitures qui passent), et j’étais satisfait d’y avoir contribué d’une manière ou d’une autre. Bien sûr, mon assistant et moi-même l’avons fait sans rien leur facturer — c’était juste la bonne chose à faire. J’ai toujours adopté un seuil assez bas pour évaluer les patients actifs de plus de 60 ans. Dan Williams (79 ans) entre en titubant dans le cabinet et me dit: «Je joue encore au hockey avec des vétérans. Ne vous inquiétez pas, c’est sans contact». Je lui demande s’il a déjà vu le défibrillateur externe automatisé (DEA) en usage sur la glace et s’il est suffisamment en forme pour de courtes périodes d’activité intense. Après sa réponse dédaigneuse, je vérifie ses facteurs de risque: son âge (de loin le facteur le plus important), son hypertension (bien que contrôlée) et son historique de tabagisme. L’épreuve d’effort était médicalement justifiée, même en l’absence de symptômes angineux, et il l’a réussie sans problème. Ruby Williams et ses fils, Mike et Bret, ont respiré plus facilement cette nuit-là. Lire aussi: Le rire est-il vraiment le meilleur remède? Quels autres concepts de «gros bon sens» devrions-nous énumérer? Permettez-moi de suggérer ceux-ci: 1. Toute personne âgée de plus de 60 ans peut passer un test d’effort, surtout si elle est inquiète. 2. Les patients sous anticoagulants méritent peut-être de voir leur hémoglobine mesurée de temps en temps. 3. Les diabétiques passent un test A1c tous les trois mois, mais la microalbuminurie est un meilleur marqueur de la souffrance endothéliale. 4. Les patients sous amiodarone présentent presque tous un dysfonctionnement thyroïdien — le surveillons-nous? 5. Devrions-nous écrire toutes nos instructions, maintenant que notre clientèle souffre de troubles de l’audition, de la vision et de la mémoire? N’est-ce pas à cela que servent les blocs d’ordonnances? 6. Tous les conducteurs de plus de 80 ans devraient se porter volontaires pour passer un test de compétence, afin de disposer d’un élément sur lequel s’appuyer si un ivrogne grille un feu rouge et les accuse. 7. Tous les fumeurs devraient passer une simple spirométrie et une radiographie des poumons le jour de leur anniversaire. 8. Tous les patients cardiaques devraient être équipés d’un appareil Alivecor Kardia si leur écho révèle une hypertrophie de l’oreillette gauche. La plupart des arythmies sont silencieuses. 9. Tous les patients sous stéroïdes se voient prescrire un inhibiteur de la pompe à protons. 10. Les patients souffrant de reflux depuis longtemps doivent subir une endoscopie gastro-intestinale (coloscopie). 11. Tous les patients doivent disposer d’un dossier de santé à domicile, qu’ils emportent avec eux lorsqu’ils voyagent ou lorsqu’ils consultent un nouveau médecin. Il contient les coordonnées des personnes à contacter en cas d’urgence, ainsi que les notes de consultation; les listes de médicaments; les allergies et les réactions anormales; les données de base (fréquence cardiaque et tension artérielle); les documents essentiels (testament, procuration et directives anticipées) ou leurs liens vers des sites web où ils sont disponibles; le carnet de vaccination (grippe, COVID-19, zona, pneumovax, etc.); des conseils simples de premiers secours concernant les anti-inflammatoires, les infections ou les hémorragies; les noms et numéros de téléphone de médecins, d’infirmières praticiennes, de cliniques sans rendez-vous, d’hôpitaux, de pharmacies, etc. doivent figurer sur la couverture. Le numéro d’appel des infirmières, le 811, est également indiqué. 12. Vous vous pesez deux fois par an, et vous l’indiquez sur le calendrier (ou sur votre carnet de santé). Lire aussi: «Aimez vos patients comme vous aimez vos parents» 13. Vous vérifiez votre tension artérielle une fois par mois et vous l’indiquez sur le calendrier (ou sur votre carnet de santé). 14. Des informations simples sur les questions liées au mode de vie, au tabagisme, à l’alcool, aux opiacés, à l’obésité. Et peut-être que tout cela pourrait être enseigné au secondaire, non? Pour moi, c’est une question de bon sens. Je donne une copie de ma consultation aux patients qui reviennent me consulter (une sorte de cadeau). Il me suffit d’appuyer sur le bouton «IMPRIMER» et ils semblent vraiment heureux. Pour moi, en ces temps de dysfonctionnement du système de santé, c’est une question de «gros bon sens». Le Dr Hector Baillie est un interniste communautaire, polyvalent, qui travaille en Colombie-Britannique. Il écrit sur des cas et des concepts qui sont susceptibles de stimuler la discussion et le changement.

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