La communauté scientifique des ITS et du VIH a rendez-vous au Québec

Après Amsterdam en 2021 et Chicago en 2023, c’est au tour de Montréal d’accueillir le Congrès mondial sur les infections transmissibles sexuellement (ITS) et le virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Organisée conjointement par l’ISSTDR (International Society for Sexually Transmitted Diseases Research) et l’IUSTI (International Union against Sexually Transmitted Infections), cette conférence est chapeautée par les deux présidents canadiens de ces deux organisations: le médecin de famille Marc Steben, pour la première, et la microbiologiste Jo-Anne Dillon, pour la seconde.Sous le thème de «la santé sexuelle pour tous», l’événement mettra en lumière les avancées en matière de prévention, de dépistage, de traitement et de lutte contre la résistance antimicrobienne. Du 26 au 30 juillet, quelque 1500 conférenciers et participants sont ainsi attendus au Palais des congrès, «un record», selon le Dr Steben. Venus des quatre coins du monde, ces chercheurs, ces cliniciens, ces professionnels de la santé, ces décideurs et ces représentants d’organismes communautaires se réunissent autour d’un objectif commun: améliorer l’accès équitable aux soins pour les populations les plus vulnérables, ce qui passe par un renforcement de l’inclusivité.L’Organisation mondiale de la santé (OMS) publiait en 1975 le rapport intitulé « Éducation et traitement en matière de sexualité humaine» qui proposait la première définition de la santé sexuelle. Un demi-siècle plus tard, le Dr Steben espère que le congrès aboutira à une remise à jour de cette définition officielle, dont la dernière version remonte à 2006. «La criminalisation croissante de la sexualité à travers le monde a des effets sur la santé sexuelle des individus. Sa définition doit inclure cet enjeu», observe le médecin qui évoque également les questions du mariage forcé des jeunes filles, des mutilations génitales, des droits des personnes LGBTQ+, de l’accès à l’avortement, à la contraception, etc.«La santé sexuelle est un état de bien-être physique, mental et social dans le domaine de la sexualité. Elle requiert une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ainsi que la possibilité d’avoir des expériences sexuelles qui soient sources de plaisir et sans risque, libres de toute coercition, discrimination ou violence.» - OMSSi le congrès s’annonce sous les meilleurs auspices, il a failli en être autrement. Environ 40% de son budget provenait de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), dont la quasi-totalité des programmes a été suspendue fin janvier puis supprimée début mars par l’administration du président Donald Trump. «On a réussi à se revirer du bord en coupant dans certaines activités comme le souper des conférenciers ou les lunchs offerts le midi, ce qui nous a permis de maintenir le budget déplacements des intervenants des pays en développement», indique le Dr Steben. Le comité d’organisation du congrès a également trouvé d’autres organismes financeurs, tels que l’American Sexually Transmitted Diseases Association ou la fondation Bill et Melinda Gates. «Le gouvernement fédéral devrait également nous soutenir», mentionne le médecin de famille qui précise être en attente de la confirmation de l’entente verbale qui ferait d’Ottawa le principal bailleur de fonds du congrès mondial de l’ISSTDR et de l’IUSTI.Faire autrementLe clinicien chercheur mentionne que l’arrêt des programmes d’USAID de même que ceux du President's Emergency Plan for AIDS Relief (PEPFAR, le plan d’aide d’urgence à la lutte contre le sida dans le monde lancé en 2003 par le président George W. Bush) a eu des conséquences dramatiques, notamment en Afrique. Son projet de recherche au Eswatini qui évaluait un nouvel outil de dépistage des lésions précancéreuses du col de l’utérus s’est par exemple arrêté du jour au lendemain. «Quarante-deux femmes qui avaient des résultats anormaux ont trouvé porte close», déplore le Dr Steben.Cela dit, «du chaos peuvent naître des opportunités», affirme le médecin. «C’est l’occasion de faire autrement et de moins dépendre des États-Unis, souligne-t-il en mentionnant que des pays comme le Nigéria, le Rwanda, la Zambie et le Sénégal ont commencé à «se prendre en main». Il ajoute que son rêve, «c’est que les États africains deviennent complètement indépendants. Il va y avoir des passages difficiles, mais on voit que ça s’en vient tranquillement.»

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