Histoire d'une découverte et de son potentiel thérapeutique: l'enzyme PCSK9 et le LDL-cholestérol

Découverte en 20021, l'enzyme PCSK9 est le dernier membre de la famille des proprotéines convertases, molécules responsables du clivage de précurseurs de protéines et de l’activation de celles-ci, impliquées dans de nombreuses pathologies comme le cancer, l’infarctus du myocarde, l’accident vasculaire cérébral, le diabète, la maladie d’Alzheimer et, plus récemment, dans le contrôle du cholestérol. Aperçu du sujet en compagnie du Pr. Nabil G. Seidah2.On a commencé à découvrir les enzymes convertases dans les années 1990. On en a trouvé neuf, dont la PCSK9. Après des études avec des modèles animaux (rats, souris) et des cellules humaines, on a réalisé que le foie était une source majeure de PCSK9; le petit intestin aussi, dans une moindre mesure.Nous avons ensuite localisé le gène PCSK9 sur le chromosome 1p32. Une équipe de recherche française, dirigée par la Dre Catherine Boileau, avait déjà identifié ce locus comme étant le troisième locus de l'hypercholestérolémie familiale; une maladie qui touche une personne sur 500 à travers le monde. Au Lac Saint-Jean, Québec, elle peut toucher jusqu'à une personne sur 80.Des mutations qui modifient le taux de cholestérolGrâce aux techniques disponibles en France de séquençage à haut débit de l'ADN des patients (Généthon, Centre de recherches sur le génome humain), nous avons découvert que tous les patients de la Dre Boileau étaient porteurs d'une mutation du gène PCSK9.Quelques mois plus tard, nous avons publié dans Nature3 les premières données probantes montrant que le PCSK9 est relié au cholestérol.Cette mutation cause un gain de fonction, soit une activité plus forte de l'enzyme PCSK9. On sait maintenant que sa fonction est de dégrader le LDL-récepteur, c'est-à-dire le récepteur qui capte le LDL-cholestérol circulant. Avec un gain de fonction, la dégradation du récepteur est accélérée. Il y aura donc plus de LDL-cholestérol circulant. Le gain de fonction mène ainsi à une hypercholestérolémie.Deux ans plus tard, les Américains ont trouvé chez des Afro-Américains une mutation du gène PCSK9 entraînant une perte de fonction, soit une hypocholestérolémie. Enfin, on a trouvé en Afrique et aux États-Unis deux personnes porteuses de mutations qui annihilent la fonction du PCSK9. Ces personnes vivent donc sans enzyme PCSK9 et leur cholestérol est très, très bas; huit fois plus bas que le notre. La majorité des statines diminuent d'environ 25% le cholestérol et là, on parle de 800%!L'idée s'est rapidement propagée dans les compagnies pharmaceutiques que ce gène était un bon candidat pour un nouveau médicament contre le cholestérol. Surtout pour les patients qui sont résistants aux statines ou qui souffrent de myalgies, effets secondaires des statines. Amgen, aux États-Unis et au Canada, et Sanofi-Regeneron en France, ont ainsi développé des anticorps monoclonaux qui viennent capter l'enzyme PCSK9 et inhiber sa fonction.Les études cliniques en sont au stade de phase III actuellement. Une injection sous-cutanée de 150 mg une fois toutes les deux semaines diminue le LDL-cholestérol de 70% en quelques heures. Les travaux récents portent sur la formulation pour en arriver à un effet durable sur un mois.Pour ma part, j'ai décidé de former un groupe de recherche international4 afin de mieux comprendre le rôle multiple et la régulation de PCSK9. Les connaissances qui seront générées par ce projet auront un impact important sur la compréhension et le traitement des maladies cardiovasculaires et seront très utiles pour développer de nouvelles approches thérapeutiques, conclut le Pr. Seidah.1. Seidah N.G. et coll. PNAS 2003; 100(3): 928-33.2. Le Pr. Nabil G. Seidah est une figure internationale de la recherche sur les proprotéines convertases depuis près de 40 ans. Il est directeur de l'unité de recherche en biochimie neuroendocrinienne et directeur de l'axe de recherche sur les maladies cardiovasculaires et métaboliques à l'Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM). Il est professeur-chercheur titulaire au département de médecine de l'Université de Montréal et professeur associé au département de médecine de l'Université McGill. Il est aussi titulaire de la Chaire de recherche du Canada en protéolyse des précurseurs.3. Abifadel M. et coll. Nat. Genet. 2003; 34: 154–56.4. Le groupe rassemble 16 experts en recherche clinique et fondamentale provenant de six institutions de recherche au Canada (IRCM, Université de Sherbrooke, McMaster University), en France (Université de Nantes, Hôpital Bichat-Claude-Bernard) et en Suède (Karolinska Institutet). C'est la Fondation Leducq qui finance le projet à hauteur de six millions de dollars sur une période de cinq ans.

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