Frais accessoires: un litige de 400$ entre une clinique et la RAMQ porté en Cour d’appel

En effet, le 17 septembre dernier, la Cour d’appel a rejeté les prétentions du Centre de fertilité de Montréal qui veut imposer des frais pour au moins un service, mais l’affaire n’est pas close et devrait se poursuivre devant la Cour du Québec. Le Centre de fertilité de Montréal (CFM) exploite une clinique médicale offrant des services de procréation assistée. Le différend qui l’oppose à la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) résulte de l’abolition, en janvier 2017, des frais accessoires liés à la dispensation des services assurés par le régime d’assurance maladie. Or, à deux reprises, les 7 et 11 avril 2017, le CFM a facturé des spermogrammes à des patients assurés. En mars 2018, la RAMQ a avisé le Centre que ces patients avaient présenté des demandes de remboursements de 200$ chacun, des frais qui leur avaient été chargés pour effectuer ces tests. La Régie était d’avis que ces frais ont été facturés à l’encontre de l’article 22 et de la Loi sur l’assurance maladie (LAM), et a informé le Centre qu’il bénéficiait d’un délai de 30 jours pour présenter ses observations par écrit. Les arguments du CFM Dans deux lettres expédiées en avril 2018 à la RAMQ, le CFM soutient qu’il avait le droit de facturer ses patients pour les services de spermogrammes effectués dans son laboratoire d’andrologie, puisque ces derniers sont faits sur place. Cet argument a été rejeté par la Régie, qui a statué la même année que ces deux demandes de paiements de 200$ étaient contraires à l’article 22 de la LAM. Ces dispositions prévoient essentiellement qu’un professionnel de la santé soumis à l’application d’une entente ne peut exiger ni recevoir, pour un service assuré, que la rémunération prévue à cette entente et ne peut réclamer ni recevoir de paiement d’un assuré, directement ou indirectement, pour des frais engagés pour des services assurés. La RAMQ a indiqué qu’elle allait rembourser les patients indûment facturés et réclamer les montants au CFM. La somme totale qui est en cause (400$) est dérisoire, mais si le CFM se fait confirmer qu’il peut facturer ces frais à ses clients, il pourrait ouvrir une brèche dans la Loi qui encadre les frais accessoires. Une faille que la Régie veut éviter à tout prix. Contestation juridique Le CFM s’est engagé dans une escalade juridique coûteuse afin de faire casser la décision de la Régie. En janvier 2019, il a déposé une demande introductive d’instance en contestation des décisions de la RAMQ devant la Cour du Québec. Il y a présenté les mêmes motifs qu’il avait soumis à la Régie, soit qu’il ne s’agissait pas de services d’insémination artificielle assurés, mais plutôt de services liés à la procréation assistée, qui eux, ne le sont pas. Par conséquent, les frais de ces analyses peuvent être facturés aux patients. Parallèlement, le CFM a déposé le même jour en Cour supérieure une demande en jugement déclaratoire afin de faire déclarer que le Règlement abolissant les frais accessoires liés à la dispensation des services assurés et régissant les frais de transport des échantillons biologiques et le document sur les Orientations du ministère n’étaient pas applicables aux services de procréation assistée, sauf les services d’insémination artificielle. Dans sa demande, le CFM a dit craindre qu’en raison des interprétations de la RAMQ, il ne pourra plus facturer les patients pour certains services de spermogrammes, comme la nouvelle technologie «sperm DNA fragmentation testing», ce qui «pourrait avoir un impact sur l’augmentation du taux d’implantation d’embryons ainsi que sur la diminution des risques de fausse couche», a-t-il soutenu. Le CFM a semblé également soutenir devant la Cour supérieure que la RAMQ menaçait un droit puisqu’elle vise d’autres services que les spermogrammes. La RAMQ a plaidé l’irrecevabilité de cette demande en jugement déclaratoire du CFM et obtenu gain de cause devant ce même tribunal. La Cour d’appel ne tranche pas Débouté en première instance par la Cour supérieure, le CFM a porté ce jugement devant la Cour d’appel, qui s’est prononcé sur un seul des volets à la mi-septembre. Dans leur arrêt dans lequel la FMSQ est mise en cause, mais sans indiquer pour quelle partie, les trois juges ont à nouveau rejeté les prétentions du Centre vis-à-vis sa demande de jugement déclaratoire, et estimé par ailleurs que les enjeux soulevés par le CFM en Cour supérieure étaient en grande partie hypothétiques. Les magistrats ne se sont toutefois pas prononcés sur le fond du litige: les spermogrammes sont-ils des services d’insémination artificielle qui sont assurés et ne peuvent être donc facturés aux patients ou des services de procréation assistés qui ne sont pas couverts par le régime et peuvent en conséquence être facturés comme l’a fait le Centre? Les juges expliquent dans leur décision que ces faits pourront être débattus dans le cadre d’un recours de novo devant la Cour du Québec. Ils laissent donc à cette instance la responsabilité de trancher. Si le CFM veut poursuivre sa contestation devant les tribunaux, c’est devant la Cour du Québec qu’il devra le faire. Contactée par Professionsante.ca pour obtenir ses commentaires, l’une des avocates du Centre de fertilité de Montréal, Me Marie-France Tozzi, a dit ne pas pouvoir répondre à nos questions, prétextant que le dossier est toujours devant la Cour. Le petit montant de 400$, à l’origine de cette cause, pourrait avoir une immense portée pour les cliniques qui cherchent des façons de réimposer des frais accessoires à leurs patients, notamment par l’utilisation des nouvelles technologies. L’affaire est donc à suivre.

Frais accessoires: un litige de 400$ entre une clinique et la RAMQ porté en Cour d’appel

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