Coupable d’inconduite sexuelle, un omnipraticien évite la radiation minimale de 5 ans

Depuis 2017, l’article 156 du Code des professions prévoit que tout professionnel reconnu coupable d’inconduite sexuelle doit être sanctionné par «une radiation d’au moins cinq ans, sauf si ce dernier convainc le Conseil de discipline qu’une sanction moindre serait justifiée dans les circonstances». C’est ce que le Dr Craig Smith est parvenu à faire. En proposant de n’exercer qu’auprès d’une patientèle ayant «des attributs physiques masculins», et ce jusqu’à la fin de sa carrière, le médecin de famille vient d’être radié pour une durée de quatre ans.Bien que l’omnipraticien «ne semble pas avoir réalisé la gravité des gestes qu’il a posés ainsi que des conséquences pour sa patiente», le Conseil de discipline du Collège des médecins du Québec (CMQ) juge que la mesure qu’il a proposée — et que ses pairs ont entérinée — est «significative» et, donc, qu’«une radiation temporaire de moins de cinq ans doit lui être imposée». En outre, le Dr Smith se voit imposer une amende de 5000$. Un montant qui, selon le Conseil, devrait être reversé à sa victime afin d’assurer le coût des soins thérapeutiques.Par le passé, le médecin de famille a déjà bénéficié de la clémence du Conseil pour «des gestes abusifs à caractère sexuel». En mai 2019, il avait été radié trois ans pour avoir pris en photo le sexe d’une patiente à son insu et pour avoir tenté d’en photographier une autre avec son cellulaire alors qu’elle avait les seins nus. Lire aussi: Le Dr Smith radié 3 ans pour avoir photographié des patientes dénudéesC’est en découvrant sur Internet cette sanction que la patiente concernée dans le présent dossier a décidé de porter plainte contre lui. En mars 2018, cette femme âgée de 20 ans avait pris rendez-vous avec le médecin pour des éruptions cutanées sur le front. Durant la consultation, il lui a proposé plusieurs fois de procéder à un examen gynécologique. Ce qu’elle a d’abord refusé, car elle ne voyait pas de lien entre son problème d’acné et un examen vaginal.Devant l’insistance du Dr Smith, la patiente a fini par céder «à la pression» en acceptant qu’il procède à l’examen. Le clinicien a alors effectué un examen visuel de sa région vulvaire, sans se servir d’un spéculum, puis il a introduit son doigt dans le vagin de la jeune femme, qui déclare s’être «sentie violée». Le médecin lui a ensuite demandé de se lever, puis il s’est accroupi derrière elle en l’invitant à se pencher en avant. À ce moment-là, il a écarté ses fesses pour faire un examen visuel de la zone anale et périanale.Pour sa défense, l’omnipraticien a estimé que la patiente se méprenait sur la nature de ses gestes. Il a également prétendu que son examen gynécologique était tout à fait indiqué, car la jeune femme était «sexuellement active», et parce qu’il suspectait la présence d’une vaginite ou d’une infection transmissible sexuellement et par le sang (ITSS).Dans sa décision sur culpabilité, le Conseil a réfuté ses arguments, en affirmant qu’«insérer un seul doigt dans le vagin de sa patiente pendant 15 à 20 secondes et (lui) demander de se pencher vers l’avant pour écarter ses fesses afin d’examiner ses régions anale ou périanale constituent des actes abusifs à caractère sexuel (…) qui outrepassent la relation professionnelle».Le Conseil a de plus estimé que l’examen réalisé par le Dr Smith n’était pas conforme aux normes. «Pour faire le diagnostic, hors de tout doute d’une vaginite et pour éliminer une ITTS, l’examen doit se faire avec spéculum et permettre de bien visualiser le vagin et le col. (…) Un simple examen visuel de la région vulvaire pour corroborer une vaginite est clairement insuffisant», peut-on lire dans la décision. Lire aussi: Un chirurgien radié cinq ans pour abus sexuel est acquittéAucun regret ni repentirLors de son audience sur sanction, le médecin de famille a regretté que le Conseil n’ait pas retenu sa version. Il s’est dit «très affecté par les allégations d’inconduite sexuelle» de sa patiente, répétant qu’elles sont «le résultat d’une perception erronée».Pour le syndic, le Dr Smith «se pose en victime et ne semble pas tenir compte des gestes posés» ni de leur gravité, ceux-ci constituant une «agression sexuelle». Le médecin n’exprime pas de regrets ou du repentir et semble faire assumer à sa patiente la responsabilité des gestes qu’il a commis, déplore par ailleurs le syndic qui demandait une radiation temporaire de sept ans et une amende de 7500$.Dans sa décision, le Conseil observe que l’attitude de l’omnipraticien et ses déclarations lui permettent «d’affirmer qu’il ne semble pas réaliser toute la gravité des gestes qu’il a commis ainsi que des conséquences pour sa patiente. Il exprime davantage de préoccupations eu égard aux conséquences de ses gestes sur sa vie familiale, personnelle et professionnelle.»Malgré tout, le Conseil a décidé qu’il ne pouvait retenir la suggestion de sanction du syndic. Étant donné que le Dr Smith a proposé que son exercice soit strictement limité à la patientèle masculine jusqu’à ce qu’il cesse sa pratique, une radiation temporaire de sept ans serait «indûment punitive», a-t-il jugé.

Coupable d’inconduite sexuelle, un omnipraticien évite la radiation minimale de 5 ans

Pour accéder au contenu, connectez-vous ou créez un compte gratuit.

Catégories connexes