Comment dépister la COVID longue chez les bébés, les tout-petits et les enfants d’âge préscolaire?

Les bébés et les tout-petits (de 0 à 2 ans) souffrent-ils de la COVID longue? Les résultats de l’étude de cohorte RECOVER (Researching COVID to Enhance Recovery) — Pediatrics répondent par l’affirmative. Mais certains de leurs symptômes peuvent différer de ceux du groupe d’âge supérieur: les enfants d’âge préscolaire (3 à 5 ans). Les détails de cette recherche ont été publiés dans la revue JAMA Pediatrics par des chercheurs qui ont développé des indices de recherche répertoriant les symptômes susceptibles d’indiquer une COVID longue dans différents groupes d’âge.«De nombreux enfants atteints de COVID longue ne sont ni diagnostiqués ni pris en charge. Cette recherche souligne que les bébés, les tout-petits et les enfants d’âge préscolaire peuvent développer une COVID longue et que ces jeunes enfants et leurs familles ont besoin d’être écoutés et pris en charge», indique l’auteure principale de cette étude, la Dre Rachel Gross, professeure agrégée de pédiatrie à la New York University Grossman School of Medicine. Des études antérieures, notamment RECOVER-Pediatrics, se sont intéressées à la COVID longue chez les enfants d’âge scolaire et les adolescents. Elles avaient constaté que les symptômes de la COVID longue étaient similaires, mais distincts entre ces tranches d’âge.«La plupart des recherches menées à ce jour se sont concentrées sur la COVID longue chez les adultes, laissant des lacunes importantes dans notre compréhension de cette affection complexe chez les enfants. Les différences de symptômes de la COVID longue selon l’âge confirment qu’une méthode unique ne suffira probablement pas pour dépister, identifier et traiter les enfants atteints de la COVID longue», signale en entrevue la Dre Gross.Les indices de recherche spécifiques à chaque groupe d’âge établis par l’étude RECOVER peuvent être utilisés pour déterminer les facteurs de risque de développer une COVID longue et la trajectoire de ses symptômes au fil du temps. Il existe désormais quatre indices différents qui peuvent être utilisés dans la recherche, un pour chaque groupe d’âge des enfants.À l’heure actuelle, ces indices «ne sont pas destinés à la pratique clinique, mais ils pourraient constituer une étape importante vers le développement futur d’outils de dépistage cliniquement utiles», précise la Dre Gross.Les différences de symptômes entre les groupes d’âge soulignent l’importance de mener des évaluations distinctes pour chaque groupe d’âge. L’initiative RECOVER a été créée par les National Institutes of Health des États-Unis afin de mieux comprendre la COVID longue tout au long de la vie et en fonction de l’âge. RECOVER-Pediatrics s’intéresse aux cohortes plus jeunes.En général, peu d’études se sont intéressées aux enfants âgés de cinq ans et moins, et certaines n’ont peut-être pas reconnu les symptômes de la COVID longue chez ces enfants-là. Les différences entre les groupes d’âge confirment la nécessité de caractériser distinctement la COVID longue parmi les cohortes de jeunes enfants.En l’occurrence, les chercheurs ont voulu identifier les symptômes et leur fréquence chez les enfants ayant des antécédents d’infection au SRAS-CoV-2 et les comparer à ceux qui n’avaient pas contracté le coronavirus. Ils voulaient aussi identifier les différences dans les types de symptômes par groupe d’âge, en particulier entre les nourrissons et les tout-petits, âgés de 0 à 2 ans, et les enfants d’âge préscolaire, âgés de 3 à 5 ans.Lire aussi: COVID longue: les symptômes diffèrent chez les enfants et les adolescentsParamètres de l’étudeCette vaste étude de cohorte rétrospective et prospective multisite a inclus des données provenant de 30 sites répartis dans 20 États, y compris Porto Rico. Les participants ont été recrutés entre le 16 mars 2022 et le 22 juillet 2024.Lors de leur inscription, les participants ont répondu à un questionnaire évaluant 41 symptômes chez les nourrissons et les tout-petits, et 75 chez les enfants d’âge préscolaire. Les questionnaires ont été remplis au moins 90 jours après la première infection au SRAS-CoV-2. Un large éventail de symptômes a été évalué, notamment au niveau des yeux, des oreilles et de la gorge, ainsi que des symptômes dermatologiques, respiratoires, neurologiques, comportementaux, gastro-intestinaux et autres, sans oublier la persistance des symptômes. Les facteurs sociodémographiques ont été pris en compte dans les analyses.Les enfants ont été inclus dans le groupe infecté s’ils avaient des antécédents déclarés de COVID et s’ils avaient répondu à l’enquête. Les participants non infectés n’avaient pas déclaré d’infection au SRAS-CoV-2 au moment où l’enquête a été réalisée.Au total, 472 nourrissons et tout-petits et 539 enfants d’âge préscolaire ont été inclus dans l’étude. Parmi eux, 514 étaient des filles et 496 des garçons. Dans le groupe des nourrissons, 278 avaient été infectés par le SRAS-CoV-2 et 194 ne l’avaient pas été. Dans le groupe des enfants d’âge préscolaire, 399 avaient été infectés et 140 ne l’avaient pas été.Principaux résultatsLes résultats ont montré que 114 (41%) des nourrissons et des tout-petits ayant des antécédents de COVID et 49 (25%) de ceux qui n’avaient pas été infectés présentaient au moins un symptôme prolongé.Parmi les enfants d’âge préscolaire qui avaient été infectés, 179 (45%) présentaient au moins un symptôme prolongé contre 52 (37%) des 140 enfants d’âge préscolaire non infectés.Les analyses ont révélé cinq symptômes susceptibles d'indiquer une COVID longue chez les nourrissons et les tout-petits, et deux chez les enfants d’âge préscolaire ayant des antécédents d’infection.Chez les nourrissons et les tout-petits, ces symptômes sont un manque d’appétit, des troubles du sommeil, une toux grasse, une toux sèche et un nez bouché. Chez les enfants d’âge préscolaire, on retrouve une fatigue diurne, une somnolence ou un manque d’énergie, et une toux sèche.Les chercheurs ont noté que les symptômes dans ces deux groupes étaient sensiblement différents de ceux observés chez les enfants plus âgés dans les analyses précédentes de RECOVER-Pediatrics. Le groupe d’âge suivant, les enfants d’âge scolaire, présente davantage de symptômes neurologiques, dermatologiques et gastro-intestinaux, ainsi que des douleurs et des angoisses. Chez les adolescents, les symptômes de la COVID longue tendent à ressembler davantage à ceux observés chez les adultes.À lire aussi: Le thé peut réduire «rapidement» la charge virale du SRAS-CoV-2 dans la salivePrévalence chez les enfantsD’autres recherches suggèrent que la COVID longue pédiatrique survient à des taux beaucoup plus faibles que chez les adultes. Une étude publiée en 2024 dans la revue JAMA Network Open par des chercheurs canadiens a par exemple montré que parmi les enfants testés positifs au SRAS-CoV-2, seul 0,67% répondait à la définition de l’OMS d’une condition pédiatrique post-COVID-19 lors d’un suivi à 12 mois. Ce chiffre est à comparer aux 0,16% d’enfants testés négatifs au virus. Cette étude de cohorte prospective multicentrique a été menée dans 14 services d’urgence pédiatriques canadiens où les enfants ont été testés pour l’infection au SRAS-CoV2. L’objectif était de déterminer la proportion d’enfants répondant à la définition de l’OMS des symptômes de la COVID longue 6 et 12 mois après le test.La cohorte comprenait d’une part 5147 enfants, dont 1152 avaient été testés positifs au SRAS-CoV-2 6 mois auparavant et 3995 avaient été déclarés négatifs. Elle comprenait d’autre part 5563 enfants, dont 1192 testés positifs au SRAS-CoV-2 12 mois plus tôt et 4371 testés négatifs. Les symptômes et les changements dans la qualité de vie correspondant à la définition de l’OMS ont été mesurés.Peu d’enfants présentaient ces symptômes et changements dans la qualité de vie, la prévalence étant plus élevée chez ceux infectés par le SRAS-CoV-2 que chez les témoins.Les chercheurs ont conclu que «bien que les enfants infectés par le SRAS-CoV-2 aient signalé une augmentation des symptômes chroniques, peu d’entre eux ont développé une condition pédiatrique post-COVID-19 et, dans l’ensemble, leur qualité de vie ne différait pas de celle des enfants dont les tests SARS-CoV-2 étaient négatifs».

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