Vos patients ont-ils peur de leurs traitements?

Si vos patients atteints d'eczéma n'utilisent pas les traitements topiques prescrits, il se peut qu'ils souffrent de phobie des corticostéroïdes.La peur du traitement est non seulement fréquente, mais de nombreux patients commencent leur traitement tardivement, l'arrêtent prématurément et l'utilisent moins que ce qui leur a été prescrit – même s'ils n'ont pas d'inquiétudes très spécifiques. En outre, plus leur phobie est grande, moins ils en utilisent, selon une étude parue dans le Journal of the American Academy of Dermatology (JAAD).Ces résultats soulignent la nécessité d'une meilleure éducation sur les traitements par corticostéroïdes topiques (CST) ainsi que le besoin de traitements non stéroïdiens sûrs et efficaces, affirment les chercheurs.D'une manière générale, le terme «phobie des corticostéroïdes» fait référence aux «préoccupations exagérées, aux peurs, aux inquiétudes, à l'anxiété, aux doutes, aux réserves, à la réticence ou au scepticisme concernant l'utilisation des corticostéroïdes chez les patients, leurs soignants ou les professionnels de la santé», décrit l'article.La question de la phobie du traitement a été étudiée pour d'autres affections cutanées, telles que la dermatite atopique. Certaines études ont montré qu'au moins la moitié des patients ont une phobie des corticostéroïdes.Mais cette étude s'est concentrée sur les patients souffrant d'eczéma chronique des mains (ECM), qui affecte une partie relativement petite du corps, et a utilisé une cohorte de patients adultes atteints d'ECM issue de la Cohorte danoise sur la peau. L’étude a évalué les connaissances, les croyances, les craintes et les comportements des patients concernant le traitement, ainsi que l'observance. L'ECM a été vérifiée par des dermatologues.Les informations prises en compte incluaient l'âge, l'apparition de l'eczéma, les détails de l'eczéma tels que les douleurs cutanées, le prurit et les fissures, la gravité, les antécédents atopiques, le tabagisme, le traitement par CST, ainsi que les connaissances, les craintes et le comportement à l'égard du traitement par CST.Les patients devaient répondre à des questions de l'échelle TOPICOP (Topical Corticosteroid Phobia) et de l'échelle MARS-5 (Medication Adherence Report Scale). Au total, 927 personnes atteintes d'ECM ont répondu aux deux questionnaires et ont été incluses dans l'étude. L'âge moyen était de 55,4 ans, l'âge moyen d'apparition de l’ECM était de 35,9 ans et la plupart, 665 (71,7%), étaient des femmes. Un nombre significatif, 589 (53,5%), avait des antécédents de tabagisme, tandis que 334 (36,0%) n'avaient jamais fumé.À lire aussi: Quelles options pour les adultes souffrant de dermatite atopique réfractaire aux traitements topiques?En ce qui concerne la gravité actuelle de l’ECM, 516 (55,8%) avaient une forme légère ou presque légère, 280 (30,3%) une maladie modérée, 93 (10,1%) une maladie sévère et 35 (3,8%) une maladie très sévère. Au total, 368 patients (39,7%) ont également indiqué qu'ils souffraient ou avaient souffert de dermatite atopique.En ce qui concerne les mises en garde ou les craintes à l'égard des CST, les résultats de TOPICOP ont révélé que 75,5% des personnes interrogées étaient tout à fait ou presque en accord avec le fait que les CST endommagent la peau; près de la moitié, 48,9%, étaient tout à fait ou presque en accord avec le fait que les CST affecteraient leur santé future, et 36,3% ont déclaré avoir un certain degré de crainte à l'égard des CST, même s'ils ne connaissaient aucun risque associé aux CST, rapporte l'étude.Qu'en est-il de leur comportement? La plupart des patients, 77,9%, ont déclaré qu'ils arrêtaient toujours ou souvent leur traitement dès que possible, tandis que 54,8% attendaient toujours ou souvent le plus longtemps possible avant de commencer un traitement.Dans l'ensemble, 38,8% des patients ont fait usage de moins de médicaments que ce qui leur avait été prescrit et 54,0% ont interrompu leur traitement pendant un certain temps.Même les personnes qui n'avaient jamais utilisé de CST étaient hésitantes. En effet, «66,6% des patients n'ayant jamais utilisé de CST ont déclaré qu'ils attendraient toujours ou souvent le plus longtemps possible avant de se traiter avec des CST et [plus de] 90% ont déclaré qu'ils arrêteraient toujours ou souvent le traitement par CST dès que possible», écrivent les chercheurs. En ce qui concerne l’adhésion thérapeutique, les résultats de l'étude MARS-5 ne sont pas encourageants. Au total, 359 patients (38,8%) ont déclaré qu'ils prenaient très souvent ou parfois moins de médicaments que ce qui leur avait été prescrit. Lorsqu'on leur a demandé s'ils avaient déjà cessé de prendre leur traitement pendant la période prescrite, 501 (54,0%) patients ont répondu qu'ils le faisaient très souvent (17,0%), souvent (16,5%) ou 20,5% parfois.Même un nombre important de patients souffrant d'une ECM sévère appliquaient souvent moins que ce qui leur avait été prescrit, et certains ont même arrêté leur traitement. Cependant, 71,4% des patients souffrant d'une ECM sévère ont déclaré ne jamais changer de dose, contre 43,6% des patients souffrant d'une ECM légère, souligne l'étude.À lire aussi: Antihypertenseurs: un risque accru de dermatite eczémateuse chez les personnes âgéesIl n'est pas surprenant que les patients qui ont obtenu des scores plus élevés dans TOPICOP aient eu tendance à moins adhérer à leurs traitements de CST. «C'est principalement la peur des CST qui est à l'origine de leur non-adhésion. Ce concept de peur peut être basé sur des informations de faible qualité concernant le risque réel des stéroïdes topiques ou parce que les patients ont eu des expériences négatives avec l'utilisation des stéroïdes», estime l'étude.Bien que l'utilisation prolongée ou excessive des CST puisse induire des problèmes tels que l'altération de la barrière cutanée, ils sont considérés comme sûrs et efficaces tant qu'ils sont utilisés correctement.L'ampleur des craintes observées dans l'étude peut être «le résultat d'une éducation inadéquate et basée sur des idées fausses et des informations erronées». De nombreuses études ont suggéré que les patients peuvent confondre les effets secondaires des CST avec ceux des corticostéroïdes oraux», avance l'article.Les auteurs concluent que «les médecins devraient aborder de manière proactive les craintes ou les préoccupations de leurs patients et les instruire correctement sur l'utilisation et l'application des CST».Le TOPICOP est un score validé qui est apparu pour la première fois en 2013 dans plusieurs revues et qui a été développé par des chercheurs en France. Auparavant, le problème était désigné sous le nom de corticophobie topique, mais les échelles précédentes étaient considérées comme simplistes. Il existe également une version simplifiée du TOPICOP. Le MARS-5 est également une échelle relativement nouvelle.

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