TDAH: la médication réduit le risque suicidaire et criminel

Le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) affecte environ 5% des enfants et persiste souvent à l’âge adulte. Les traitements pharmacologiques, en particulier les stimulants comme le méthylphénidate, constituent la pierre angulaire de la prise en charge. Pourtant, comme le rappellent les auteurs de l’étude, «les bénéfices de ces médicaments au-delà de l’amélioration des symptômes de base du TDAH sont restés peu étudiés dans des contextes cliniques réels». C’est cette lacune que l’équipe du Karolinska Institutet, situé à Stockholm, a voulu combler.Les chercheurs ont analysé les données des registres nationaux suédois entre 2007 et 2020. La cohorte comptait 148 581 patients nouvellement diagnostiqués, âgés de 6 à 64 ans (âge moyen de 17 ans; 41% de femmes). Parmi eux, 57% ont reçu une prescription, majoritairement de méthylphénidate (88,4%). Pour réduire les biais, ils ont utilisé une approche d’«émulation d’essai cible», appliquant la logique des essais randomisés à des données observationnelles. Ils ont également suivi les patients durant deux ans.Les résultats mettent en évidence des associations robustes, lors de la première occurrence d’un événement:comportements suicidaires: réduction de 17% (rapport des risques [ou hazard ratio, HR] 0,83 ; IC à 95% de 0,78 à 0,89);usage de substances: réduction de 15% (HR 0,85 ; IC à 95% de 0,80 à 0,90);accidents de transport: réduction de 12% (HR 0,88; IC à 95% de 0,82 à 0,94);criminalité: réduction de 13% (HR 0,87; IC à 95% de 0,82 à 0,92).En revanche, la différence n’était pas significative pour les traumatismes accidentels non intentionnels (88,5 événements pour 1 000 personnes-années chez les participants traités contre 90 chez les non traités).L’analyse des événements récurrents a renforcé ces résultats: baisse de 15% pour les comportements suicidaires répétés (HR 0,85; IC à 95% de 0,82 à 0,88);de 25% pour l’usage de substances (HR 0,75; IC à 95% de 0,72 à 0,78);,de 16% pour les accidents de transport (HR 0,84; IC à 95% de 0,80 à 0,88);de 25% pour la criminalité (HR 0,75; IC à 95% de 0,72 à 0,78). Les auteurs en concluent que «le traitement médicamenteux du TDAH est associé à des bénéfices plus larges que ceux traditionnellement considérés dans la pratique clinique.»À lire aussi: TDAH: des risques liés à l’utilisation prolongée des médicamentsDes effets bénéfiques à considérer en pratique?Dans leur discussion, ils avancent plusieurs mécanismes explicatifs. Une impulsivité mieux régulée pourrait réduire l’agressivité et les conduites délictueuses. Une attention accrue pourrait limiter les distractions au volant. Ils insistent cependant sur les limites: l’absence de données sur les posologies, les thérapies non pharmacologiques suivies en parallèle ou encore la sévérité du trouble. «Ces associations ne prouvent pas une relation de causalité», précisent-ils, tout en soulignant la cohérence des résultats avec d’autres travaux.Pour le Pr Zheng Chang, auteur principal, cité par la BBC, «nos résultats fournissent une base factuelle solide pour évaluer le rôle des traitements pharmacologiques du TDAH dans la prévention de conséquences graves sur la santé et la société».La prescription de stimulants reste parfois controversée, entre craintes d’effets indésirables et interrogations sur leur usage. Or, l’étude invite à élargir la perspective. Il ne s’agit plus uniquement de soulager des symptômes cognitifs et comportementaux, mais aussi de prévenir des issues sévères comme la tentative de suicide, l’addiction, l’accident ou la délinquance. À lire aussi: 7 mystères autour du TDAHComme le résume un pédopsychiatre cité par The Guardian, le Dr Samuele Cortese, «ces résultats doivent encourager les cliniciens à regarder au-delà de la réduction des symptômes et à intégrer les bénéfices sociétaux dans leurs discussions avec les patients et leurs familles».Référence:Zhang L, Zhu N, Sjölander A, Nourredine M, Li L, Garcia-Argibay M et coll. ADHD drug treatment and risk of suicidal behaviours, substance misuse, accidental injuries, transport accidents, and criminality: emulation of target trials BMJ 2025; 390 :e083658 doi:10.1136/bmj-2024-083658

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