Sept-Îles: Des médecins s'opposent à l’exploitation d’un gisement d’uranium

Une trentaine de médecins de Sept-Îles s’opposent pour des raisons environnementales et de santé publique à l’exploitation d’un gisement d’uranium, un minerai radioactif, situé à proximité de la ville. Ils ont signé une pétition exigeant du gouvernement un moratoire sur l’exploitation de l’uranium sur la Côte-Nord et dans tout le Québec. Plusieurs omnipraticiens et spécialistes menacent de quitter Sept-Îles si la compagnie minière en cause, Terra Ventures, obtient un jour l’autorisation d’exploiter ce gisement.La Dre Isabelle Gingras, une psychiatre originaire de Montréal qui exerce à Sept-Îles depuis 2006, est l’un des trois médecins locaux qui bataillent le plus contre ce projet, avec une collègue en psychiatrie, la Dre Véronique Beaudry, et un pneumologue, le Dr Bruno Imbeault.La Dre Gingras s’est éprise de son coin de nature et de son bord de mer à Sept-Îles, mais elle dit qu’elle partira si jamais le gouvernement donne le feu vert à l’exploitation du gisement.«J’apprécie beaucoup ma qualité de vie à Sept-Îles et ce serait dommage de devoir partir. Mais je le ferai pour ne pas mettre la vie de mes enfants en danger, a-t-elle déclaré. Je ne veux pas qu’ils soient un jour exposés au radon.»Pour l’instant, elle poursuit la bataille et, avec 200 autres citoyens de Sept-Îles inquiets, elle a participé à la fin d’octobre à une troisième manifestation publique dans les rues de la ville. Cette plus récente sortie visait à protester contre l’autorisation qui a été accordée en douce à Terra Ventures de construire un chemin d’accès vers le site d’exploitation.«Pourquoi leur permettre d’aménager une route si on leur interdit un jour d’exploiter le gisement? se demande-t-elle. Mieux vaut tuer le projet dans l’œuf immédiatement.»Pour extraire l’uranium, il faut broyer des tonnes de roches. L’eau utilisée contamine la nappe phréatique. En outre, lors du processus de dégradation, il subsiste plusieurs sous-produits radioactifs qui demeureront dans l’environnement pendant des centaines d’années.Le plus ironique...«Ce que nous, médecins, trouvons ironique, dit-elle, c’est que nous avons reçu une lettre du ministère de la Santé pour sensibiliser nos patients aux effets dommageables du radon, un gaz issu de la dégradation de l’uranium, une cause de cancer du poumon. Or, si le gisement de Sept-Îles est exploité, il y aura augmentation du radon dans notre environnement. D’un côté, le Ministère nous encourage à faire de la prévention et, d’un autre côté, on encourage une industrie qui va produire encore plus de radon. Ce gaz ne restera pas sur place. Il sera poussé par le vent et atteindra nos résidences.»Si des médecins quittent Sept-Îles à cause de cette activité, il sera très difficile de les remplacer, prévient la Dre Gingras, qui craint les répercussions négatives de cette exploitation pour des raisons de santé publique, d’environnement et d’impact sur le tourisme.Certains ont fait valoir aux médecins opposés au projet que cet uranium pourrait éventuellement servir à produire des isotopes utilisés en médecine. Un argument qui n’impressionne pas la Dre Gingras. « Les isotopes représentent moins de 1 % de la production d’uranium. Il pourrait y avoir des projets à faible échelle qui n’auraient pas un impact aussi néfaste sur l’environnement et la santé publique. Je doute aussi que ces minières fassent cette exploitation à Sept-Îles dans un but médical… »Menaces de départLa Dre Gingras affirme que la menace de certains médecins de quitter Sept-Îles si le projet d’exploitation est autorisé doit être prise au sérieux. «On se bat fort pour ne pas que cela survienne, dit-elle. J’aime bien mon petit coin de paradis, et ça me ferait quelque chose de partir, mais je quitterai la région. On a fait des sacrifices sur le plan familial et des amitiés pour venir s’installer ici, mais je ne suis pas prête à sacrifier la santé de mes enfants.»Parmi les 30 médecins signataires de la pétition exigeant un moratoire, la Dre Gingras ne peut dire combien d’entre eux feraient leurs bagages, mais des confrères, déracinés comme elle et qui ont choisi d’exercer à Sept-Îles pour sa qualité de vie, lui ont dit qu’ils en feraient autant. « Même s’il n’y avait que 10 à 15 départs, dit-elle, il pourrait être très difficile de les combler avec de nouveaux venus.»Le départ reste toutefois son dernier recours et, pour l’instant, la Dre Gingras a décidé de rester, de ne pas baisser les bras et de se battre avec ses collègues, les citoyens et les élus qui s’opposent au projet de Terra Ventures.

Sept-Îles: Des médecins s'opposent à l’exploitation d’un gisement d’uranium

Pour accéder au contenu, connectez-vous ou créez un compte gratuit.

Catégories connexes