Report de diplomation pour plus de la moitié des finissants en médecine

Le constat s’impose: plus de la moitié des futurs médecins du Québec ne pourront obtenir leur diplôme à temps. Les doyens et doyennes des quatre facultés de médecine de la province l’ont annoncé lundi dans un communiqué conjoint, avec «un profond regret». Ils soulignent que «ce report aura des répercussions directes sur l’organisation des soins dans les milieux cliniques, dès le 1er juillet 2026, date prévue de l’entrée en fonction des nouveaux médecins résidents et résidentes».Ce report découle de la grève de l’enseignement menée par les médecins spécialistes depuis le 15 septembre, à laquelle se sont joints les médecins de famille le 16 octobre, à l’appel de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ). Ensemble, ces moyens de pression ont entraîné une suspension quasi totale des stages cliniques et perturbé la formation préclinique dans les quatre universités.Depuis cinq semaines, les facultés de médecine se sont efforcées de maintenir, tant bien que mal, une partie de la formation médicale. «Malgré ces efforts, la suspension quasi totale des stages cliniques depuis le 15 septembre limite gravement notre capacité à former adéquatement la relève», soulignent les doyens, qui se disent conscients des impacts pour les étudiants comme pour les patients. Les facultés estiment que les retards accumulés ne pourront être comblés d’ici la fin de l’année universitaire, compromettant à terme la diplomation d’une cohorte d’environ 1000 étudiantes et étudiants.Cette impasse risque aussi d’avoir des effets en cascade: plusieurs finissants pourraient rater leur jumelage au CaRMS. Les doyens lancent donc un appel pressant au gouvernement et aux fédérations médicales afin qu’un règlement intervienne rapidement. «Sans l’engagement des médecins enseignants, il devient impossible de remplir pleinement notre mission», écrivent-ils, rappelant que la formation médicale repose sur une collaboration étroite entre le réseau universitaire et les cliniciens du terrain.«Il est impératif de résoudre rapidement ce conflit afin que nos étudiantes et étudiants puissent reprendre leur formation et que la population québécoise puisse compter sur une relève médicale compétente et disponible.» - les doyens des facultés de médecine du QuébecÀ la Fédération des étudiants en médecine du Québec (FMEQ), l’inquiétude est clairement de mise. «Depuis le début (du conflit), on redoutait des conséquences majeures pour les étudiants. À partir d’aujourd’hui, elles deviennent réalité», déclare en entrevue la vice-présidente de la FMEQ, Félicia Harvey. Selon elle, quelque 500 externes ne pourront pas commencer leur résidence le 1er juillet prochain et «plus les jours avancent, plus ce nombre va augmenter, ce qui va avoir aussi un impact sur les patients.»L’étudiante en 4e année de médecine à l’Université de Montréal indique que ses camarades nourrissent une double crainte: «Est-ce qu’on va être éligibles au jumelage du CaRMS? Et si on est éligibles, est-ce qu’on sera compétitifs par rapport aux autres externes qui auront accompli tous leurs stages cliniques et qui seront disponibles le 1er juillet alors que nous, on risque de l’être au 1er août ou au 1er septembre?» Au-delà, la situation pose des enjeux monétaires et matériels aux étudiants, la plupart ayant des baux de logement se terminant le 30 juin.Retour à la case départMalgré tout, la FMEQ ne jette pas le blâme aux médecins spécialistes ni aux omnipraticiens dont elle partage les revendications concernant le projet de loi 106. «Les fédérations médicales ont peu de moyens de pression», observe Patricia Harvey qui demande au gouvernement de «prendre le leadership pour résoudre ce conflit qui n’a que trop duré. On espérait que le ministre de la Santé allait se montrer flexible. Mais on est très déçu, car après cinq semaines de grève de l’enseignement, il persiste et signe. On est revenu à la case départ», regrette la vice-présidente de la FMEQ.Du côté des fédérations médicales, la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) et la FMOQ maintiennent leur position commune: elles exigent le retrait du projet de loi 106. L’une comme l’autre ont mis fin à leur médiation avec le gouvernement. Cette fin de semaine, la FMSQ a écrit au premier ministre pour lui demander d'intervenir. En vain. Le ministre de la Santé, Christian Dubé, affirme de son côté vouloir «trouver une voie de passage», mais reproche aux fédérations leur refus de revenir aux tables de négociation.Entre-temps, les facultés de médecine se préparent à revoir leurs plans de formation et à multiplier les scénarios pour la reprise des stages. Mais toutes préviennent: même un retour rapide à la normale ne suffira pas à sauver la session en cours.

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