Réorganisation du réseau: «J’espère qu’on fait tout cela pour le mieux, pas pour le pire» - Dr Martin Arata

«J’espère qu’on fait tout cela pour le mieux, pas pour le pire.» Au lendemain du début de la réorganisation qui a mené à la création de 13 Centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS) et neuf Centres intégrés universitaires (CIUSSS), et à la réduction du nombre d’établissements de 182 à 34, le président de l’Association des Conseils des médecins, dentistes et pharmaciens (ACMDP), le Dr Martin Arata, est incapable, comme la plupart des acteurs du système, de prédire si ce vaste remue-ménage aura les impacts positifs souhaités.«On l’espère. Nous, on aurait préféré que l’on change les cultures plutôt que les structures. Pour les CMDP, il est certain que la réorganisation va éloigner le processus décisionnel du milieu», a-t-il commenté lors d’une entrevue à ProfessionSanté.ca.Le nouveau réseau en place depuis quelques jours ne compte plus qu’une trentaine de CMDP. À court terme, les effets sur leur existence sont très concrets. Depuis le 1er avril, ils n’ont plus d’existence légale, à l’exception des CMDP des hôpitaux qui n’ont pas été fusionnés. Toutefois, l’Association a demandé aux établissements dans lesquels ils ont disparu de les maintenir en vie pour la prochaine année afin d’assurer une continuité de leurs services. Mais techniquement, ils n’ont actuellement plus force de loi, de sorte qu’ils ne peuvent plus accorder de privilèges de pratique.Le Dr Arata tient néanmoins à se faire rassurant. «On ne pense pas qu’au cours du prochain mois, des candidats auront besoin de privilèges, mais si la chose survenait, un comité d’examen s’est sans doute déjà penché sur leur dossier. Si ces demandes ont été acceptées par l’ancien CMDP, le PDG du nouvel établissement pourrait entériner la nomination ou la reporter de quelques semaines. Le délai serait donc court, à moins que la direction n’accepte pas le modèle de transition que nous proposons, qu’il élabore ses propres règlements de fonctionnement et qu’il mène tout le processus de mise en place d’un nouveau CMDP, ce qui pourrait prendre six mois.»L'avenir des CMDP Dans le scénario actuellement envisagé par l’Association, les anciens CMDP devraient faire place à des comités locaux qui rempliront une partie des fonctions et des responsabilités des défunts Conseils et s’occuper des dossiers de proximité.Les établissements unifiés compteront pour leur part un CMDP central. Ce palier supérieur sera plus axé vers les grandes orientations du CISSS ou du CIUSSS, afin d'assurer une continuité et un accès dans chacun des points de services. Les comités locaux se rapporteront à ces CMDP.Modèle de transitionEn attendant que cette nouvelle structure soit en place, un modèle de transition, un «gentleman agreement», a été proposé par l’Association afin de permettre que les activités des Conseils se poursuivent sans rupture au cours de la prochaine année. Les CMDP veulent aussi se reconstituer rapidement afin de pouvoir influencer les décisions et les orientations des nouveaux établissements. «Il vaut mieux s’organiser que se faire organiser», préconise le Dr Arata.Effets sur la pratiquePour l’instant, la réorganisation soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses concernant la pratique et, faute de réponses, beaucoup de médecins en milieu hospitalier ont le sentiment d’être dans le noir ou assis entre deux chaises. L’obligation d’aller donner des services sur un site éloigné fait peur à certains.«Demain matin, rien ne va changer, affirme le Dr Arata à ce sujet. À court terme, je ne pense pas que des gens devront aller pratiquer jusqu’à 70 kilomètres de distance pour aller couvrir les ruptures de services. À long terme, les établissements auront à planifier l’offre de services sur l’ensemble de leur territoire. Peut-être que des médecins auront à se déplacer, mais cela va dépendre des situations. Ce n’est pas parce qu’il existe dans la Loi une obligation d’aller dépanner ou aider les collègues à 70 kilomètres que tout le monde sera obligé de le faire. Certains le voient comme une mesure obligatoire, mais ce sera exceptionnel.»Changement à la pratique hospitalièreCe qui pourrait surtout changer davantage après la réorganisation, c’est la pratique hospitalière. Des médecins spécialistes auront à faire de l’hospitalisation et de la prise en charge aux étages.«Ça peut fonctionner dans certaines régions où il y a un grand volume de spécialistes, mais dans les petites régions, si le spécialiste fait de l’hospitalisation, il fera moins de consultations, croit le président de l’Association. Il pourrait donc être moins rapide pour la première ligne d’obtenir des consultations en deuxième ligne.»«Il va falloir faire attention de ne pas déshabiller Pierre pour habiller Paul, prévient le Dr Arata. Dans certains milieux, il sera préférable que les spécialistes fassent moins d’hospitalisations pour assurer les consultations, surtout s’il y a suffisamment d’omnipraticiens pour prendre en charge la clientèle à l’hôpital. Il faudra prendre les décisions pour les patients en termes d’accès aux services, pas pour des considérations de groupes.»

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