Médicaments d'origine: quel est l'impact des cartes de fidélisation?

Les cartes de fidélisation des fabricants de médicaments de marque proposées aux patients ont augmenté les coûts des assureurs privés de 46% et ont eu des répercussions variées sur le montant des paiements assumés par les patients, montre une nouvelle étude parue dans le CMAJ (Canadian Medical Association Journal): «Impact of brand drug discount cards on private insurer, government and patient expenditures».«Pour les régimes privés d'assurance médicaments , ces cartes étaient universellement mauvaises», a déclaré Michael Law, titulaire d'une Chaire de recherche du Canada à l'École de la santé publique et des populations de l'Université de la Colombie-Britannique, à Vancouver. «Sur les 89 cartes différentes que nous avons étudiées, toutes sans exception ont conduit les régimes d’assurance privés à payer plus.»Les fabricants de médicaments d'origine ont introduit différents «programmes d'aide aux patients» ces dernières années afin de conserver leurs parts de marché, de nombreuses versions génériques étant devenues disponibles après l'expiration de leurs brevets. Les cartes de fidélisation offrent aux patients un rabais sur les médicaments d'origine ayant des équivalents génériques afin de les inciter à acheter le médicament de marque.Les chercheurs ont analysé des données provenant de 2,8 millions d'ordonnances de 89 médicaments différents pour lesquels des cartes defidélisation étaient utilisées. Ils ont ensuite comparé les coûts de ces ordonnances à ceux des équivalents génériques appariés.Les cartes de fidélisation ont un très léger impact sur les régimes d'assurance publics, car ces régimes ont des modalités pour inciter les patients à privilégier les équivalents génériques. Dans le cas des régimes privés, le coût s'est révélé systématiquement plus élevé pour les 89 médicaments.Ainsi, pour les 15 médicaments les plus prescrits, les assureurs privés ont payé entre 2,90 $ et 46,91 $ de plus par ordonnance de médicament de marque par rapport à une ordonnance de médicament générique.«Seulement environ la moitié des régimes privés d'assurance médicaments au Canada ont des règles stipulant qu'ils ne paieront que le montant du générique équivalent, lorsqu'un générique est disponible», écrivent les auteurs. «Notre étude fournit des preuves empiriques que les cartes de fidélisation des médicaments de marque représentent un moyen pour les compagnies pharmaceutiques de tirer parti de cette [situation] en rendant le montant du paiement de l'assuré presque équivalent, afin de ne pas les dissuader de choisir des médicaments de marque.»«Étant donné que notre analyse a montré de fortes augmentations pour les régimes privés, les employeurs pourraient envisager d'adopter des politiques de substitution des génériques plus strictes afin d'optimiser les dépenses en médicaments», écrivent les auteurs.L'impact sur les paiements directs des patients variait beaucoup au sein de l'étude. Alors que ceux qui avaient une assurance privée ou aucune assurance économisaient respectivement 0,12 et 3,49 dollars en moyenne par ordonnance, ceux qui bénéficiaient d'un régime public d'assurance-médicaments payaient 1,86 dollar de plus. Les écarts de montants étaient toutefois considérables, allant d’une économie de 13,44 dollars à une augmentation de 11,71 dollars pour les cartes les plus populaires.«Les patients doivent être vigilants, estime Michael Law. Les gens peuvent penser qu'ils vont payer moins, mais ils finissent souvent par payer plus. C’est une boîte à surprise en termes d’avantages pour les patients.»Les auteurs concluent que «indépendamment du fait de posséder ou non une assurance, les patients devraient comparer les prix offerts à leur pharmacie entre le médicament de marque avec une carte de réduction et le générique équivalent, car la première option ne s'avère pas toujours la plus économique pour eux.»Dans un commentaire sur l'étude, Marc-André Gagnon, professeur de politique publique à l’Université Carleton, écrit: «(Les cartes de fidélisation) peuvent inciter les professionnels de la santé à promouvoir le message que les produits de marque sont mieux (quand ils se conforment à la demande de leurs patients de spécifier «pas de substitution» sur les prescriptions). Elles risquent également d'augmenter les coûts pour les patients (en augmentant leurs primes d'assurance) et peuvent même les inciter à faire pression en faveur des médicaments de marque par le biais d'un mécanisme que beaucoup pourraient considérer comme étant à la limite de la corruption institutionnalisée.»Ces cartes «permettent également potentiellement le transfert d’informations cliniques confidentielles sur les patients à des sociétés pharmaceutiques», ajoute-t-il, ce qui suscite de grandes préoccupations.

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