Prime abolie en gériatrie: «On ne mérite pas d'être pénalisés plus qu'une autre spécialité»

L’Association des médecins gériatres du Québec, dont les quelque 100 membres ont vu la prime pour soigner des patients de 85 ans et plus être abolie en janvier, ne ferme pas complètement la porte à un recours judiciaire contre la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) si des primes d’autres spécialités médicales ne sont pas abolies.«Au moment où l’on se parle, je ne crois pas [aller de l’avant avec ce recours]. Mais je veux être certain que les autres spécialités vont écoper. Si on pénalisait presque uniquement ma spécialité, je ne pourrais pas accepter ça. Il faut que ce soit équitable. Je ne veux pas être le dindon de la farce», explique le président de l’Association des médecins gériatres du Québec, le Dr Serge Brazeau.Celui-ci déplore que sa spécialité soit parmi les premières à subir une décision de l’Institut de la pertinence des actes médicaux (IPAM). (Voir encadré)La décision d'abolir la prime pour traiter les patients de 85 ans et plus est effective depuis le 18 janvier dernier. Depuis, l’IPAM a également aboli les primes d'assiduité versées aux chirurgiens et aux anesthésiologistes s’ils arrivaient avant 8 heures. L’Association des anesthésiologistes du Québec a déposé un recours judiciaire à la Cour supérieure du Québec contre la FMSQ, la semaine dernière.«On ne mérite pas d’être pénalisés plus qu’une autre spécialité», croit le Dr Brazeau. D’autant plus que les gériatres facturent très peu d’actes et que leur rémunération est un peu en dessous de la moyenne des revenus des médecins spécialistes, selon lui. En 2018-2019, le revenu brut moyen des gériatres était de 476 475 $ comparativement à 501 956 $ pour l'ensemble des médecins spécialistes, selon les données de la Régie de l'assurance maladie du Québec.À terme, l'abolition de la prime pourrait réduire la rémunération des gériatres de 5 %, estime le Dr Brazeau.Changer la facturationCelui-ci critique par ailleurs la façon dont l’abolition de la prime a été décidée. «Ça s’est fait de façon abrupte. Nous n’avons pas été consultés et nous avons appris assez tardivement cette abolition.»Selon lui, cette prime n’aurait jamais existé si le gouvernement avait accepté de négocier un changement dans la facturation des actes dans les dernières années. Il précise qu'il n’était d'ailleurs pas très enthousiaste à l’idée de cette «prime», qui a d'ailleurs fait polémique après la publication d’un article dans le Journal de Montréal, il y a trois ans. «Je comprends que nous avons l’air bête, les gériatres, de charger des suppléments pour les plus âgés. Si nous avions eu des tarifs plus élevés, il n’y aurait pas eu de prime.»Le Dr Serge Brazeau dit réclamer depuis quatre ans une meilleure rémunération pour les actes médicaux sur les personnes de 85 ans et plus, davantage susceptibles d'avoir des polypathologies et à utiliser plusieurs médicaments.«Nous voulons que le travail plus intensif, plus compliqué, soit mieux rémunéré que le travail simple. Il faut trouver une façon de récompenser ceux qui travaillent auprès des plus malades», revendique le Dr Brazeau.Selon lui, cela est d’autant plus important qu’il y a seulement 100 gériatres pour 1,5 million de personnes âgées. Il est donc primordial que ces médecins spécialistes se concentrent sur les personnes les plus malades.À lire aussi: L'Institut de la pertinence atteindra-t-il sa cible de 70 M$ d'économie ? *Qu'est-ce que l'IPAM ?Né d'une entente en décembre 2019 entre la FMSQ et le Conseil du trésor du gouvernement du Québec, l’Institut de la pertinence des actes médicaux est chargé de cibler des actes médicaux jugés inappropriés, utilisés à des fréquences excessives ou non conformes aux bonnes pratiques, le tout dans un objectif de réduction budgétaire. Cette organisation compte cinq représentants désignés par le gouvernement et cinq personnes désignées par la FMSQ. En 2020-2021, il vise 70M$ des économies dans le système de santé d'ici le 31 mars prochain. Jusqu'à présent, les mesures de l'IPAM ont permis des économies de 44 M$, dont 40 M$ grâce à l'abolition des primes, rapportait ProfessionSanté.ca en janvier dernier.

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