Poursuite contre la FMSQ: l’ex-directeur des Affaires juridiques disposé à régler hors cour

Me Sylvain BellavanceMe Sylvain Bellavance, l’ancien directeur des Affaires juridiques et de la négociation à la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) qui poursuit son ex-employeur pour une somme de 1 528 000$, souhaite toujours réintégrer l’emploi qu’il a occupé durant 25 ans, sinon il serait disposé à régler le litige hors cour. En l’absence d’entente entre les deux parties, la poursuite qu’il a déposée en Cour supérieure le 9 octobre suivra son cours, mais il pourrait s’écouler un an avant qu’elle ne soit entendue par un juge.Me Bellavance affirme qu’il jouissait d’un contrat de travail à durée indéterminée à la FMSQ et qu’il a fait l’objet d’un congédiement sans cause ou sans motifs sérieux. La Fédération juge au contraire que son contrat était à durée déterminée. Elle a donc refusé de lui verser une indemnité quand elle l’a avisé dans une lettre datée du 5 juillet 2019 qu’elle mettait un terme à son contrat le 31 juillet, alors qu’il s’apprêtait à reprendre ses fonctions. Son médecin de famille l’avait placé en arrêt de travail temporaire pour des raisons de santé, le 14 mars 2019.Incapable, depuis son départ forcé, de s’entendre avec son ancien employeur, l’ex-directeur des Affaires juridiques lui réclame plus d’un million et demi de dollars pour son congédiement. Il exige aussi des dommages moraux et punitifs, plus particulièrement en raison des comportements «abusifs» à son endroit de la part de la présidente, la Dre Francoeur, et des refus du conseil d’administration de les faire cesser. Le montant de 1,5M$ comporte également une compensation à titre de dommages moraux pour la sauvegarde «de sa dignité, de son honneur et de sa réputation».Aucune des allégations inscrites dans le document de la poursuite n'a encore subi l'examen de la Cour ni été prouvée. La FMSQ a préféré ne pas répondre à notre invitation à réagir à cet article compte tenu du processus judiciaire en cours, et nous a plutôt référés au communiqué de presse émis après le dépôt de la poursuite : «Nous analysons présentement tous les enjeux légaux relatifs à ce litige qui suivra son cours devant le tribunal. La FMSQ est contre toute forme de harcèlement ou de violence physique ou verbale. Depuis 2005, nous avons d'ailleurs une politique pour prévenir et contrer le harcèlement. Celle-ci est mise à jour fréquemment.»Plutôt que de s’embarquer dans une guérilla juridique qui pourrait s’avérer longue et coûteuse, Me Bellavance préférerait toutefois parvenir à un règlement avec la FMSQ.«Mon client a toujours été en faveur d’utiliser les mécanismes de prévention et de règlement des différends pour résoudre le litige entre les parties, mais la FMSQ a refusé deux fois la médiation offerte par la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), une fois en octobre 2019 et une fois en janvier 2020», a indiqué son avocat, Me Stéphane Fiset, dans un courriel transmis à ProfessionSanté.ca. La FMSQ prétend plutôt qu’il s’agit «du quatrième d’une série de recours déposé par Me Bellavance devant les tribunaux» à son encontre.Le montant réclamé, en détailMe Bellavance touchait un salaire annuel de 492 000 $ à la FMSQ en plus de généreux avantages sociaux, notamment au chapitre des vacances. Le montant de 1 528 000 $ qu’il réclame se décompose comme suit :Indemnité de 24 mois (salaire de base qu’il aurait touché en 2 ans) : 984 000 $Vacances (7 semaines par an): 140 000 $Perte de salaire pendant l’arrêt de travail : 184 000 $Perte de rémunération d’administrateur : 20 000 $Dommages moraux : 100 000 $Dommages punitifs : 100 000 $«Pitch and Bitch» à la FMSQLe document d’une soixante de pages de la poursuite déposée en Cour supérieure par Me Stéphane Fiset au nom de son client fait état du climat de travail à la FMSQ sous la direction de son actuelle présidente, tel que perçu par Me Sylvain Bellavance. Il y décrit du harcèlement, des comportements abusifs, la propension de la présidente de l'organisation syndicale, la Dre Diane Francoeur, à blâmer les autres et un leadership toxique.Son attitude, affirme l’avocat, a entraîné le départ de nombreuses personnes. Au moment du dépôt du recours, seulement 33 % du personnel qui était en poste à l’arrivée de la Dre Francoeur y travaillait encore, prétend la poursuite.Toujours dans le document de la poursuite, Me Bellavance allègue que la présidente avait exprimé le souhait d’agir de façon plus qu'inappropriée avec certaines personnes, voire «d’avoir leur tête». Cette attitude s’exprimerait autant à l’intention de membres internes de l’organisation que de gens de l’extérieur.Notamment, dans le document public déposé en Cour, l’avocat affirme qu’en 2015, quand l’ex-directrice des Affaires économiques, la Dre Michèle Drouin, a souhaité passer à la direction des Affaires professionnelles, dont le poste était vacant, la Dre Francoeur aurait indiqué : «Si elle pense qu’elle va aller se tourner les pouces aux Affaires professionnelles, elle se trompe, car j’ai bien l’intention de le faire souffrir.»Au début du mandat de la Dre Francoeur, il aurait été convenu d’améliorer la gestion de l’organisation et de faciliter l’accès à la présidente en reprenant les rencontres du comité des directeurs. Selon Me Bellavance, ces réunions devinrent plutôt un forum pour remettre en question leur travail, leur attribuer des blâmes, imposer un plus grand contrôle de leurs activités et noyer le directeur concerné sous de nouvelles tâches «souvent inutiles». La tournure qu’avaient pris ces rencontres en avait amené certains à les rebaptiser «Pitch and Bitch», soit «Pitch» pour qualifier l’exercice de leur lancer de nouvelles tâches et «Bitch» pour traduire le dénigrement mené par la présidente envers d’autres directeurs ou employés.Une firme-conseil en psychologie organisationnelle aurait été recrutée afin d’améliorer le climat de travail, mais selon l’avocat, il serait apparu dans le rapport que certaines mentions visaient davantage à protéger l’image de sa présidente qu’à corriger ses écarts.Nombreux postes vacants à la FMSQLe climat de travail qui régnait à l’interne a entraîné de nombreux départs, outre celui de Me Bellavance. La Dre Michèle Drouin a été mise en arrêt de travail temporaire par son médecin en novembre 2017. Elle a quitté depuis. En décembre 2017, la directrice des Finances et des Services administratifs a également été mise en arrêt de travail temporaire par son médecin. L’ancien directeur des Affaires économiques, le Dr Jacques Ouellet, a remis sa démission en décembre 2017.Depuis, plusieurs nouvelles têtes sont apparues dans l’organigramme de la FMSQ, qui compte une cinquantaine d’employés. Me Bellavance a été remplacé à la direction des Affaires juridiques et de la négociation par une autre avocate, Me Marie-Josée Crête, et la Dre Isabelle Girard a succédé au Dr Ouellet à la direction des Affaires économiques. Les Affaires professionnelles relèvent du Dr Jean-Denis Roy, et le Développement professionnel continu, du Dr Sam. J. Daniel.Quelques postes de direction sont toutefois vacants. Selon l’organigramme du syndicat en date du 20 octobre 2020, le directeur des Affaires publiques et communications, Jacques Tétrault, passé au Collège des médecins du Québec après un séjour de moins de deux ans à la FMSQ, n’a pas encore été remplacé. La chaise de directeur des Finances et des services administratifs est également libre, tout comme celle du directeur des ressources humaines. Marie-Claude Beaudet s’est vu confier par intérim la Direction des opérations, un poste qui a été créé en raison des défis causés par la pandémie et pour améliorer la rapidité dans la prise de décisions au sein de l’organisation.

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