Positionnez-vous bien le bras d'un patient lors d'une prise de tension?

Éviter la caféine, être assis bien droit, le bras soutenu et avoir la vessie vide: ce ne sont que quelques exemples qui permettent une bonne lecture de la tension artérielle d’un individu. Les données obtenues sont souvent essentielles pour un juste diagnostic de problèmes liés à la tension, comme l’hypertension artérielle, et au traitement qui s’ensuit.«L’hypertension, c’est un problème de santé très prévalent, explique Jean Lefebvre, pharmacien et professeur titulaire à la Faculté de pharmacie de l’Université de Laval, où il se concentre entres autres sur les soins pharmaceutiques cardiovasculaires et sur l’hypertension artérielle. Et puis une des façons pour juguler ça, c’est de bien mesurer la tension.»La tension d’un individu varie en effet beaucoup selon un large éventail de facteurs endogènes et exogènes, et donc obtenir une mesure exacte de la pression artérielle est le premier pas vers un traitement adéquat, poursuit-il.Une récente étude publiée dans le JAMA Internal Medecine confirme l’importance de la simple position du bras lors d’une prise de tension artérielle. Malgré les lignes directrices déjà existantes concernant la position du corps du patient pour une juste lecture de sa tension, commes celles d'Hypertension Canada, les chercheurs de l’étude indiquent qu’elles ne sont pas toujours bien suivies. Jean Lefebvre constate lui aussi que le rythme rapide des cliniques mène parfois à de mauvaises mesures de la tension artérielle des patients. Bien que ces variations puissent sembler mineures à un niveau individuel, ces variations se traduisent par un nombre de complication significatives lorsqu’elles sont examinées à un niveau populationnel.L’équipe de chercheurs derrière l’étude a effectué un essai croisé clinique randomisé où ont participé 133 adultes âgés de 18 à 80 ans et où 53% étaient des femmes et 47% des hommes. Parmi les participants, 41% avaient un indice de masse corporelle (IMC) de 30 ou plus et 82% ont déclaré avoir fait usage d’un service de santé dans la dernière année.Les participants ont été répartis en trois groupes, chacun mesurant la tension artérielle alors que le participant avait le bras supporté à divers niveaux ou sans aucun support. Le premier groupe de participants ont vu leur tension artérielle mesurée alors que leur bras était supporté sur un bureau, tandis les membres du deuxième groupe ont reposé leur main sur leur cuisse comme seul support. Le troisième groupe n’avait aucun support. Peu importe le groupe du participant, le brassard était placé à la mi-bras, au niveau du cœur.À lire aussi: Pression artérielle: tous les tensiomètres domestiques ne se valent pasAfin de tenir compte des variances intrinsèques de la tension artérielle des participants, une mesure supplémentaire a été prise. À ce moment, les participants étaient assis avec leur bras supporté sur un bureau, comme ceux du premier groupe. Les résultats parlent d’eux-mêmes, selon les chercheurs: la pression artérielle du groupe ayant reposé leur bras sur un bureau était significativement moindre que celle des deux autres groupes. Le groupe avec le bras ballant, sans soutien aucun, avait une tension artérielle moyenne de 7 mm Hg de plus que celle du premier groupe, alors que le groupe avec la main reposée sur la cuisse avait une tension moyenne supérieure au premier groupe de 4 mm Hg. «Dans l'une ou l'autre des positions [des deuxièmes et troisièmes groupes], les valeurs de la tension artérielle étaient suffisamment élevées pour craindre un surdiagnostic et un surtraitement [d’hypertension]», écrivent les auteurs de l’étude.Ces valeurs sont exacerbées chez les participants à plus haut risque, indiquent-ils. De fait, la pression artérielle systémique des participants du deuxième groupe (avec la main reposée sur leur cuisse) faisant déjà de l’hypertension était plus élevée de 9 mm Hg. «Ce n’est pas banal comme différence parce que ça se répercute sur les complications, remarque le professeur Lefebvre. C’est important pour nos patients.» Et le nombre de patients est à la hausse. Au Québec, une personne sur quatre de 20 ans et plus fait de l’hypertension et plus de la moitié de ces personnes sont âgés de plus de 65 ans, indique l’Institut national de santé publique du Québec.De nombreux mécanismes physiologiques exercent une influence sur les valeurs obtenues à la suite d'une prise de tension artérielle, tels que la distance entre le cœur et l’endroit où le brassard est posé sur le bras, et le volume de retour veineux lorsque le bras est laissé ballant. De plus, un manque de soutien du bras peu mener à la contraction des muscles de celui-ci pour compenser ce manque de soutien, ce qui peut mener à une hausse de pression. «Compte tenu de la diversité des pratiques de soins de santé, des normes d'équipement et des niveaux de formation dans les différents pays, la probabilité d'un diagnostic erroné pourrait être encore plus grande», concluent les chercheurs. Suivre les lignes directrices pour une mesure exacte de la pression artérielle permet surtout que les valeurs obtenues puissent être reproduites d’un clinicien à un autre. Tous les professionnels de la santé ont un rôle important à jouer dans la trajectoire du patient, souligne le professeur Lefebvre, et la mesure de la tension artérielle d’un patient est une donnée importante dans les traitements qui s’ensuivent. «Tout ce qui mérite d’être fait mérite d’être bien fait.»

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