Perte du statut de traumatologie primaire: l’Hôpital de Baie-Saint-Paul demande un moratoire

Les 23 médecins de l’Hôpital de Baie-Saint-Paul ont tenu un point de presse le 13 mars pour demander au ministre de la Santé et des Services sociaux, Yves Bolduc, un moratoire sur sa décision de retirer la traumatologie primaire de leur établissement.Cette mesure du ministère – qui sera imposée dès ce printemps – fera en sorte que les victimes de traumatismes majeurs dans Charlevoix-Ouest seront alors transportées à Québec, soit à l’Hôpital Enfant-Jésus.Les médecins veulent recevoir les données scientifiques sur lesquelles se fonde cette mesure pour mieux les analyser. Ils ont d’ailleurs fait une revue de littérature sur le sujet et n’ont rien trouvé de spécifique.« Au contraire, les conclusions d’une douzaine d’études n’allaient pas du tout dans le même sens que les affirmations du ministère. Alors, on a eu des doutes sur l’application de cette reconfiguration de la traumatologie qui ne concerne pour le moment que notre région. Pour la sécurité de notre population, jamais on n’acceptera d’associer nos noms ou de nous faire imposer des pratiques qui ne sont pas soutenues par des données scientifiques et des statistiques solides et valables », a mentionné à Profession Santé la Dre Chantal Simard, présidente du Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens de l’hôpital.Les médecins ne comprennent pas l’urgence d’appliquer cette mesure sans avoir de preuve à l’appui. La Dre Simard a rappelé que le Dr Richard Fleet commence une étude sur les unités d’urgence rurales.« L’hôpital de Baie-Saint-Paul figure parmi les 40 institutions qui seront scrutées à la loupe dans cette étude. On demande au ministère d’attendre les conclusions de cette étude avant d’aller de l’avant avec cette réorganisation de la traumatologie. »Une série d’inconvénients Si le ministre Bolduc continue de maintenir sa décision, les médecins craignent que cette mesure entraîne une augmentation de la mortalité et provoque une série de démissions du personnel médical.Déjà, un des leurs a remis sa démission de l’urgence après avoir reçu la lettre de refus du ministre Bolduc à la mi-février. Les médecins s’attendent à d’autres défections si la décision est maintenue, car les médecins trouvent très insécurisant de perdre la traumatologie primaire pour leur pratique.« Sur le plan du recrutement, il sera moins intéressant pour les médecins de venir pratiquer chez nous à l’urgence et on peut perdre les acquis qu’on a, comme l’anesthésie de garde et la chirurgie. Pourtant, le ministre nous a promis deux hôpitaux avec des salles d’opération et une urgence 24 heures sur 24 avec la restructuration. S’il nous enlève la traumatologie primaire, on pourrait devenir uniquement un centre de stabilisation et perdre l’anesthésiste de garde », a indiqué la présidente du CMDP.La formation des ambulanciers les inquiète aussi. « Il n’y a pas eu de formations supplémentaires et même le chef responsable des ambulanciers de la région de Charlevoix a mentionné à un des médias régionaux qu’il n’était pas prêt à appliquer cette mesure, souligne la Dre Simard. Il y a plusieurs zones grises qui n’ont pas encore été éclaircies par le ministère, dont les découvertures d’ambulances sur notre territoire. »Les médecins et la Coalition pour la survie de l’hôpital de Baie-Saint-Paul comptent donc multiplier les moyens de pression pour faire valoir leur point de vue sur la situation. C’est pourquoi ils vont rencontrer leur députée, Pauline Marois, le 20 mars prochain pour la sensibiliser à la sécurité de leur population et lui expliquer les raisons qui les poussent à demander un moratoire pour mieux étudier la question.Une autre rencontre est aussi prévue le 30 avril prochain avec la direction de l’Agence et le Ministère pour discuter des motifs cliniques de cette recommandation du Groupe-conseil en traumatologie de l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) et du plan de réorganisation de la traumatologie dans la région de Charlevoix.« Nous voulons avoir les documents avant la rencontre pour pouvoir les analyser adéquatement. Pour eux, cette rencontre vise surtout à expliquer la mise en application du nouveau plan de traumatologie. Mais, si on n’est pas convaincu par la documentation qu’ils vont nous donner, la rencontre sera très courte », dit la Dre Chantal Simard.

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