Outaouais: une situation toujours précaire dans les hôpitaux

«On a vraiment touché le fond du baril», affirme le président de l’Association des médecins omnipraticiens de l’Ouest du Québec (AMOOQ), le Dr Guillaume Charbonneau. La pénurie chronique d’employés dans le milieu de la santé de l’Outaouais persiste, résultant à un système de santé fragilisé et potentiellement non sécuritaire pour les patients, estime de son côté le Dr Marcel Guilbault, chef du Département régional de médecine générale (DRMG) du Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais (CISSSO).La concurrence ontarienne«Le problème de fond, ce sont les salaires et la compétitivité [de l’Ontario], explique le Dr Charbonneau. On espère qu’il y aura des solutions pour régler le problème à long terme parce que les gens de l’Outaouais ont droit aux mêmes standards de service que ceux du reste du Québec.»Les primes récemment offertes par le gouvernement québécois pour les technologues de la région ne peuvent faire concurrence aux opportunités promises par les centres hospitaliers de l’Ontario, enchaîne le Dr Guilbault.«Est-ce que ça va faire revenir ceux qui sont partis? Non», remarque-t-il. Les primes étant octroyées pour une durée définie de court terme, il ajoute que ces primes n'équivalent pas une augmentation de salaire. De plus, les employés ne peuvent bénéficier des avantages sociaux rattachés à un salaire plus élevé. «Il faut des solutions pérennes.»«On a besoin de salaires compétitifs pour être capable de faire en sorte que les gens planifient leur vie dans l’Outaouais et non en fonction d’une prime de six mois sans savoir ce qui va venir par après», affirme pour sa part le président de l’AMOOQ.À lire aussi: Outaouais: le réseau de la santé au bord de l’apoplexieLe manque de soignants exacerbe davantage les ressources de santé en Outaouais. Travailler dans un environnement en sous-effectif est nocif pour les employés – ceux qui optent de rester en Outaouais se retrouvent dans des équipes de plus en plus petites, avec une charge de travail de plus en plus grande.«Par exemple, à [l’hôpital] de Maniwaki, nous sommes censé avoir sept technologues en radiologie et il y en a présentement trois, relate le Dr Charbonneau. Ces gens-là doivent couvrir les services 365 jours par année dans un centre de traumatologie primaire.»L’effet boule de neige engendré détériore la qualité de travail et de vie des professionnels soignants. L’opportunité d’exercer dans une autre région, au privé ou en Ontario, avec des conditions de travail saines, brille donc avec une nouvelle ardeur. Ce fut le cas de la chirurgienne générale de l’hôpital de Gatineau qui a dû quitter l’Outaouais pour une autre région au Québec, puisque les ressources lui permettant d’exercer étaient insuffisantes. Sans le soutien continu des technologues, infirmiers, commis et autres soignants essentiels au bon roulement du bloc opératoire, les salles d’opérations ont dû fermer leurs portes. Après un certain temps, elle n’opérait plus qu’une fois par mois, raconte le Dr Guilbault. «C’est un cercle vicieux», résume sobrement le Dr Charbonneau.La lumière au bout du tunnelBien que la situation à court terme paraît sombre, le Campus Outaouais de l’Université McGill et le futur hôpital de Gatineau ravivent l’espoir que les choses s’amélioreront à moyen et long termes.La proximité du campus offre la chance à ceux «qui n’auraient même pas pensé à appliquer en médecine, faute de vouloir se délocaliser» d’y appliquer, souligne le Dr Charbonneau. «C’est aussi un attrait pour les médecins qui recherchent une carrière académique», ajoute-t-il.L’arrivée de ce campus est une partie de la solution à la pénurie de professionnels de la santé en Outaouais, croit aussi le Dr Guilbault, comme l’a été l’arrivée du campus de l’Université de Montréal à Trois-Rivières en 2004. Résultat: la Mauricie a réussi à combler le manque de médecins puisque le quart des diplômés ont choisi de pratiquer dans cette même région.L’annonce de la sélection du site pour le futur hôpital apporte aussi une certaine assurance aux Dr Charbonneau et Guilbault, car les travaux devront bientôt se mettre en marche. Un nouvel hôpital moderne devrait attirer et retenir les professionnels de la santé à exercer dans la région, espèrent-ils.

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