Ordonnances collectives: leur succès dépend de la capacité des professionnels à travailler en équipe

Que faire pour développer des ordonnances collectives et s’assurer de leur succès dans la communauté? La question était récemment soulevée par le groupe Espace Santé qui avait invité, en avril dernier, deux intervenantes du milieu de la santé pour y répondre.Avec l’adoption de la loi 90, l’expertise des infirmières et leur place centrale dans les soins de santé ont été reconnues. Leur rôle majeur dans l’évaluation, la surveillance clinique et le suivi des clientèles leur confère désormais de nouvelles responsabilités qui permettent de libérer du temps aux médecins, notamment grâce au développement des ordonnances collectives.C’est un excellent outil, mais il est encore sous-utilisé, constate la Dre Raymonde Vaillancourt, chef du Département régional de médecine générale de Sherbrooke et médecin de famille au GMF de Vimy.« On constate encore certaines difficultés à appliquer les ordonnances collectives au niveau local. Il y a une leçon d’humilité à en tirer. Nous devons travailler ensemble et trouver une façon de collaborer pour que leur mise en place soit efficace. »Selon Hélène Racine, directrice des soins infirmiers à l’Hôpital Douglas et présidente de la Commission infirmière régionale de Montréal, plusieurs rapports ont été émis au sujet des conditions gagnantes à réunir.« Il est tout d’abord nécessaire d’avoir un mécanisme commun et efficace d’élaboration, de validation et d’approbation des ordonnances collectives », mentionne Hélène Racine.Pour ce faire, elle recommande de nommer une personne responsable de l’ordonnance collective qui veillera à soutenir les équipes dans son élaboration.« C’est souvent le chef de département de médecine, mais cela peut aussi être le directeur du GMF au niveau médical », précise-t-elle.Reconnaître les compétences de l'autreLa reconnaissance des compétences respectives est aussi un élément essentiel dans l’élaboration et l’application des ordonnances collectives.« Cela exige une capacité à travailler en équipe, souligne Hélène Racine. Il faut que les gens soient conscients qu’ils ont à apprendre les uns des autres. »En Estrie, un bel exemple de collaboration a été développé pour l’élaboration d’ordonnances collectives régionales.« Le président de la Table des DRMG a un siège à la Table des pharmaciens vice-versa, explique la Dre Vaillancourt. Par ailleurs, nous avons décidé – étant donné que nous n’avons pas encore le DSQ – d’étendre notre collaboration pour réduire les difficultés administratives. Ainsi, nous recevons le profil complet de la médication chaque fois qu’il y a un renouvellement. »Partager une visionLe succès des ordonnances collectives nécessite également une vision partagée de la prise en charge et du suivi de la clientèle.« Si nous partageons la même vision de ce qu’il faut faire pour traiter un patient avec une maladie chronique, cela devient beaucoup plus facile, explique Hélène Racine. On peut ensuite se partager le travail à travers l’ordonnance collective. »Le mécanisme de diffusion de l’ordonnance collective est également garant de son succès. « Il faut que les ordonnances collectives soient accessibles aux infirmières, souligne Hélène Racine, surtout lorsqu’elles en visent 300! »En Estrie, un projet régional de rédaction, d’adoption et de diffusion des ordonnances collectives a récemment été mis en place et devrait permettre de simplifier les enjeux liés à la coordination et à l’information.« Les ordonnances collectives seront diffusées sur le site Internet de l’Agence, explique la Dre Vaillancourt. Nous saurons exactement quelle ordonnance est en cours d’élaboration et quelle ordonnance a été adoptée ou mise à jour. »Avec les ordonnances collectives, les responsabilités liées à l’application et au suivi des patients sont partagées.« Il faut que les gens s’entendent sur leurs responsabilités respectives, souligne Hélène Racine. Chacun a les siennes. Le médecin a la responsabilité du contenu scientifique, de bien identifier les clientèles visées par l’ordonnance collective, d’intervenir en cas de complication et de faire le suivi de la clientèle, au besoin. Les infirmières doivent posséder les connaissances scientifiques et les compétences requises, évaluer l’état de santé de la personne avant d’appliquer l’ordonnance collective, connaître les risques inhérents et se référer au médecin au besoin. »Vers une efficacité prouvéeAu GMF de Vimy, à Sherbrooke, l’équipe en place a développé plusieurs ordonnances collectives qui permettent aux médecins de voir environ 150 nouveaux patients par année.« Nos trois infirmières font, par exemple, les premières visites de grossesse, explique la Dre Vaillancourt. Cette première visite demande du temps pour parler de tous les tests de dépistage et prescrire tous les tests de laboratoire. Désormais, quand nous voyons la patiente, à 12 semaines, tout est fait et nous pouvons suivre deux fois plus de grossesses. »Selon la Dre Vaillancourt, le système de santé peut réaliser des économies en développant des ordonnances collectives. « L’économie constatée à la suite de l’application d’ordonnances collectives pour le diabète ou l’hypertension n’est pas seulement une économie de ressources, mais également une économie financière! » conclut-elle.

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