Opinion: Le besoin urgent d’un modèle de rémunération hors distribution

Je voulais vous parler d'une publication que j'ai vue récemment sur le groupe Facebook Community Pharmacy Network et qui m'a beaucoup marquée. Il s'agissait d'un pharmacien dont un patient était venu demander des conseils à propos d’un médicament qu'il avait reçu dans une autre pharmacie. L’endroit où le patient s’était procuré son médicament n’était pas clair – par correspondance ou dans un autre établissement – , mais toujours est-il qu’il s’est présenté à sa pharmacie habituelle pour trouver de l’aide. Pour avoir des conseils. Pour qu’on lui montre comment utiliser le dispositif médical. Pour que le pharmacien intervienne. Je ne sais pas précisément comment cette situation particulière s’est résolue, mais ce genre de dilemme se produit de plus en plus souvent. Les conseils sont prévus dans les standards de pratique de l'Alliance nationale des organismes de réglementation de la pharmacie (ANORP). On pourrait s’attendre à ce que les frais d'exécution d'ordonnance couvrent cette intervention. Dans des provinces comme l'Ontario, les frais d'exécution d'ordonnance financés par la province sont honteux – des pourcentages à deux chiffres inférieurs à ceux des autres provinces –, mais ils devraient tout de même rémunérer ces soins.À lire aussi: Au-delà des chiffres: le cœur de la pharmacieIl y a eu une discussion intéressante dans les commentaires du groupe Facebook. Certains ont dit que nous ne devrions pas du tout conseiller les patients dans une telle situation, car cela engage notre responsabilité légale. D'autres ont soulevé la question opposée: que se passe-t-il si nous ne conseillons pas? Quel est alors notre risque juridique?Si un patient demande des informations et ne les reçoit pas, et que quelque chose tourne mal, à qui incombe la responsabilité? Il est très facile de pointer du doigt la pharmacie d'origine, et je pense que c'est un vrai problème qu'il faut régler. Mais nous devons aussi réfléchir à ce qui se passe lorsque nous sommes face au patient et que nous refusons. Quelle est alors notre obligation?Cette situation met en lumière les failles du système de rémunération en pharmacie. La plupart de notre travail n'est pas rémunéré. Ou, s'il l'est, il est intégré à un autre élément, comme les honoraires d'ordonnance. Ainsi, lorsque nous commençons à refuser quelque chose, qu'il s'agisse de conseiller sur une ordonnance non délivrée ou de prolonger une ordonnance pour un patient que nous n'avons jamais vu auparavant, ce refus est peut-être légalement autorisé, mais est-ce préjudiciable?Ne manquez pas: Ça sert à ça, un pharmacien!Il faut également se demander si ce refus est sans danger pour le patient.Autre point à considérer: pourrions-nous facturer au patient ces soins non pris en charge? Et s’il ne peut pas payer? Devons-nous alors refuser? C’est un terrain fertile en écueils que je ne suis pas certain que nous soyons prêts à affronter.En réalité, cette situation ne fera que se multiplier. Avec l’essor des pharmacies par correspondance et des réseaux de fournisseurs privilégiés (preferred providers networks, PPN), et l’arrivée potentielle d’Amazon Pharmacy sur le marché canadien, les patients se procurent souvent leurs médicaments auprès d’endroits avec lesquels ils n’ont aucun lien. J’ai personnellement essayé d’appeler une pharmacie par correspondance pour un patient, simplement pour obtenir une clarification, sans succès.Alors, où les patients vont-ils lorsqu’ils ont besoin d’aide?Ils nous appellent. Ils se présentent. Ils se tournent vers la pharmacie qu’ils connaissent, celle qui répond au téléphone. Et une fois de plus, notre titre de «professionnel de la santé le plus accessible» nous place au cœur d’un bourbier dont nous ne sommes pas responsables. (Sachant que je n'aime pas ce surnom… «accès» et «accessible» sont deux choses différentes. Me voir au comptoir ou dans mon bureau ne signifie pas que je suis libre à ce moment-là!)En fait, ce commentaire n'a pas pour but d'apporter toutes les réponses. Je ne les ai pas encore. Mais je pense que nous devons en discuter davantage. Car si nous ne trouvons pas comment gérer le chevauchement entre nos obligations professionnelles et notre modèle de rémunération, nous allons continuer à nous heurter à ce problème. Et cela continuera à nuire aux patients.Car j'ai le sentiment que ce n'est pas un cas isolé. C'est le début d'une tendance. Et si nous voulons protéger les patients et nous-mêmes, nous devons anticiper.

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