Fièvre chez l'enfant: Nouvelles lignes directrices

Les nouvelles lignes directrices de l’American Academy of Pediatrics pour la prise en charge de la fièvre chez les enfants encouragent les parents à se concentrer sur l’amélioration du bien-être global de l’enfant au lieu de tenter de maintenir une température «normale»1.La fièvre ne devrait pas être considérée comme une maladie, mais plutôt comme un mécanisme physiologique courant et normal qui a des effets bénéfiques dans la lutte contre les infections. La plupart des fièvres sont bénignes et de courte durée. Il n’y a aucune preuve à l’effet que les enfants atteints de fièvre sont à risque accru d’événements indésirables. Rien ne prouve non plus que le traitement antipyrétique réduise la récurrence des convulsions fébriles.La nécessité d’édicter des lignes directrices dans la prise en charge de la fièvre est attribuable à la «phobie de la fièvre» de plusieurs parents qui administrent des antipyrétiques même s’il y a peu ou pas de fièvre. La recherche a montré qu’environ 50 % des parents considéraient une température de < 38 °C comme de la fièvre, et 85 % des parents réveillaient leur enfant endormi pour lui donner des antipyrétiques. De plus, plus de 50 % des parents donnent des doses incorrectes d’antipyrétiques et environ 15 % donnent des doses excessives d’acétaminophène ou d’ibuprofène.Les pédiatres débutent couramment un traitement antipyrétique lorsque l’enfant présente une température de 38,3 °C et plus. La plupart des pédiatres (80 %) croient qu’il ne faut pas réveiller un enfant endormi seulement pour lui donner un antipyrétique. Plusieurs pédiatres encouragent l’utilisation des antipyrétiques, car ils estiment que ces médicaments améliorent le bien-être de l’enfant, ses activités et son alimentation, réduisent l’irritabilité, et donnent le sentiment de contrôler la condition clinique globale de l’enfant.L’amélioration du bien-être du patient par les antipyrétiques est un but thérapeutique raisonnable, bien qu’il n’y ait pas de preuve que la réduction de la température devrait être le but premier du traitement antipyrétique. Plutôt, les conseils aux parents devraient mettre l’accent sur la surveillance de l’activité de l’enfant, l’observation de signes de maladie plus sérieuse, et assurer une prise de liquide adéquate pour maintenir une bonne hydratation.L’acétaminophène (10-15 mg/kg par dose) toutes les quatre à six heures par la voie orale est généralement considéré comme sécuritaire et efficace, avec un début d’action antipyrétique dans les 30-60 minutes. L’utilisation d’une dose de charge initiale par voie orale (30 mg/kg par dose) ou rectale (40 mg/kg par dose) n’est pas recommandée, car il n’a pas été démontré qu’elle améliorait l’efficacité antipyrétique et pourrait contribuer à semer la confusion quant au dosage adéquat. On a rapporté de l’hépatotoxicité principalement avec des surdoses, mais l’hépatite liée à l’acétaminophène est possible dans des situations de surdoses chroniques, par exemple dans les cas de doses suprathérapeutiques multiples (> 15 mg/kg par dose), l’administration à des intervalles de moins de quatre heures ou encore en donnant une préparation d’acétaminophène pour adulte à un enfant.L’ibuprofène (10 mg/kg par dose) toutes les six à huit heures est de plus en plus utilisé dans la prise en charge de la fièvre, car il semble avoir une plus longue durée d’action antipyrétique (6-8 heures) que l’acétaminophène (4-6 heures). L’acétaminophène et l’ibuprofène sont tous deux plus efficaces que le placebo pour réduire la fièvre, et l’ibuprofène (10 mg/kg par dose) est au moins aussi efficace (et peut-être plus) que l’acétaminophène (15 mg/kg par dose). Les deux médicaments semblent présenter une sécurité similaire dans les doses standards chez les enfants en bonne santé globale (6 mois à 12 ans) atteints de conditions fébriles. L’ibuprofène peut potentiellement entraîner une gastrite, mais c’est plus rare lorsqu’il est utilisé en traitement aigu pour une maladie fébrile. En raison de la néphrotoxicité potentielle de l’ibuprofène, il faut demeurer prudent lorsqu’on l’utilise chez les enfants déshydratés ou atteints de maladies complexes. Les enfants à plus haut risque de toxicité rénale liée à l’ibuprofène sont ceux en déshydratation, avec une maladie cardiovasculaire ou une maladie rénale préexistante, les bébés de moins de six mois, et ceux qui reçoivent d’autres agents néphrotoxiques de façon concomitante. Des données inadéquates soutiennent une recommandation spécifique pour l’utilisation de l’ibuprofène dans la prise en charge de la fièvre ou de la douleur chez les petits de moins de six mois.Il est courant d’alterner l’utilisation de l’acétaminophène et de l’ibuprofène pour maîtriser la fièvre, ce qui a été rapporté par 67 % des parents dans une étude. L’intervalle entre les doses le plus fréquent était de quatre heures, bien que l’on ait aussi noté un changement de traitement chaque deux, trois et six heures. Des études publiées comparant l’utilisation de l’alternance ibuprofène et acétaminophène par rapport à d’autres médicaments seuls ont montré des réductions initiales de la température similaires. Toutefois, des températures plus basses étaient notées de façon consistante avec un traitement combiné au-delà de quatre heures après le début du traitement.Bien que le traitement combiné semble plus efficace pour abaisser la température, sa sécurité et son efficacité à améliorer le bien-être (le premier critère d’aboutissement du traitement) sont incertains. La confusion des parents quant aux instructions sur le dosage ainsi que le vaste éventail de produits contenant ces médicaments augmentent les risques de dosage inapproprié et le surdosage. Ainsi, les preuves ne sont pas suffisantes pour appuyer ou réfuter l’usage courant d’alterner l’acétaminophène et l’ibuprofène. Les professionnels de la santé qui recommandent cette pratique devraient conseiller des formulations, un dosage et des intervalles appropriés et mettre l’accent sur le bien-être de l’enfant au lieu de la réduction de la fièvre.Commentaires: Les nouvelles lignes directrices de l’American Academy of Pediatrics ne donnent aucun avis sur les méthodes de préférence pour mesurer la température (orale, rectal, axillaire, tympanique) selon l’âge. Cette information est cependant disponible dans les lignes directrices de la Société canadienne de pédiatrie2. Ces lignes directrices comprennent également un outil pour les parents, qui fournit des conseils sur les méthodes de prise de température, les températures normales pour chaque méthode, et les signes et symptômes indiquant la nécessité pour les parents de contacter un professionnel de la santé.Références1. Section on Clinical Pharmacology and Therapeutics and Committee on Drugs, American Academy of Pediatrics. Fever and antipyretic use in children. Pediatrics 2011;127:580-7. http://pediatrics.aappublications.org/cgi/content/full/127/3/5802. Société canadienne de pédiatrie. La mesure de la température en pédiatrie. Réapprouvé en février 2010. http://www.cps.ca/francais/enonces/CP/CP00-01.htm

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