Mieux connaître les risques d’abus des médicaments d’ordonnance

«Il faut avoir la bonne information pour prendre la bonne décision » - Mohammed Ben Amar, auteur principal de Drogues, savoir plus, risquer moins. Pour sa septième édition, la bible québécoise des drogues a été complètement mise à jour. Tous les chapitres concernant les 19 catégories de psychotropes abordées ont été révisées, et quelques dossiers d’actualité ajoutés. Notamment ceux concernant les médicaments d’ordonnance et le cannabis.Pour ce pharmacien, habitué de siéger sur les comités canadiens à titre d'expert en toxicologie, il est primordial que les professionnels de la santé et le grand public bénéficient de l’information la plus à jour possible.«Il y a plus de 120 études cliniques contrôlées qui ont démontré l’efficacité des cannabinoïdes dans une dizaine de pathologies, mais beaucoup de médecins et de pharmaciens ne sont pas au courant», explique par exemple Mohamed Ben Amar. Résultat, c’est rarement ce qui ressort des messages véhiculés dans les médias grand public. Une situation qui renforce les malentendus, les inquiétudes et les peurs. Difficile par ailleurs de trouver un juste milieu entre «l’indifférence et la dramatisation».Au-delà des connaissances, il est pourtant primordial pour Mohamed Ben Amar que «les professionnels de la santé arrivent à rester objectifs et neutres, c’est à dire, qu'ils ne banalisent ou ne démonisent pas le cannabis et les autres substances». Or, le meilleur moyen pour ce faire reste l’information. D’où l’importance d’offrir une nouvelle version de Drogues, savoir plus, risquer moins, un best seller qui a été écoulé à plus de 200 000 exemplaires au Québec, depuis son lancement en 2001.La dernière édition datait de 2008 et, depuis, bien des choses ont changé en matière de toxicomanie. Du côté des données sur les psychotropes, qui évoluent très vite, mais aussi des pratiques de consommation des drogues. Elles se sont en effet profondément transformées, en particulier chez les jeunes.Au Québec, on assiste ainsi à une banalisation du cannabis, à une augmentation des états d’ivresses répétés, à des abus de «boissons énergisantes» contenant de la caféine. Les jeunes sont aussi de plus en plus nombreux à consommer du tabac, des drogues de synthèse, des substances dopantes et des médicaments psychoactifs. Ils mêlent par ailleurs produits licites et illicites ou les prennent successivement.Cette nouvelle édition permet donc d’actualiser les données concernant les 19 catégories de psychotropes abordées. Elle reflète aussi de nouvelles réalités. Aujourd’hui, on peut acheter sur Internet plus de 400 nouvelles drogues de synthèse. Celles-ci sont responsables de la mort de nombreux jeunes.Nouvelles données à connaîtreLa littérature scientifique a aussi beaucoup évolué dans certains domaines. Une étude américaine publiée en mai dernier a démontré que le méthylphénidate (Ritalin, RitalinSR, Biphentin et Concerta) réduit la plasticité du cerveau. Les jeunes qui en abusent pour obtenir de meilleurs résultats scolaires risquent donc d’endommager leur cerveau.Même à faible dose le méthylphénidate peut réduire l’activité nerveuse, la mémoire, la performance au travail et l’apprentissage des tâches motrices complexes. Or, les plus jeunes seraient particulièrement vulnérables à ses effets cérébraux néfastes. Une situation jugée préoccupante par l’auteur quand on sait qu’au Canada, «il y a un abus de méthylphénidate chez les enfants et les jeunes adolescents, et que le recours à ce médicament pour traiter le TDAH représente souvent une solution de facilité». Au-delà du nombre d’ordonnances, en hausse exponentielle dans les dernières années, notamment au Québec, le marché noir pour ces médicaments est aussi en pleine croissance.Au Canada, l’abus des benzodiazépines est aussi une pratique courante. «Plus de 10 % des utilisateurs de cette classe de psychotropes, notamment les personnes âgées, ne respectent pas les directives d’usages dictées par les monographies des produits et en font un usage prolongé», peut-on lire dans Drogues: savoir plus, risquer moins.Autres médicaments problématiques: les analgésiques opiacés. Le Canada est devenu le deuxième consommateur mondial par personne d’opiacés sur ordonnance. Même si la situation au Québec n’est pas aussi dramatique qu’en Ontario, où le nombre de décès relié aux opiacés sur ordonnance a doublé entre 1991 et 2004, on a tout de même compté 13 décès dans notre province entre 1999 et 2005. Des populations à risqueRien qu'en 2011 et 2012, la consommation de psychotropes chez les étudiants serait passée de 17,6 % à 24, 7 %, selon Santé Canada. Un phénomène attribuable à la facilité à se procurer ces médicaments pour les adolescents et les jeunes adultes.Les personnes âgées aussi n’ont jamais autant consommé de médicaments d’ordonnance qu’aujourd’hui. En raison de douleurs chroniques et d’insomnie, elles sont nombreuses à abuser des opiacés et des benzodiazépines, ce qui entraînent chez elles de nombreux effets secondaires néfastes, allant de la confusion à la somnolence, en passant par des troubles de coordination, des chutes et des difficultés respiratoires. Sans parler du fait que la polyconsommation multiplie les risques de problèmes liés à des interactions médicamenteuses.Les femmes sont aussi plus susceptibles de se faire prescrire des médicaments psychotropes, mais également des sédatifs et des tranquillisants. Bien sûr, elles ont une espérance de vie plus longue et vont plus facilement consulter un médecin, mais elles sont aussi plus souvent ciblées par les stratégies de marketing, analysent les auteurs.7 %C’est le pourcentage de la population nord-américaine qui souffre d’une intoxication chronique à l’alcool.5 milliardsC’est le nombre de cannettes de Red Bull Energy Drink vendues en 2012 dans le monde.Près d’un Canadien sur quatre de 15 ans et plus a consommé un produit pharmaceutique psychoactif : antidouleurs opioïdes (16,9 %), stimulants (1,5 %), tranquillisants ou sédatifs (10,2 %) en 2012. Et plus de 6 %, soit deux fois plus qu’en 2011, affirment en avoir abusé pour l’expérience, l’effet qu’il cause ou pour se geler.

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