Ménopause et périménopause: 5 conseils pour dire adieu aux nuits blanches

«Il est très difficile de corriger les symptômes de la ménopause sans s'occuper du sommeil», confie la Dre Michelle Jacobson, spécialiste de la ménopause à Toronto. Les symptômes associés peuvent inclure une humeur dépressive, un manque d'énergie, une baisse de la libido et un sentiment de ne pas se sentir soi-même. «Je placerais ce problème en tête de la liste des choses à traiter en priorité».La Société des obstétriciens et gynécologues du Canada (SOGC) a publié des lignes directrices sur la ménopause et le sommeil en 2021, mais d'autres conseils pourraient être nécessaires pour aider ces patientes.Nous avons demandé aux Dres Jacobson et Alison Shea – auteure principale des directives et professeure agrégée au département d'obstétrique et de gynécologie de l'Université McMaster à Hamilton –, de nous donner leurs conseils sur la façon de gérer les troubles du sommeil. Ces dernières siègent toutes deux au conseil d'administration de la Fondation canadienne de la ménopause.Élaborez un tableau complet des antécédentsAssurez-vous de connaître le type de troubles du sommeil dont souffre votre patiente, conseille tout d’abord la Dre Jacobson. Le sommeil peut être perturbé à trois moments différents de la nuit: certaines patientes ont des difficultés à s'endormir, d'autres se réveillent plus tôt que prévu le matin et ne parviennent pas à se rendormir, mais le problème le plus courant pour les personnes en périménopause ou en ménopause est de se réveiller pendant la nuit et de ne pas pouvoir se rendormir. En général, celles-ci se réveillent entre deux et cinq heures du matin et peuvent mettre jusqu'à deux heures pour se rendormir, précise la Dre Shea.À lire aussi: Les problèmes bucco-dentaires, un symptôme méconnu de la ménopause Les troubles du sommeil peuvent survenir à ce stade de la vie pour plusieurs raisons. Des changements physiologiques se produisent et le rythme circadien des hormones se modifie, note la Dre Shea. La mélatonine commence également à diminuer à partir de la quarantaine, en partie sous l'influence des ovaires. Les modifications de l'œstradiol et de la progestérone contribuent à un mauvais sommeil. D'autres symptômes de la périménopause et de la ménopause peuvent avoir un impact sur le sommeil, en particulier les symptômes vasomoteurs comme les sueurs nocturnes, et les symptômes génito-urinaires qui donnent envie d'uriner pendant la nuit.Selon la Dre Shea, les troubles du sommeil peuvent souvent être plus brutaux et plus graves chez les personnes qui vivent la transition de la ménopause à la suite d'une intervention chirurgicale ou d'une chimiothérapie.Dépistez d'autres troubles du sommeilVeillez à éliminer les autres causes des troubles du sommeil. Tout d'abord, vérifiez ce que la Dre Shea appelle «les fruits les plus faciles à cueillir». Votre patiente est-elle anémique? Présente-t-elle une perturbation de l'hormone thyroïdienne? Demandez-lui si elle présente des signes de syndrome des jambes sans repos.Ensuite, vérifiez si la patiente souffre d'apnée du sommeil. «Il est important de savoir que toutes les femmes souffrant d'apnée du sommeil ne ronflent pas forcément bruyamment. Beaucoup de gens l'ignorent», explique la Dre Shea. «Demandez-leur si elles ont des maux de tête le matin, si elles sont très somnolentes pendant la journée et, si elles ont un ou une partenaire de lit, si ce(tte) dernier(ère) remarque des pauses dans leur respiration.» Si vous suspectez un cas d'apnée du sommeil, envoyez votre patiente faire analyser son sommeil ou prescrivez-lui l'appareil adéquat.À lire aussi: Le rôle des pharmaciens pour pallier les lacunes dans la prise en charge de la ménopause au CanadaCherchez à savoir si la patiente souffre de dépression ou d'anxiété et, le cas échéant, travaillez avec elle pour la traiter. «Nous savons que les troubles de l'humeur sont assez fréquents en périménopause. C'est une période de vulnérabilité», pointe la Dre Jacobson.La douleur chronique est un autre facteur susceptible d'affecter le sommeil. La Dre Shea conseille d'aider la patiente à gérer sa douleur autant que possible, en recourant à la physiothérapie et à la massothérapie.Encouragez la TCCLe traitement de première intention des troubles du sommeil liés à la périménopause ou à la ménopause est la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) pour l'insomnie. Les Dres Shea et Jacobson recommandent toutes deux de consulter le site MieuxDormir.ca pour obtenir des ressources sur le traitement de l’insomnie par TCC. On y trouve une liste d’ouvrages et de sites internet spécifiques auxquels les patientes peuvent avoir accès.De son côté, la Dre Jacobson a tendance à orienter ses patientes vers le site CBTforinsomnia.com (en anglais), un programme en ligne développé par la Faculté de médecine de Harvard. Les patients peuvent se procurer un livret téléchargeable d'une valeur de 50$ ainsi que d'autres ressources. «De cette façon, ils peuvent aller à leur propre rythme et dans leur propre environnement.»À lire aussi: Le guide clinique sur les répercussions de la périménopause et de la ménopauseSi une patiente travaille avec un.e thérapeute, il lui faudra quatre à six séances d’une heure selon la Dre Shea. La patiente devra également apprendre à chasser les pensées négatives sur le sommeil et éventuellement se restreindre, c’est-à-dire ne se coucher que lorsqu'elle a sommeil pour s'habituer aux signaux du corps.Le suivi de la TCC demande des efforts. «C’est très facile de prendre une pilule, mais c’est très compliqué d’opérer un changement de comportement, car il faut y mettre du sien», observe la Dre Jacobson. Mais les patientes qui ont suivi ce programme de TCC ont fait des retours très positifs à la spécialiste.L'avantage de la TCC pour traiter l'insomnie est qu'il s'agit d'une compétence transférable. «Si vous êtes doué pour la thérapie cognitivo-comportementale, vous réussirez également mieux dans d'autres domaines de votre vie où votre cerveau a un impact réel sur votre capacité à fonctionner», assure la Dre Jacobson.4. Envisagez un traitement médicamenteuxUne fois que la patiente a essayé la TCC pour gérer son insomnie et que les autres troubles ont été pris en charge, un traitement pharmaceutique peut s'avérer approprié. L'insomnie chronique – qui se traduit par cinq à six heures (ou moins) de sommeil par nuit – peut avoir des conséquences néfastes sur la santé; il est donc important de protéger le sommeil.«J'ai tendance à réserver les somnifères aux patientes qui sont vraiment angoissées par un schéma de troubles du sommeil, et qui ont besoin, de temps en temps, d’avoir la garantie qu’elles vont pouvoir dormir, car leur anxiété nourrit leur insomnie», observe la Dre Jacobson.Si les patientes suivent un traitement hormonal pour traiter les symptômes de la périménopause ou de la ménopause, la progestérone peut les aider à dormir. Les doses de 200 à 300 mg de progestérone micronisée ont été étudiées pour le sommeil, ce qui est plus élevé que les doses habituelles de l'hormonothérapie.«La progestérone n'est certainement pas la panacée pour toutes les patientes souffrant de troubles du sommeil, mais si la thérapie hormonale est appropriée et que la patiente n'a pas de contre-indications à cet égard, prendre de la progestérone au coucher peut parfois aider», affirme la Dre Jacobson, ajoutant que cela peut les aider à s'endormir, mais pas à rester endormies.À lire aussi: Y a-t-il un risque accru de démence lié au traitement hormonal de la ménopause?Le traitement pharmaceutique de choix pour l'insomnie est constitué par les nouveaux antagonistes des récepteurs de l'orexine (DORA). Il a été démontré qu'ils aident à réduire la latence du sommeil. Contrairement aux autres somnifères, les DORA n'entraînent pas de dépendance ou de tolérance et ne suppriment pas le sommeil paradoxal.«Le sommeil est beaucoup plus réparateur et les patientes ne se sentent pas aussi groggy le lendemain», précise la Dre Shea. Même si ces médicaments semblent plus sûrs que les autres, sa consœur ajoute qu'elle encourage toujours les patientes à ne pas les prendre tous les soirs.Si les benzodiazépines et les «médicaments en Z» peuvent être nécessaires pour un traitement à court terme, ils ne sont pas appropriés pour un traitement à long terme, car les patientes peuvent développer une tolérance et/ou une dépendance. Ces médicaments ont des effets à long terme sur la cognition, augmentent le risque de chutes, présentent un risque élevé d'interaction médicamenteuse et les patientes ne doivent pas conduire 12 heures après les avoir pris. Le sevrage doit être très progressif, surtout si la patiente est sous traitement depuis longtemps, prévient la Dre Shea.Soutenir les patientes lorsqu'elles essaient d'autres traitementsLes études sont mitigées quant à la capacité de certains suppléments à favoriser l’endormissement, notamment l'extrait de valériane, le magnésium et l'actée à grappes noires aux doses recommandées. La Dre Shea observe que ces produits ne sont pas réglementés de la même manière et que les doses peuvent donc varier.«D’un point de vue individuel, je pense que si les patientes prennent ces médicaments et qu'elles les trouvent utiles, nous devrions les soutenir», estime sa consœur.Les patientes peuvent également se tourner vers le cannabis pour se soulager. Les recherches sur le cannabis sont divisées, car il existe de nombreuses préparations et voies d'administration différentes. La Dre Jacobson indique qu'elle oriente ses patientes vers un médecin qui connaît bien le cannabis.«Si la patiente dort et se sent bien, tant mieux», considère pour sa part la Dre Shea. «Il est préférable de l’ingérer sous forme d'huile ou de produit comestible plutôt que de le fumer, en raison des effets sur la santé et les poumons de l'inhalation.»À lire aussi: Postménopause: le calcium et la vitamine D, aussi bénéfiques que risquésConcernant l’alcool, le métabolisme évolue avec l'âge, donc s’il a pu aider vos patientes à s'endormir lorsqu'elles étaient plus jeunes, ce n'est plus forcément le cas en périménopause. Souvent, les patientes se réveillent parce que leur corps est encore en train de métaboliser l'alcool. «Si vous devez boire de l'alcool, essayez de le faire au moins trois heures avant de vous coucher afin de pouvoir le métaboliser avant de vous endormir», conseille la Dre Shea.En revanche, mesurer le sommeil à l'aide d'appareils de suivi de la condition physique n'est peut-être pas une bonne idée. La Dre Shea note que, selon les médecins spécialistes du sommeil, ces appareils sont un mauvais indicateur du sommeil car ils enregistrent simplement les mouvements de la personne. Ces dispositifs peuvent augmenter le stress des patientes qui ont du mal à dormir, surtout si elles se réveillent en se sentant reposées mais que l'écran leur indique un mauvais sommeil. La meilleure mesure d'un bon sommeil est de se sentir reposé et prêt à affronter la journée, déclare la médecin.Toutes les discussions sur le sommeil devraient inclure des informations sur l'hygiène du sommeil, en particulier lorsqu'il s'agit de limiter l'utilisation d'écrans avant le coucher, selon les directives de la SOGC.

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