Maladies cardiovasculaires - Les femmes semblent défavorisées

Pharmacienne et chercheuse, Julie Méthot a effectué sa thèse de doctorat sur la femme et la maladie cardiaque. La maladie cardiovasculaire (MCV) est perçue depuis longtemps par la population comme une maladie d’hommes. Des sondages ont démontré que les femmes craignaient bien davantage d’être victimes d’un cancer du sein que d’une MCV. Or, c’est une perception erronée. Même si elle apparaît plus tard chez elles que chez les hommes, la MCV forme la principale cause de décès chez les femmes au Canada. Elles présentent 10 fois plus de risques de décéder d’une MCV que de n’importe quelle autre maladie. Étonnant ? Peut-être, mais surtout inquiétant, justement parce que les femmes pensent qu’elles sont moins sujettes à être un jour victimes d’une MCV, et que les médecins étaient et demeurent aussi moins aptes à détecter les signes d’une MCV chez les femmes, les jeunes en particulier, que chez les hommes. Pharmacienne et chercheuse à l’Hôpital Laval, Julie Méthot a mené sa thèse de doctorat (2006) sur la maladie cardiaque et la femme, un sujet auquel on commençait à peine à s’intéresser quand elle l’a entreprise, en 1998. Ses observations sont lourdes de sens. Par rapport aux MCV, écrit-elle, les femmes semblent défavorisées comparativement aux hommes. La perception du risque de maladie coronarienne est moindre chez les femmes et même chez les professionnels de la santé, notamment parce qu’elles présentent des symptômes atypiques confondants avec d’autres malaises. Les femmes mettent aussi plus de temps à se présenter à l’urgence en cas de problème et sont moins souvent admises dans les unités de soins coronariens que les hommes. Les femmes ayant une maladie coronarienne ont un moins bon pronostic et un taux plus élevé de mortalité précoce et intrahospitalier lorsqu’elles subissent des interventions ou des chirurgies de revascularisation que les hommes. Même les femmes plus jeunes ne sont pas épargnées, car elles ont un taux de mortalité plus élevé durant l’hospitalisation liée à un infarctus du myocarde. Une vaste méconnaissance Cette situation dramatique résulte en partie d’une vaste méconnaissance des effets et de l’ampleur de la MCV chez la femme. Les femmes étaient peu ou pas représentées dans les grandes études cardiovasculaires. Par le passé, dit Mme Méthot, la communauté médicale avait adopté à l’égard des femmes une approche de type « bikini » en ciblant la poitrine (cancer du sein) et le système reproducteur, oubliant le cœur. Les connaissances générales sur la MCV ont été extrapolées aux femmes en tenant pour acquis que la maladie cardiovasculaire était ressentie de façon identique chez les deux sexes et que les femmes réagissaient de la même façon aux traitements. « Longtemps, on a fait davantage d’études sur les rats que sur la santé des femmes », ironise Mme Méthot. Hommes et femmes possèdent sensiblement les mêmes facteurs de risque de la MCV, mais les recherches menées depuis une décennie ont confirmé l’écart entre deux sexes en matière de manifestations cliniques, de diagnostics et de traitements de cardiopathies ischémiques. Les recherches menées à Québec par Mme Méthot intéressent vivement des médecins et même des cardiologues, lui ont dit avoir saisi des choses à son contact au sujet de la MCV chez la femme. Mme Méthot a d’ailleurs fait plusieurs présentations sur la question lors de congrès de l’American Heart Association et de congrès de médecine tenus au Québec pour sensibiliser les médecins à la MCV chez la femme, une cause embrassée par Hillary Clinton aux États-Unis. Des nombreux mythes Quand Julie Méthot a entrepris sa thèse, on croyait encore que l’hormonothérapie chez les femmes ménopausées avait un effet préventif sur les MCV. C’est l’un des nombreux mythes, dangereux, qu’ont démolis les études menées durant la dernière décennie. On sait maintenant que non seulement l’hormonothérapie ne représente pas un écran contre les MCV, mais qu’au contraire, elle l’augmente en prévention secondaire, surtout pendant la première année d’utilisation. Un autre mythe voulait que les femmes qui n’étaient pas encore ménopausées (sauf les diabétiques) étaient à l’abri des MCV grâce aux œstrogènes. Pourtant, même des femmes qui n’ont pas atteint la mé-nopause peuvent être sujettes à contracter des MCV. Même si des médecins sont sceptiques, des femmes dans la quarantaine peuvent être victimes de MCV, et Mme Méthot a obtenu plusieurs témoignages très révélateurs à ce sujet. Le mauvais pronostic des MCV et le taux élevé de mortalité chez les femmes ayant une maladie coronarienne renforcent l’importance de la prévention primaire et secondaire, insiste cette chercheuse. Le changement des habitudes de vie devrait constituer la démarche initiale afin de réduire le risque de MCV chez toutes les femmes.

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