L’INSPQ ne recommanderait pas la vaccination obligatoire contre la grippe pour les travailleurs de la santé

L’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) ne recommanderait pas une politique de vaccination obligatoire des travailleurs de la santé, a appris ProfessionSanté.ca. L’organisme rejetterait l'adoption d'une mesure contraignante, même si la cible de vaccination de 80% du personnel de la santé est loin d’être atteinte.Il y a deux ans, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) avait demandé à l’INSPQ de lui produire un avis sur les enjeux liés à l’efficacité et à la sécurité du vaccin contre la grippe, aux politiques de vaccination obligatoire et au port du masque chez les travailleurs de la santé. Cette étude a été réalisée par le Comité d’immunisation du Québec (CIQ).Avant même d’en recevoir les conclusions, le ministère s’attendait à ce que ce groupe d’experts ne lui suggère pas d’imposer la vaccination obligatoire auprès de son personnel (à l'instar de la Colombie-Britannique) ou le port du masque pour ceux qui n’ont pas été vaccinés. Le MSSS envisageait déjà un autre scénario.«Comme l’avis semble tendre vers le rejet d’une telle politique, écrit-on dans la note que nous avons obtenue, des activités de transfert de connaissances et de sensibilisation aux enjeux inhérents à ces politiques ont été entreprises l’été dernier.»Pour l’instant, le ministère se limiterait donc à poursuivre ses campagnes de sensibilisation auprès de son personnel afin de l’inciter à se faire vacciner contre la grippe chaque année, comme il l’a fait les années antérieures.Efficacité vaccinale de 40 à 60%En 2013, le Dr Réjean Hébert, alors ministre de la Santé, avait envisagé de rendre le vaccin obligatoire pour tout le personnel de la Santé. Le Dr Hébert a été emporté avec le défaite de son gouvernement et cette mesure n’a jamais été appliquée au Québec.Beaucoup de travailleurs de la santé ont des réticences à se faire vacciner en raison de craintes sur la sécurité du vaccin et d’une perception négative quant à sa performance, souligne le MSSS. Le ministère reconnaît lui-même que son efficacité est limitée; elle s’est située entre 40 et 60% au cours des dernières années, excluant 2014-2015, où elle s’est avéré nulle. Néanmoins, le MSSS souhaite que le plus grand nombre d’employés du réseau de la santé se fasse vacciner.«Même si le vaccin contre la grippe n’est pas aussi efficace qu’on le souhaiterait, la vaccination contre la grippe demeure le meilleur moyen de prévention pour les personnes vulnérables, écrit-on dans l’édition du 21 septembre 2015 de FlashGRIPPE. Il existe des preuves scientifiques robustes de l’efficacité directe de la vaccination pour prévenir l’influenza, et ces preuves s’appliquent aussi aux travailleurs vaccinés.»Toutefois, selon le Journal de Montréal, le ministère de la Santé se questionne sur l’intérêt de vacciner des gens en bonne santé et vient de mandater le même comité, le CIQ, afin d’étudier cette question. Le directeur national de Santé publique, le Dr Horacio Arruda, a indiqué la semaine dernière qu’il avait demandé à l’INSPQ un avis sur la pertinence de modifier le programme de vaccination antigrippale.L’avis remis au ministèreLe rapport final des experts du CIQ portant sur la vaccination des travailleurs de la santé a été remis au Dr Arruda, à la mi-septembre. Il sera rendu public dans 60 jours au plus tard, mais le ministère pourrait en dévoiler le contenu plus tôt, s’il le juge à-propos.De toute manière, le gouvernement n’est pas tenu de suivre ses recommandations. Il pourrait décider d’instaurer la vaccination obligatoire pour son personnel, même si le CIQ lui suggère de ne pas s’engager dans cette avenue, et inversement.Au-delà des considérations cliniques, de la protection des travailleurs et de leurs patients, le gouvernement québécois devra tenir compte d’un aspect de droit du travail sur cette question, comme l’a démontré une affaire semblable en Ontario. En l'absence de normes provinciales chez nos voisins, un établissement avait imposé la vaccination à son personnel. Or, cette décision a fait l’objet d’un grief syndical, et une cour de justice l’a renversée. D’autres hôpitaux ont quand même imposé la vaccination et la cause est toujours devant des tribunaux. L’avis du CIQ remis au Dr Arruda n’aborderait toutefois pas cette épineuse question de la vaccination forcée et du droit au travail.Se protéger avant ses patientsLa protection des patients est souvent évoquée par les autorités pour inciter le personnel de la santé à se faire vacciner contre la grippe. Une étude réalisée au Québec a démontré qu’en 2011-2012, 44% des travailleurs de la santé avaient reçu un vaccin. Ceux qui ont accepté de le recevoir l’ont fait parce que:- ils se considéraient à risque (53,4 %);- ils souhaitaient se protéger eux-mêmes (22,9 %) ou les membres de leur famille;- ils souhaitaient protéger leurs patients (10,7 %).C’est dire qu’ils le faisaient d’abord pour eux, avant de le faire pour leurs patients.Motifs de refusDans un rapport consacré à la promotion de la vaccination auprès des travailleurs de lasanté qui remonte à 2013, l’INSPQ relevait des motifs soulevés par des employés qui avaient refusé de recevoir le vaccin. Certains invoquaient une faible perception de la sévérité de la grippe saisonnière et leur propre vulnérabilité pour la contracter. Les attitudes négatives sur la vaccination, les barrières perçues à la vaccination ainsi qu’une expérience vaccinale antérieure désagréable étaient aussi évoquées.Les principales raisons pour accepter la vaccination étaient liées au fait de se considérer comme faisant partie d’un groupe cible (norme sociale) et au sentiment que la vaccination est une responsabilité des travailleurs de la santé.Les campagnes de promotion de la vaccination au sein du personnel de la santé ont fortement amélioré le niveau de participation. Une enquête avait démontré que seulement 21% de ces travailleurs s’étaient fait vacciner en 2010, contre 44% en 2011-2012, et 54% en 2012-2013. Néanmoins, on est encore loin de la cible de 80% souhaitée par le ministère.Campagne de vaccination 2016La campagne de vaccination 2016 démarrera le 1er novembre prochain. Les vaccins contre la grippe saisonnière qui seront distribués à compter de cette date dans l’hémisphère nord en 2016-2017 contiendront deux nouvelles souches. En effet, une nouvelle souche du virus de l’influenza A(H3N2) a été introduite, et la souche du virus de l’influenza B de la lignée Victoria, qui entrait dans la composition du vaccin quadrivalent de la saison 2015-2016, sera modifiée. Seule la souche du virus de l’influenza pandémique A(H1N1) demeure inchangée.En 2016-2017, trois vaccins trivalents et deux vaccins quadrivalents seront distribués gratuitement par le ministère de la Santé.

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