Lignes directrices sur les médicaments: les conflits d’intérêts rarement divulgués

Un nouveau document de recherche publié dans le JAMC (Journal de l’Association médicale canadienne) montre que ceux qui produisent des lignes directrices canadiennes sur les médicaments omettent souvent de divulguer leurs conflits d’intérêts financiers, appelant à un changement.La plupart des auteurs de recommandations sur les médicaments au Canada reçoivent régulièrement un financement de l’industrie, y compris des sociétés qui fabriquent les médicaments évalués dans les lignes directrices.«Nous n’avons trouvé aucun exemple où des organisations produisant des lignes directrices ont divulgué leur financement par l’industrie dans leurs lignes directrices», affirme Katharine Elder, chercheuse à l’Institut Lady Davis de l’Hôpital général juif de Montréal et auteure principale de l’étude.À lire aussi: Quel est le meilleur traitement pour les céphalées dues à une surutilisation de médicaments?«Il est urgent de réformer cela afin que les lignes directrices utilisées dans les soins de santé au Canada soient exemptes d’influences commerciales qui pourraient ne pas refléter le meilleur intérêt des patients», explique Brett Thombs, professeur au Département de psychiatrie à l’Université McGill et chercheur à l’Institut Lady Davis de l’Hôpital général juif de Montréal. «Idéalement, la réforme proviendrait directement des organisations qui produisent les lignes directrices, soit en raison d’un désir de mieux servir le public et la société ou en raison de la pression exercée par leurs membres.»Les directives internationales à l’intention des organisations qui produisent les lignes directrices recommandent d’éviter d’inclure des membres de comité ayant des conflits d’intérêts financiers, de ne pas autoriser les membres en conflit à influencer les recommandations et de ne pas permettre aux présidents et coprésidents d'avoir des conflits d’intérêts. Cependant, la plupart des lignes directrices examinées dans le cadre de l’étude incluaient des membres ayant des conflits d’intérêts financiers, et tout ce qui était rapporté sur les présidents ou les coprésidents montrait que l'un d'entre eux avait un conflit d’intérêts financiers.«Nos résultats suggèrent que ces recommandations ont été largement ignorées par de nombreux groupes canadiens d’intérêt pour certaines maladies ou affections et les sociétés professionnelles médicales qui produisent des lignes directrices cliniques», ajoute le Dr Brett Thombs.L’étude a examiné les lignes directrices cliniques nationales publiées entre le 1er janvier 2016 et le 30 novembre 2018 qui recommandaient un médicament en première intention ou des interventions de dépistage conduisant à un traitement pharmacologique. En tout, 21 lignes directrices ont été incluses dans l'étude. Parmi elles, trois provenaient d’organisations soutenues par le gouvernement, neuf de groupes d'intérêts pour une maladie ou une affection, et neuf, de sociétés professionnelles médicales.Aucun des trois producteurs de lignes directrices parrainés par le gouvernement n’a reçu de financement de l’industrie et aucun de leurs membres n’a déclaré de conflits d’intérêts financiers. En revanche, parmi les 18 groupes d’intérêts pour une maladie ou une affection et les associations professionnelles de la médecine, 14 (93 %) sur 15 ont déclaré sur leur site Web recevoir des fonds de la part du fabricant du médicament recommandé (trois n'en ont pas déclaré). Or, aucun d'entre eux n’a divulgué cette information dans les lignes directrices.Déclaration d'intérêts des auteurs :Katharine Elder travaillait auparavant comme administratrice du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs (GECSSP), qui était le producteur d’une ligne directrice incluse dans la présente étude (citée comme référence 41).Brett Thombs, Ainsley Moore et Sharon Straus sont respectivement président, vice-présidente et directrice de l’application des connaissances pour le GECSSP. Le présent travail n’a pas été commandé ni financé par le GECSSP, et les auteurs ont participé à l’étude en dehors de leurs responsabilités avec le GECSSP. Aucun autre intérêt concurrent n’a été déclaré.« Reporting of financial conflicts of interest by Canadian clinical practice guideline producers » a été publié le 8 juin 2020. L’étude est disponible ici.

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