Les voiturettes de golf, un enjeu de santé publique à mieux réglementer

Un neurochirurgien et deux collaborateurs du Bureau de recherche sur la prévention des blessures de l’hôpital St Michael, à Toronto, sonnent l’alarme. Dans un article publié dans la dernière édition du Journal de l’Association médicale canadienne (JAMC), ils affirment que les blessures consécutives à des accidents de voiturette de golf «constituent un problème de santé publique», en soulignant que celles-ci sont en augmentation et qu’elles peuvent être fatales. La plupart d’entre elles pourraient néanmoins être évitées grâce à des dispositifs de sécurité de base, tels que les ceintures et les arceaux de sécurité, mentionnent les trois auteurs — Douglas Lau, Tara Esbati et le Dr Michael D. Cusimano. Ils plaident ainsi en faveur de l’adoption d’une réglementation nationale qui, comme pour les autres véhicules routiers, viendrait normaliser les équipements de sécurité des voiturettes de golf. Ils invitent également les gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux, ainsi que les organisations qui louent ces engins (clubs de golf, campings, etc.) à mieux encadrer leur usage.À lire aussi: Les aînés évitent les piétons différemment des jeunesL’article rapporte le cas récent d’un enfant de quatre ans qui, avec ses parents et deux de leurs amis, circulait à bord d’une voiturette sur le terrain de golf de Peterborough, une ville située à une centaine de kilomètres au nord-est de Toronto. Dans un chemin en pente, le véhicule s’est mis à accélérer et ses freins ont lâché. Hors de contrôle, il a fini par se retourner en éjectant les passagers qui ont tous été blessés, l’enfant plus sévèrement. Atteint d’un traumatisme crânien massif, il est décédé quelques jours plus tard.Selon les auteurs, «il ne s’agit pas d’un cas isolé». Ils en veulent pour preuve des données de l’American Academy of Pediatrics montrant une «augmentation préoccupante» des blessures liées aux voiturettes de golf, qui sont passées de 5490 cas en 2010 à plus de 6500 cas par année en 2017, 2018 et 2019. Les chercheurs soulignent par ailleurs que les enfants, les personnes âgées et les personnes sous l’influence de l’alcool — plus vulnérables aux blessures — sont des utilisateurs fréquents de ces engins que l’on croise sur des terrains de golf, des campings, des complexes hôteliers, des campus universitaires ou sur les exploitations agricoles. Une étude réalisée aux États-Unis a ainsi révélé que 50,8% des blessures liées aux voiturettes de golf concernaient des enfants âgés de 12 ans ou moins. Bien que 43% d’entre elles soient superficielles, «certaines sont graves ou mortelles», soulignent les auteurs en précisant que 42% de ces blessures touchent la région de la tête et du cou. Une autre étude plus ancienne, toujours menée aux États-Unis, a pour sa part montré que la présence d’alcool avait été détectée chez 59% des personnes âgées de plus de 16 ans ayant subi des blessures liées à une voiturette de golf. Parmi ces blessés, la concentration moyenne d’alcool dans le sang était de 182 mg par 100 ml de sang, soit plus du double de la limite légale au Québec et dans d’autres juridictions. Mesures à prendreFace à ces constats, les trois auteurs de l’article du JAMC appellent les pouvoirs publics à l’action. Ils soulignent que les voiturettes de golf sont très souvent exemptées des réglementations gouvernementales en matière de sécurité routière. Elles disposent certes de freins d’urgence, de rétroviseurs et de réflecteurs, mais la plupart ne sont pas équipées de ceintures de sécurité ou de sangles abdominales, ni de pare-brise et de portes latérales. Résultat: l’éjection du véhicule (52%) et son renversement (20%) sont les mécanismes les plus courants des blessures liées aux accidents de voiturette de golf.Lire aussi: La pharmacie du sport, un nouveau terrain de jeu«La mise en œuvre de réglementations fédérales imposant la fabrication et la vente de véhicules plus sûrs est une première étape importante. Une étude a montré que seul un enfant sur 40 impliqué dans un accident de voiturette de golf portait une ceinture de sécurité, ce qui a probablement contribué à la gravité élevée des blessures», écrivent les auteurs en soulignant que le port obligatoire de la ceinture de sécurité pourrait prévenir de nombreuses blessures. «Les arceaux de sécurité destinés à empêcher les passagers d’être coincés par le véhicule devraient également faire partie de la norme», ajoutent-ils.Enfin, Douglas Lau, Tara Esbati et le Dr Michael D. Cusimano encouragent les provinces et territoires canadiens à mettre en place des cadres réglementaires et juridiques, similaires à ceux d’autres véhicules routiers, qui s’appliqueraient à toutes les voiturettes de golf, tandis que «les municipalités devraient appliquer des règlements (d’usage) pour les propriétés privées et publiques qui correspondent à ceux s’appliquant à tous les véhicules». En outre, ils estiment que «des mesures incitatives et dissuasives en matière d’assurance pour les entreprises et les conducteurs devraient être introduites afin d’encourager les villes et les entreprises qui gèrent des terrains de golf à maintenir des pratiques sûres et un entretien régulier des véhicules».

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