Les patients atteints de psoriasis doivent-ils faire l'objet d'un dépistage des MCV?

Une étude révèle une altération de la microcirculation cardiaque, même chez les patients ne présentant pas de symptôme de maladie cardiovasculaire. De nouvelles données viennent étayer l'association entre le psoriasis et un risque accru de maladie cardiovasculaire (MCV). Les chercheurs ont démontré le rôle joué par la maladie coronarienne des petits vaisseaux, ou dysfonctionnement microvasculaire coronarien (DMC). En général, l'augmentation du risque de MCV «a été attribuée à l'inflammation induite par le psoriasis, qui pourrait affecter la formation de la plaque d'athérome et la fonction microvasculaire coronaire, entraînant ainsi un risque accru de complications athérothrombotiques et ischémiques», ont expliqué les chercheurs dans le Journal of Investigative Dermatology. Mais le DMC indique une régulation anormale de la microcirculation coronaire qui entraîne une altération de la perfusion myocardique et peut conduire à des complications athérothrombotiques et ischémiques. Elle peut passer inaperçue parce que la microcirculation coronaire ou la réserve de flux coronaire (RFC) ne peut pas être évaluée à partir des angiographies coronaires de routine. Les évaluations non invasives du DMC sont effectuées par PET-CT et résonance magnétique cardiaque, mais peuvent également être réalisées par échocardiographie Doppler transthoracique, un peu moins précise. Les chercheurs ont expliqué que dans une étude antérieure, «nous avions déjà montré dans une petite cohorte de patients que la RFC est réduite chez les patients atteints de psoriasis modéré à sévère par rapport à la population générale». Mais les chiffres étaient faibles et une étude plus importante était justifiée. La RFC indique la capacité de la circulation coronaire à se dilater et à augmenter le débit sanguin lorsque la demande du cœur augmente avec l'effort. Une étude a cherché à déterminer la prévalence d'une RFC réduite chez les patients atteints de psoriasis en utilisant l'échocardiographie transthoracique. Les participants à l'étude comprenaient une large cohorte de patients atteints de psoriasis sévère et ne présentant pas de MCV clinique. Les personnes souffrant d’une MCV connue, de MPOC ou d'asthme, ainsi que de plusieurs autres affections qui augmentent l'inflammation systémique ont été exclues de l'étude. Les 448 patients avaient un âge moyen de 45 ans et 69% étaient des hommes. Leur indice de masse corporelle moyen était de 29 kg/m2 ; 24% d'entre eux souffraient d'hypertension, 37 % d'hyperlipidémie, 11% de diabète sucré et 57,8% étaient ou avaient été fumeurs. La durée médiane du psoriasis dans la cohorte était de 15,2 ans et le score PASI (Psoriasis Area Severity Index) moyen était de 12. La plupart des patients, 332 sur 448, soit 74,1%, ont subi une évaluation du RFC avant de commencer un traitement. Une valeur normale de RFC est généralement supérieure à 2 ou 2,5, voire plus. Le débit sanguin coronarien a été mesuré par cartographie Doppler couleur et la RFC a été calculée. Une RFC inférieure à 2,5 est considérée comme anormale et comme un marqueur de DMC. Environ 75% des échographies ont été réalisées avant que les patients ne reçoivent un traitement systémique ou biologique. Les chercheurs ont constaté que 141 patients (31,5%) présentaient des signes de DMC et avaient une RFC inférieure ou égale à 2,5. Aucun de ces patients ne présentait de sténose coronarienne à la suite d'examens complémentaires. Cependant, un nombre significatif de patients, 12,9%, présentaient des scores RFC inférieurs à 2,0, et 5,1% avaient une RFC sévèrement réduite de 1,5 ou moins. «Les patients atteints de DMC, comparés à ceux qui n'en sont pas atteints, étaient plus âgés, avaient un indice de masse corporelle légèrement plus élevé et souffraient plus souvent d'hypertension et de rhumatisme psoriasique. En outre, l'activité du psoriasis était plus importante chez ces patients», ont précisé les chercheurs. Dans l'ensemble, «nous avons constaté que le DMC, telle que définie par la RFC (égale ou inférieure à 2,5), était répandue chez plus de 30% des patients. L'étude actuelle est la plus vaste à ce jour sur le flux coronarien chez les patients atteints de psoriasis», souligne l'étude. En outre, la gravité et la durée du psoriasis ainsi que la présence de rhumatisme psoriasique se sont révélées être des facteurs prédictifs indépendants de la RFC. Ceci est important, car il a été démontré qu'une RFC réduite est un mauvais pronostic pour les maladies cardiovasculaires dans la population générale. «Cet article vient s'ajouter à la littérature déjà abondante selon laquelle le psoriasis accélère l'athérosclérose et la maladie coronarienne clinique, ce qui n'est pas correctement pris en compte par les facteurs de risque MCV traditionnels», a commenté le Dr Nehal Mehta, cardiologue, dans un éditorial accompagnant l'étude européenne. Le Dr Mehta est professeur de médecine clinique à la George Washington School of Medicine et n'a pas participé à l'étude. Il reconnaît que l'inflammation «est essentielle au déclenchement et à la progression de tous les stades de l'athérosclérose. Les maladies inflammatoires chroniques accentuent tous les stades du processus d'athérosclérose par le biais de plusieurs voies interconnectées. La compréhension de ces voies permet d'éclairer les stratégies de traitement et les décisions relatives au mode de vie, ce qui peut avoir un impact considérable sur la morbidité et la mortalité cardiovasculaires». L'étude est intéressante en ce sens qu'elle montre qu'«une augmentation d'un point du PASI et une année de durée du psoriasis sont associées à un risque accru de DMC de 5,8 % et 4,6 %, respectivement». L'étude a également montré qu'il existe une forte prévalence de DMC chez les patients asymptomatiques atteints de psoriasis sévère, et que cette prévalence est associée à la sévérité et à la durée du psoriasis. À la lumière de tous ces éléments, le Dr Mehta a déclaré qu'«il est essentiel que les prestataires de soins qui s'occupent des patients atteints de psoriasis les informent du risque accru de MCV ainsi que de l'importance du dépistage des facteurs de risque cardiovasculaire et de les traiter de façon appropriée».

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