Lectures de l’année

Quel dommage… Pour ma part, il y a quelques livres, en réalité plusieurs livres, qui ont marqué mon existence. Il y a Le nom de la rose1 d'Umberto Eco, que je n’ai réussi à comprendre qu’après avoir vu le film, tellement c’est compliqué. « En l'an 1327, dans une abbaye bénédictine, des moines disparaissent. Un franciscain, Guillaume de Baskerville, aidé du jeune novice Adso von Melk, mènent l'enquête. C'est l'époque ou l'Église, en pleine crise, se voit disputer son pouvoir spirituel et temporel. C'est aussi l'apogée de l'inquisition. » Il y a Les Oiseaux se cachent pour mourir de Colleen McCullough2. Ce que j'ai pleuré ces histoires d'amour impossibles et détester ce Ralph de Bricassard, prêtre vil et vaniteux ! Il y a Les Bienveillantes de Jonathan Littell3, que je cite à tout bout de champ, à chaque fois que l'Humanité me désespère, et comme elle me désespère souvent... « En fait, j’aurais tout aussi bien pu ne pas écrire. Après tout, ce n’est pas une obligation. Depuis la guerre, je suis resté un homme discret; grâce à Dieu, je n’ai jamais eu besoin, comme certains de mes anciens collègues, d’écrire mes Mémoires à fin de justification, car je n’ai rien à justifier, ni dans un but lucratif, car je gagne assez bien ma vie comme ça. Je ne regrette rien : j’ai fait mon travail, voilà tout …. Malgré mes travers, et ils ont été nombreux, je suis resté de ceux qui pensent que les seules choses indispensables à la vie humaine sont l’air, le manger, le boire et l’excrétion, et la recherche de la vérité. Le reste est facultatif. » Les Chaussures Italiennes de Henning Mankell4, bien sûr. Comment ne pas nous reconnaître en cet homme, médecin, chirurgien qui a commis l'irréparable, qui a cruellement abandonné et qui vit maintenant reclus dans un « shack » perdu dans l’hiver? « Fredrik Welin vit sur une île de la Baltique. A soixante-six ans, sans femme, ni amis, il a comme seule activité une baignade quotidienne dans un trou de glace. L’intrusion d’Harriet, l’amour de jeunesse abandonnée quarante ans plus tôt, brise la routine. Mourante, elle exige qu’il tienne une promesse : lui montrer un lac forestier. Fredrik ne le sait pas, mais sa vie vient de recommencer. » Océan Mer d'Alexandro Barrico, épouvantable, absolument épouvantable, il n'y a pas d'autres mots pour décrire cette histoire. Ah! Ma sempiternelle peur de l’abandon. De retour le 11 avril, publié dans Les Blocs erratiques d'Hubert Aquin5, que j'ai lu et relu dans les pires moments troubles de ma vie et que je vous le déconseille! Et pourtant… « …Il neige en moi doucement, sans arrêt, de plus en plus, et j’ai froid. Mon amour, j’ai froid… Et cette fois, rien, absolument rien ne viendra me rejoindre au milieu de ma nuit, car je me suis réfugié dans une chambre d’hôtel, insonorisée et luxueuse comme un cercueil géant. » The Leisure Seekers de Mchael Zadooran6 dont je n'arrête pas de parler par les temps qui courent. « John et Ella vivent ensemble depuis plus de cinquante ans. Une existence comblée par la naissance de deux enfants. À 80 ans, ils sont désormais au crépuscule de leur vie. Ella est atteinte d'un cancer généralisé et John de la maladie d'Alzheimer. Un jour, lassée des interventions chirurgicales et de la surveillance médicale, consciente qu'il s'agit de leur dernière opportunité de faire quelque chose d'un peu fou, Ella convainc John de partir sur les traces de leur bonheur passé.... Il n'est jamais trop tard pour partir à la conquête de son bonheur! » Et, bien sûr, The Road (La route) de Cormack McCarthy7. Épouvantable, absolument épouvantable. Aucun autre mot pour décrire ce livre. Prions le ciel pour que jamais cela ne nous arrive. « L’apocalypse a eu lieu. Le monde est dévasté, couvert de cendres et de cadavres. Parmi les survivants, un père et un fils errent sur une route, poussant un caddie rempli d’objets hétéroclites. Dans la pluie, la neige et le froid, ils avancent vers le les côtes du Sud, la peur au ventre : des hordes de sauvage cannibales terrorisent ce qui reste de l’humanité. Survivront-ils à leur voyage? » Mais, par les temps qui courent, le livre qui me trouble le plus et qui me poursuit sans arrêt est L'insurrection des patriotes à Beauharnois de 1838 par Marcel Labelle8. Le moins que l'on puisse dire est que nos ancêtres, Les Patriotes (un parti politique démocratiquement élu), en ont mangé toute une! Pourchassés, coupés de la frontière américaine où ils tentaient de fuir après la défaite, emprisonnés, humiliés, dépossédés, maisons et granges brûlés en plein hiver, filles et mères violées par les Volunteers et les milices du Haut-Canada, déportés, pendus. Ne vous demandez pas pourquoi il n’y a pratiquement aucune maison ancestrale quand vous longez le fleuve, du Lac St-François à Chateauguay… toutes détruites. Ils étaient mes aïeuls, mes arrière-arrière-grands-parents, mes arrière-arrière-grands-frères/sœurs, des p’tites gens qui essayaient de faire valoir leurs droits. De simples cultivateurs, artisans, manœuvres, commerçants, même pas équipés pour se battre, la moitié n’avaient pas de fusils lors des événements. Cela ne vous fait-il pas penser à une certaine Ukraine et une certaine Russie? Je comprends maintenant pourquoi ma mère ne portait pas dans son cœur les loyalistes, anglophones et protestants de Huntington et Ormstown, même 150 ans plus tard. Bref, je trouve dans la lecture un plaisir indescriptible et j'ai le goût de faire mon Foglia-de-moi-même en vous demandant ce que vous lisez. Dites-nous ce que vous lisez, en plus du Médecin du Québec, de l’INESSS, du CMAJ, NEJM ou de UptoDate. Dites-nous ce qui vous passionne dans ces histoires. Références 1- https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Nom_de_la_rose_(roman) 2- https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_oiseaux_se_cachent_pour_mourir_(roman) 3- https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Bienveillantes 4- https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Chaussures_italiennes 5- https://zonelibre.ca/livres/9782892951486/ 6- https://en.wikipedia.org/wiki/The_Leisure_Seeker_(novel) 7- https://en.wikipedia.org/wiki/The_Road 8- https://www.septentrion.qc.ca/catalogue/insurrection-des-patriotes-a-beauharnois-en-1838-l

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Roger Ladouceur