L'écart de rémunération entre les sexes persiste en médecine en raison de biais systémiques, selon une étude

Au Canada, les femmes médecins gagnent systématiquement moins que leurs collègues masculins en raison des biais systémiques qui imprègnent la profession médicale, montre une nouvelle analyse.Un article publié dans le Journal de l'Association médicale canadienne suggère en effet que les femmes médecins sont sous-représentées dans les spécialités médicales les plus payantes, et sont moins rémunérées pour un travail équivalent, en raison des inégalités structurelles qui les suivent tout au long de leur carrière.«Notre analyse confirme que l'écart de rémunération entre les hommes et les femmes existe dans la médecine canadienne, lance Tara Kiran, médecin de famille et chercheuse clinicienne à l'hôpital St.Michael de Toronto. Cet écart de rémunération existe à la fois au sein de chaque spécialité médicale et entre les spécialités.»La Dre Kiran et sa coauteure, la Dre Michelle Cohen, de l'Université Queen's, ont utilisé des données accessibles au public pour examiner la relation entre la proportion de femmes dans une spécialité et les gains moyens au Canada.Elles ont constaté que les femmes représentent moins de 35% des médecins dans les 10 spécialités aux revenus les plus élevés, notamment la radiologie, l'ophtalmologie et la cardiologie. En revanche, elles représentent environ la moitié ou plus de la main-d'œuvre dans les spécialités les moins biens rémunérées, comme la médecine familiale, la psychiatrie et la pédiatrie.Les femmes médecins gagnent également moins en moyenne que leurs homologues masculins dans le même domaine, ont noté les auteures.Selon une analyse des données de l'Association médicale de l'Ontario, les hommes en médecine familiale gagnent 30 % de plus que les femmes, et ceux en spécialités, 40 % de plus.L'argument souvent mis de l'avant selon lequel les femmes en médecine gagnent moins parce qu'elles travaillent moins est faux, a souligné la Dre Kiran. Bien que les données suggèrent que les femmes médecins travaillent un peu moins d'heures par semaine, en particulier pendant les années de procréation, la différence au cours de leur carrière n'est pas suffisante pour expliquer l'écart de rémunération.La disparité des gains est plutôt le résultat de préjugés conscients et inconscients qui dévalorisent systématiquement le travail des femmes, a-t-elle expliqué.La Dre Kiran a déclaré que les problèmes commencent dès la faculté de médecine, où les femmes font face à un «curriculum caché» qui oriente beaucoup d'entre elles vers des spécialités moins bien rémunérées. Des recherches indiquent par ailleurs qu'à mesure que la proportion de femmes dans une spécialité augmente, le revenu relatif de cette spécialité diminue.Les problèmes persistent tout au long du processus de recrutement, qui est souvent facilité par des réseaux masculins informels, selon elle. Ces structures de pouvoir se perpétuent souvent en donnant aux hommes une longueur d'avance pour gravir les échelons vers des postes de direction, a-t-elle déclaré.Les femmes médecins sont également moins susceptibles de négocier des salaires plus élevés, a déclaré la Dre Kiran, souvent parce qu'elles entretiennent un sentiment de «syndrome de l'imposteur» qui est renforcé par de réelles pratiques discriminatoires.«Nous savons que les femmes ont en fait un salaire de départ inférieur, et l'existence de préjugés renforce donc ces stéréotypes», a déclaré la Dre Kiran.«Les femmes peuvent parfois se considérer comme étant moins aptes à négocier une rémunération plus élevée. Mais elles sont aussi plus susceptibles de subir des conséquences en essayant de le faire.»La discrimination fondée sur le sexe est même intégrée dans le barème de rémunération à l'acte du Canada, note-t-elle.Une étude du système ontarien publiée dans JAMA Surgery a révélé qu'entre 2014 et 2016, les chirurgiennes gagnaient 24% de moins par heure passée à opérer que les chirurgiens de sexe masculin, malgré l'absence de différence significative entre les sexes dans le temps passé à effectuer des interventions courantes.En fait, les chercheurs ont constaté que les chirurgiennes opéraient de manière disproportionnée sur les femmes, et que bon nombre de ces procédures étaient facturées moins cher que les opérations comparables pour les hommes. Par exemple, l'Ontario paie aux chirurgiens 50,90 $ pour une incision sous anesthésie générale d'un abcès vulvaire, soit près de la moitié des 99 $ payés pour un abcès scrotal.«L'écart de rémunération entre les hommes et les femmes est au cœur d'un problème à multiples facettes, a dénoncé la Dre Kiran, et les solutions sont donc vraiment multiformes avec de nombreux acteurs différents.»La Dre Kiran et sa coauteure suggèrent des actions comprenant une formation contre l'oppression, une plus grande transparence dans les pratiques d'embauche et de référence, et l'amélioration des politiques de congé parental. Elle exhorte également les autorités à réévaluer les barèmes de rémunération pour corriger les inégalités basées sur le sexe et à récompenser le temps passé à s'occuper d'un patient au lieu de se limiter au nombre d'interventions effectuées.La Dre Clover Hemans, présidente nationale de la Fédération des femmes médecins du Canada, a appelé à plus de recherches sur la façon dont l'écart de rémunération entre les sexes affecte les personnes non binaires et comment il se recoupe avec d'autres identités, y compris la race, les handicaps et l'orientation sexuelle.La discrimination en médecine n'est pas seulement une question de rémunération, a déclaré la Dre Hemans. Elle a également des répercussions importantes sur les résultats de santé des patients canadiens.»«S'il y a une lueur d'espoir à ... une pandémie mondiale, c'est que les gens remettent en question ce qui a été considéré comme la norme. Et j'espère vraiment que nous ne reviendrons pas au statu quo», a ajouté la Dre Hemans.«J'espère en arriver à de meilleurs résultats pour tout le monde en examinant cette question de manière plus critique pour savoir comment faire mieux que ce que nous faisons actuellement.»

L'écart de rémunération entre les sexes persiste en médecine en raison de biais systémiques, selon une étude

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