Le dossier des destructeurs de reins

En général, les reins ne sont pas sexy.Pas pour moi, en tout cas. Désolée, les spécialistes de la néphrologie et de l’urologie et tous ceux qui aiment les reins!À moins que les patients ne soient inconscients, je ne réclame pas à cor et à cri une prise de sang et une perfusion, et même dans ce cas, je préfère rester tranquille et laisser les infirmières et les phlébotomistes faire leur travail.Je suppose que les reins sont plutôt du genre fort et silencieux, qu’ils font le travail nécessaire pour nous maintenir en vie sans exiger d’attention. Un peu comme certaines personnes que nous connaissons, et que nous bénissons pour cela.Aujourd’hui, cependant, j’ai rencontré un pathologiste et directeur de laboratoire qui avait introduit le calcul CKD-EPI 2021 dans l'examen de la fonction rénale (le DFGe, débit de filtration glomérulaire estimé). Un médecin de famille l’a personnellement remercié parce que les directives précédentes étaient discriminatoires à l’égard des patients noirs.Qu’en est-il?Ils se sont tous les deux expliqués, et voici ce que j’en ai compris : le calcul antérieur du CKD-EPI (celui de 2009) incluait un facteur de correction basé sur la race qui donnait des résultats de DFGe différents pour les personnes de race noire et les individus de race blanche.À lire aussi: «Certaines populations sont sous-représentées de manière chronique dans les études cliniques»L’utilisation d’un facteur de modification reposait sur l’hypothèse que les concentrations moyennes de créatinine sérique sont plus élevées chez les Noirs, ce qui s’explique, de manière controversée, par leur masse musculaire moyenne plus importante.L’équation CKD-EPI 2009 donne aux Noirs des résultats de DFGe plus élevés qu’aux Caucasiens pour les mêmes mesures de créatinine. Cela semble inoffensif, n’est-ce pas? Ils obtiennent simplement de meilleurs résultats à leurs examens de laboratoire.En fait, c’est terrible parce que ces résultats ne sont pas exacts. L’augmentation artificielle des résultats signifie que les Noirs ne reçoivent pas nécessairement les soins préventifs dont ils ont besoin pour traiter l’insuffisance rénale à un stade précoce. Ils ont également été jugés inéligibles à une greffe de rein parce que leur fonction rénale semblait trop bonne!Cela m’a choquée.Imaginez le nombre de personnes qui souffrent, qui n’obtiennent pas les soins dont elles ont besoin et qui meurent prématurément, tout cela à cause d’un calcul erroné.J’utilise le présent, car tous les hôpitaux ne sont pas encore passés au calcul de 2021. Les hôpitaux de l’Ontario étaient censés y passer avant avril 2024, mais au moins un grand centre hospitalier de la province ne le fera probablement pas avant la fin de l’année.Je comprends la bureaucratie et la difficulté de la transition.Mais il semble que nous sommes en train de revoir l’approche sur la base d’une étude publiée en 2018. Personnellement, je ne voudrais pas que mes reins se soient détériorés au cours des six dernières années, pendant que les rouages de l’hôpital tournaient à plein régime.Lire aussi: Des problèmes pulmonaires auraient été sous-diagnostiqués chez des hommes noirs en raison d’un biais dans un logiciel de testJe pense à la créatinine la plus basse (et donc au DFGe le plus bas) que j’aie jamais vue, chez un patient qui commençait à présenter un état mental altéré. Ce n’était pas la première fois que cela se produisait. Mon coéquipier a commencé à paniquer et, franchement, je ne me suis pas fait prier pour appeler le néphrologue et lui demander: «Que dois-je faire?»Réponse: transfert en néphrologie pour une dialyse d’urgence dans un autre hôpital. Alléluia! Je ne sais pas si une greffe de rein a suivi.Rétrospectivement, la race de mon patient n’était probablement pas une coïncidence dans ce cas.Vous pensez peut-être qu’ils sont en train de corriger le calcul CKP-EPI et que ce n’est pas grave, mais posez-vous un instant et réfléchissez. Il s’agit d’une affaire importante. Il pourrait s’agir de vous ou de l’un de vos proches dont le calcul erroné se prolonge jusqu’à la fin de l’année 2024. Il pourrait s’agir de l’histoire de la médecine qui s’apprête à nuire à vos patients ici et maintenant.Lorsque nous jurons de ne pas nuire, ce n’est pas seulement dans nos interactions quotidiennes. Nous devons reconnaître les préjugés systémiques, non seulement dans notre façon d’agir, mais aussi dans nos outils. Nous devons réfléchir à nos pratiques, renverser les théories antérieures et nous ouvrir à des données nouvelles et meilleures. Nous devons financer la recherche, y compris la science fondamentale.Peut-être pourrons-nous alors construire une société plus saine et plus juste.La Dre Melissa Yuan-Innes est médecin urgentiste à Alexandria, en Ontario.

Le dossier des destructeurs de reins

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