Le dire quand ça va bien

Je sais, au cours des dernières années, j’ai été passablement critique dans mes blogues. Pas surprenant que ça s’intitule «Bâbord Amures». Ceux qui font de la voile savent ce que cela signifie. Si j’avais voulu dire comme tout le monde j’aurais plutôt opté pour «Tribord Amures». On conviendra que cela aurait été plus facile.J’ai donc critiqué – chialer même – sur à peu près tout et rien. J’ai critiqué les Dossiers Médicaux électroniques, plus d’une fois d’ailleurs (ici, ici et ici).J’ai chialé contre les aléas du système, la foutue paperasse, les ratés des CRDS.J’ai critiqué le Collège des médecins du Québec (CMQ) et ses assemblées générales «singulières». Ce qui n’était sans doute pas une bonne idée. Cela qui m’a valu une réplique musclée de la part de son président. Je ne serais pas surpris si, depuis ce moment, on y scrute attentivement chaque mot que j’écris. Cela me procure des lecteurs assidus!Je me suis aussi insurgé contre le Collège des médecins de famille du Canada et son unilinguiste anglophone, ce qui m’a aussi valu, là aussi, une réplique de son président. Je me suis aussi prononcé contre la 3ième année de résidence alors que tous étaient en faveur, et ce, avant qu’une motion ne vienne rejeter son implantation.J’ai mis à jour les augmentations en catimini des cotisations syndicales de la FMOQ et les tarifs salés des autres associations professionnelles.J’ai aussi osé parlé d’argent, ici ou ailleurs, ce qui est toujours risqué. On ne peut pas écrire «La médecine familiale n’est pas une business» sans en subir les conséquences. Bref, ne vous demandez pas pourquoi je n’ai pas d’amis (sic).****Pourtant, il arrive que les choses aillent bien. Comme là maintenant…Je connais ce patient depuis une vingtaine d’années. Il travaille dans les mines du Grand Nord québécois. Il est en bonne santé. De saines habitudes de vie. Pas de maladie connue. Pas diabétique. Ne prend aucun médicament.Il me dit: Docteur, je pense que je fais des hypoglycémies.Dans mon expérience, les personnes qui prétendent faire de l’hypoglycémie utilisent ce terme pour désigner plutôt autre chose: des faiblesses, des états d’anxiété, des attaques de panique. En réalité, rares sont ceux qui prennent leur glycémie capillaire lors de leurs prétendues hypoglycémies. En 50 ans de pratique, je n’ai pas trouvé beaucoup d’insulinome.Sauf que ce cas est différent. Je connais ce patient depuis longtemps. Je considère qu’il est fiable. Il me raconte que cela a commencé il y a quelques mois par des épisodes de faiblesses, surtout le matin, lorsqu’il est à jeun et qu’il fait un effort. Pas de douleur. Pas d’essoufflement. Simplement, une sensation de faiblesse et malaises qui passent dès qu’il mange. Je me suis acheté un glucomètre et mes lectures sont autour de 3,1. Le fait de manger corrige immédiatement la faiblesse.Ah! Bon….Je parcours UptoDate mis à ma disposition par mon établissement: sous «Hypoglycemia in adults without diabetes: Determining the etiology», je découvre la Triade de Whipple. Vous connaissez? Moi pas. Symptoms consistent with hypoglycemia;A low plasma glucose concentration measured by laboratory assay when symptoms are present;Resolution of hypoglycemic symptoms after the plasma glucose level is raised.Je demande alors un conseil numérique. Il est 13h30.Deux heures plus tard, la réponse me revient!!! Je suggère une évaluation en endocrinologie pour mieux investiguer ce problème. En attendant la consultation, voici quelques pistes: - Il faudrait préciser le moment des possibles hypoglycémies (à jeun, davantage suggestif d'insulinome, VS post-prandial).- Donc, je suggère qu'il fasse un journal avec les heures des repas, les moments des malaises et les glycémies capillaires obtenues lors de ces malaises. - Un bilan sanguin incluant glycémie veineuse à jeun + peptide C, insuline et HbA1c pourraient également être utiles, surtout si tableau d'hypoglycémie de jeûne*.Temps de réponse: deux heures. Pas deux semaines ou deux mois, ou même deux ans, comme beaucoup d’autres demandes que nous formulons.Ne me dites pas que ce n’est pas du service que cela.Bref, c’est vrai que parfois (souvent) ça va mal dans le système de santé. Mais, il arrive que cela aille bien. Même très bien.Je tenais à le dire.À tous mes amis dispersés…*Publié avec l’autorisation de l’auteur

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Derrière ce blogue:

Roger Ladouceur

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